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et un zeste de « brunch du dimanche », on comprend très vite<br />
qu’elle parle de ces intellos parisiens que l’on voit parfois<br />
à la télé, écolos du canal Saint-Martin, voire des Verts, ces<br />
« pastèques » (comme dirait son père, adepte de la formule :<br />
« verts dehors, mais rouges dedans ») qui sont devenus – après<br />
les journalistes « juifs », les franc-maçons et les « socialocommunistes<br />
» – des cibles privilégiées du lepénisme nouvelle<br />
mouture.<br />
L’antifascisme a parfois refusé d’utiliser<br />
la dérision et la révélation moqueuse,<br />
face <strong>au</strong> <strong>FN</strong>. Le sujet serait trop<br />
« sérieux », d’après les plus pince-sansrire<br />
du combat (parfois violent). Pourtant,<br />
cela fonctionne bien, à la fois dans le vif<br />
d’une discussion, pour mettre les gens de<br />
son côté et écorner l’image des Le Pen et<br />
leur volonté de respectabilité, mais <strong>au</strong>ssi<br />
à long terme, pour mettre en question<br />
la vision lepéniste du monde qui séduit<br />
parfois par son apparente cohérence et<br />
simplicité.<br />
Il n’est donc pas interdit – il serait<br />
même recommandé – de faire dans<br />
l’humour, même légèrement décalé, à<br />
propos du parcours de potache de Le<br />
Pen père et de bonne vivante de Le Pen<br />
fille, ou des aventures diverses de la<br />
famille, mise en scène par ailleurs pour<br />
les besoins de la c<strong>au</strong>se. On pourrait<br />
évoquer, pêle-mêle, la vie de nouve<strong>au</strong><br />
riche de banlieue cossue (Saint-Cloud)<br />
et ses affres, ses dérives, ses excès, la<br />
défense des comptes en Suisse de la fille<br />
pour le père, la propension à intenter<br />
des procès et des menaces de poursuites<br />
<strong>au</strong> tribunal à tout propos (journalistes,<br />
adversaires, etc.). On pourrait même,<br />
dans un registre que les Le Pen aiment<br />
manier à l’égard de leurs adversaires,<br />
envisager une approche légèrement<br />
grivoise : qu’il s’agisse de fredonner le<br />
« petit pull marine, <strong>au</strong> fond de la piscine »<br />
(sur un air de Gainsbourg), ou de noter la<br />
propension des Le Pen à avoir les fesses<br />
L’arme de la dérision et de la révélation<br />
à l’air en photos (du père comme de la<br />
mère), ou à défrayer les chroniques des<br />
nuits parisiennes dans certains milieux<br />
(père et fille).<br />
Côté finances, enfin, il serait utile de<br />
présenter – avec humour et pour remettre<br />
les pendules à l’heure – la situation réelle<br />
de la PME familiale Front national, qui<br />
fait bien vivre la famille Le Pen depuis<br />
bien des années, pour un montant évalué<br />
à 2 millions de francs par an (en 1999,<br />
soit plus de 300 000 euros). Un parti et<br />
un chef qui attirent les dons privés de<br />
nombreux donateurs depuis longtemps<br />
et parfois les héritages particuliers<br />
(affaire de l’héritage d’Henri Bussière,<br />
jugée par la cour d’appel de Nancy, en<br />
1997) 1 . On pourra <strong>au</strong>ssi rappeler que,<br />
toujours prompt à donner des leçons de<br />
propreté des mains, Jean-Marie Le Pen<br />
a hérité de la fortune de Hubert Lambert<br />
(en 1976), de biens immobiliers et de<br />
valeurs et comptes divers (et des amis<br />
bien placés pour le faire fructifier) et qu’il<br />
a parfois eu certains oublis à propos de<br />
ses déclarations d’impôts 2 . La famille,<br />
l’argent et l’héritage, des sujets à creuser<br />
chez les Le Pen.<br />
1. Sur ce point, voir Caroline Fourest et Fiammeta<br />
Venner, Le guide des sponsors du Front national et<br />
de ses amis, Raymond Castells, 1998. Notamment<br />
les pages 15 à 20 : « Petits rappels sur certaines<br />
pratiques financières du <strong>FN</strong> ».<br />
2. Sur l’ISF, par exemple, ou sur certains revenus.<br />
La justice a parfois donné son avis : un jugement du<br />
8 novembre 1995 le condamne à un redressement<br />
de 1,4 million de francs pour « oublis de plus-value<br />
boursière et sous-estimation de loyer ».<br />
Écologisme vs lepénisme :<br />
challengers politiques opposés<br />
À côté des forces politiques traditionnelles, organisées suivant<br />
le découpage droite-g<strong>au</strong>che (qui date du XVIII e siècle), les<br />
écologistes sont porteurs d’une rénovation du regard politique,<br />
qui inclut des valeurs post-matérialistes, dont l’application<br />
remet en question la plupart des positions habituelles du<br />
champ politique. En ce sens, ils sont des challengers dans<br />
le système politique hexagonal et mondial. Porteurs d’une<br />
approche radicale (et réformiste), les écologistes engagés en<br />
politique cherchent à apporter des réponses <strong>au</strong>x principales<br />
crises de nos civilisations, dont la crise des ressources, ou celle<br />
de la raréfaction du vivant. Problèmes <strong>au</strong>trement plus graves<br />
et glob<strong>au</strong>x que le nombre de caméras de surveillance, ou la<br />
baisse tendancielle du pouvoir d’achat...<br />
Même si le principal parti écologiste (EELV) est amené à nouer<br />
des alliances avec le Parti socialiste pour avoir des élu-es et être<br />
présent <strong>au</strong> gouvernement, le mouvement écologiste (dans son<br />
ensemble) doit tout faire pour conserver une capacité critique<br />
et une expression indépendante à l’égard des pouvoirs, pour<br />
pouvoir peser sur le cours des choses et influencer à la fois les<br />
gouvernants, mais <strong>au</strong>ssi l’opinion publique. Ce qui implique<br />
<strong>au</strong>ssi de pouvoir s’appuyer sur des partenaires non strictement<br />
politiques dans le champ de l’écologie : mouvements, ONG,<br />
groupes de réflexion, etc.<br />
Une écologie de combat<br />
La force du paradigme écologiste est qu’il ne peut se laisser<br />
enfermer dans une posture gestionnaire. L’écologie est une<br />
approche radicale, qui nécessite une remise en question du<br />
modèle productiviste dans son ensemble, bien <strong>au</strong>-delà des<br />
clivages partisans et politiques actuels. C’est à ce titre que<br />
les écologistes doivent pouvoir s’adresser sans peine à des<br />
électeurs attirés par un vote « protestataire ». Le pire serait de<br />
laisser à l’extrême droite politique le monopole de la critique du<br />
monde tel qu’il est ; ce serait un pas de trop vers l’impuissance<br />
et l’incapacité à proposer des solutions pour sortir des crises.<br />
L’inverse de ce que les écologistes doivent proposer.<br />
Dans le système politique actuel, l’écologie se trouve donc<br />
nécessairement dans une double opposition et dans l’obligation<br />
de mener un double combat : face <strong>au</strong> système actuel, qui ne<br />
prend en compte que les questions sous l’angle de la production<br />
et de la « dépense » (énergie, ressources, biens) ; et face <strong>au</strong> Front<br />
national (et ses diverses formules, ailleurs dans le monde) en<br />
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