BOUQUINVERTInfos écolos<strong>Le</strong> genre naissant de la bande dessinée documentaire (ou de reportage) prolifère irrésistiblement!Depuis quelques années à peine, et de plus en plus ces derniers mois, on assiste à l’avènementde nombreux titres s’attaquant tout aussi bien à des problématiques relationnelles etsociales que politiques. Et la bande dessinée étant un médium en phase avec son époque, l’environnementaussi se retrouve fréquemment abordé, souvent avec succès.Par Eric Bouchard, librairie MonetChronique d’une collision politiqueRappelons-nous que c’est Étienne Davodeau qui ouvrele bal du reportage engagé en 2001 avec Rural!, cetinoubliable plaidoyer en faveur de la culture bio. Durantun an, l’auteur a suivi trois jeunes éleveurs laitiers ayantchoisi de convertir leur production au biologique, et uncouple qui, après dix ans de labeur, achève de rénoverune maison de campagne. Mais voilà, un projetautoroutier viendra saboter les rêves de ces quelquespassionnés, qui devront rejouer David contre Goliathface à la tyrannie d’un tracé absurde. Cette bande dessinéeexceptionnelle aura fait des petits…Portrait d’une utopieSe définissant lui-même comme « reportage d’anticipation», Écoloville est un récit où sont projetées à grandeéchelle diverses technologies écologiques existantactuellement à l’état d’essai. Dans un futur proche(2015!), le réchauffement climatique s’est tant accéléréque des pics de chaleur estivaux à 50 degrés ne sont pasrares… Et comme le niveau de la mer s’est considérablementélevé, la France se retrouve avec unepopulation côtière de 20 millions de personnes à relogerde toute urgence. Dans le but de bâtir un projet urbaindurable, une délégation scientifique sera envoyée àÉcoloville pour s’inspirer de ces différentes innovations.D’abord, son réseau de brumisateurs géants, soufflantair chaud en hiver et air frais en été, offre un microclimatconfortable à ses habitants. Ensuite, son incroyableparc de panneaux solaires, installés sur l’ensemble deshabitations grâce à un programme d’aide, assure uneautonomie énergétique relative à la Ville. Par ailleurs,l’étude des énergies renouvelables est une matière scolaireobligatoire! Ajoutons à cela l’immense marché àciel ouvert, les zones de friches classées réservesnaturelles ou les automobiles fonctionnant au biocarburant(hum, ça sent la merguez!). Une ville de rêve, pensons-nous?Mais tous ne voient pas la vie en vert à© Écoloville, HachetteÉcoloville, à commencer par la Mairie et la sociétéTricel, qui se disputent un nouvel or noir : le recyclagedes déchets! Se serait-on jamais imaginé qu’on se battraitpour une épluchure de patate?Autopsie d’une catastropheMars 2003, deux mois après la fermeture de l’usineMetaleurop, le dessinateur Jean-Luc Loyer et le journalisteXavier Bétaucourt se rendent sur place pour dresserun bilan de l’affaire et recueillir les témoignages dequelques métallos. Ils sont plus de sept cents à voir leuremploi supprimé à la suite d’une décision unilatéraled’actionnaires, et laissés pour compte sans plan socialdans un milieu contaminé au plomb sur une zone dequarante-cinq kilomètres carrés! À la lumière d’unevisite guidée des installations délabrées de Metaleuropdésaffecté (personne n’osait se plaindre de ladangerosité du lieu de peur qu’on le ferme), le rapportde ces quelques anecdotes nous donne un grand frissondans l’échine : alors que la direction persiste à affirmerque le site n’est pas pollué, le taux de saturnisme (intoxicationinfantile au plomb entraînant des troublesneuro-comportementaux irréversibles) de la communeest dix-huit fois supérieur aux normes autorisées; ounous laisse un goût écœurant dans la bouche : parexemple, cet exploitant agricole qui se rend compteaprès des années de cultures infructueuses et la mort deplusieurs de ses vaches que le vétérinaire, qui nevoyait rien d’anormal dans ces décès, était soudoyé parles dirigeants de l’usine, et que ses sols étaient saturésen métaux lourds! Et à qui, après l’avoir accusé derépandre des céréales empoisonnées sur le marché, onpropose des subventions pour financer sa productioninsuffisante! L’hypocrisie de Metaleurop aura duréjusqu’à la fin.Rural!Étienne Davodeau,Delcourt,coll. Encrages,144 p., 19,95$ÉcolovilleJean-Yves Duhoo,Hachettelittératures,coll. La Fouineillustrée, 94 p.,24,95$Noir métalJean-Luc Loyer etXavier Bétaucourt,Delcourt,coll. Mirages,109 p., 24,95$J U I L L E T - A O Û T 2 0 0 626
BOUQUINVERT© Champions du monde de l’écologie,Milan Jeunesse<strong>Le</strong>s guides duparfait petit écoloSi on se fie à la quantité de livres disponibles, les jeunes d’aujourd’hui ont tous les moyens pour devenir deparfaits écolos, conscients de tout ce que la nature a à offrir et de toutes les manières dont nous risquons de ladétruire. Lutte contre la pollution, compréhension des changements climatiques, espèces menacées, productiond’énergie, agriculture : tout est touché par ces ouvrages souvent militants et regorgeant de propositions d’actesconcrets que chacun de nous peut poser pour améliorer les choses.Par Rémy CharestL’un des plus réussis de cette catégorie est sans aucundoute L’écologie dans la collection « L’imageriepourquoi comment », produite par les éditions Fleurus(125 p., 19,95$). En courtes séquences questionréponse,le livre fait habilement le tour de questionscomme les transports, l’agriculture, l’effet de serre, la gestionde l’eau, la pollution urbaine et la gestion desressources naturelles, ou même de sujets plus pointuscomme les espèces envahissantes ou l’assèchement de laMer d’Aral dans l’ex-URSS. Mise en contexte, explicationsclaires et faits incroyables se côtoient de page enpage, d’une façon très équilibrée et rigoureuse, tout enétant agréablement présentés.Chez Milan Jeunesse, on offre également toute une collectionécologiste, sous le titre collectif « Agir pour maplanète ». Il y a d’abord un guide général intitulé J’aimema planète et toute une série de tomes plus spécifiquessur L’Eau, <strong>Le</strong> Bruit, L’Énergie ou <strong>Le</strong>s Déchets (31 p.ch., 11,95$ ch.). Petits livres compacts et bien illustrés, ilssont aussi informatifs et pratiques,comme en témoigne le sloganimprimé en bas de couverture detous les ouvrages de la série : « jedécouvre – je comprends – j’agis ».En faire tropEmportés par la bonne cause, certainslivres ont tendance à trop enfaire. Par exemple, Championsdu monde de l’écologie, aussichez Milan Jeunesse (96 p., 16,95$), propose pleind’excellents gestes quotidiens ou occasionnels qui peuventaider véritablement l’environnement. Mais il y abeaucoup d’autres idées dont les avantages, voire lapertinence, ou même l’exactitude, se révèlent beaucoupplus douteux. Par exemple, visiter un Écomuséeest-il vraiment un moyen de constater qu’« autrefois,la nature imposait son rythme aux hommes »?Prendre le vélo, nous dit-on encore, nous permet d’êtreplus haut perché et donc, de respirer moins de gazd’échappements qu’en étant à pied : vraiment? Etquand on parle de qualité de l’air, est-ce que la guerreaux acariens est vraiment un moyen de lutte contre lapollution? À prendre avec un grain de sel --- marin,sans doute.De même, <strong>Le</strong> Dico de l’écologie des éditions De laMartinière Jeunesse (123 p., 26,95$), s’il se montreglobalement plus rigoureux dans ses propos scientifiques,a toutefois une tendance à pousser l’éditorialassez loin dans les rubriques. L’article sur la faim dansle monde, par exemple, procède d’un point de vue pluspolitique que scientifique. Sous le terme « Robinet »,<strong>Le</strong>s étagèresdébordent delivres jeunesseconsacrésà la nature et àl’environnement© Image Arts etc.on trouve la phrase : « Un robinet, ça s’ouvre, mais çase ferme aussi! », ce qui est plus un slogan qu’unedéfinition. Pour un dico, c’est un dico engagé, c’est lemoins qu’on puisse dire.Bien sûr, il n’est pas étonnant que le point de vuedonné soit jusqu’à un certain point militant, et que l’oncherche un peu à secouer le jeune enfant-consommateurdes pays industrialisés. Mais le risque, c’est de fairepasser de l’opinion pour de l’information, un mélangedes genres qui, au bout du compte, crée des confusionssupplémentaires qui n’aident pas plus la cause. <strong>Le</strong>principe de précaution que les écologistes recommandentpour les interventions humaines, ça peut aussis’appliquer aux affirmations de tout un chacun.Comment ça marche, la Terre ?Pour bien comprendre le fonctionnement de la natureet éclairer les actes écologiques que nous sommesappelés à poser, il faut aussi pouvoirremonter un peu en amont de ceslivres engagés pour s’informer surun mode un peu plus encyclopédique.Bref, on choisit mieuxses gestes si on comprend bienquels effets ils auront sur le mondequi nous entoure.Ainsi, on comprendra mieux la biodiversitéen explorant La Vie desanimaux, une encyclopédieLarousse destinée aux 6 à 9 ans(78 p., 19,95$). Des mœurs amoureuses à la vie degroupe en passant par les cris, l’alimentation, le camouflage,la reproduction, l’habitat ou les défensesnaturelles des animaux, on couvre tout de façon simpleet claire, compréhensible pour un élève du primaire.Un beau tour des merveilles du règneanimal, qui ont de quoi nous donnerenvie de mieux lespréserver.Pour un lectorat unpeu plus âgé, les« Guides de la connaissance» des éditionsQuébec Amériqueconstituentégalement une collectionhautement recommandable.Dans lestyle qui a fait le succès de lamaison, fort sur l’illustration etclair dans ses explications, le derniernéde la série, <strong>Le</strong>s Plantes, sous-© Scorcelletti-Gammatitré Comprendre la diversité dumonde végétal (128 p., 19,95$),fait le tour de la question en détails,des structures cellulaires à la croissancedes grands arbres et auxmilieux naturels pris dans leurensemble. <strong>Le</strong> développement desplantes à fleurs, le rôle de la chlorophylleou la façon dont certainesplantes s’en passent, le transport dela sève ou la dispersion du pollensont autant de phénomènesexpliqués avec des imageséclairantes et un propos ordonné etsystématique. Un tour d’horizondes centaines de milliers d’espècesdu monde végétal qui a tout cequ’il faut pour bien nous faire comprendreque tout ce qui nousentoure, en ville comme à la campagne,grouille de vie complexe etadaptée à son milieu. <strong>Le</strong> genred’enseignement qui, une foisimplanté dans votre esprit, voussuit toute la vie.En ce sens, le parcours que proposentces livres est loin de se limiter à l’enfance.Pour quand ils seront grands,vous pourriez aussi leur acheterL’Arbre, une vie de David Suzuki etWayne Grady, un ouvrage très originalqui fait le tour de la vie d’un pinde Douglas et de tout ce qui l’entoureet l’habite, au fil des siècles. Loind’être légère, cette biographie se litlentement, en portantattention aux petitsdétails de la Vie, cequi est peut-être ensoi une leçond’écologie.© Champions du monde del’écologie, Milan JeunesseJ U I L L E T - A O Û T 2 0 0 627