REPERES - IREM. N° 63 - avril 2006LES TRANSFORMATIONSEN GEOMETRIE …Une transversale coupe le quadrilatère complet <strong>en</strong> (PQ) (IK) (HG) et le cercle <strong>en</strong> (LM).Desargues montre que (LM) (QP) (IK) sont <strong>en</strong> involution ainsi que (LM) (QP) (GH) et ét<strong>en</strong>dà cette occasion la définition de l’involution à quatre couples de points : (LM) (QP) (IK) (GH)sont <strong>en</strong> involution si trois de ces quatre couples pris comme on voudra sont <strong>en</strong> involution.La propriété vraie dans le cercle se transporte aux coniques par projection, par le théorèmede la «Ramée».euclidi<strong>en</strong>ne, la seule connue et donc la seuleadmise à l’époque. Le texte de Desargues estdonc créateur à plusieurs niveaux :* Desargues l’architecte, l’auteur de Traitéssur la perspective, la coupe des pierre, la gnomoniquevoit <strong>en</strong> perspective et donc danscette vision, l’ellipse, l’hyperbole et la parabole— perspectives du cercle — particip<strong>en</strong>tdu cercle quant aux propriétés que conserv<strong>en</strong>tles projections (ou perspectives),* Desargues mathématise la déformationd’<strong>une</strong> configuration « par mutation optiqued’appar<strong>en</strong>ce » 8 .a) <strong>en</strong> introduisant la correspondance <strong>en</strong>treles points de deux plans, aujourd’hui appeléeprojection conique ou cylindrique,b) <strong>en</strong> traitant de la même façon les faisceauxde droites parallèles et les faisceaux dedroites concourantes, par <strong>introduction</strong> de lanotion de points à l’infini : « But de l’ordonnanceà l’infini »...,c) <strong>en</strong> traitant de la même façon cônes etcylindres (sommet rejeté à l’infini),d) <strong>en</strong> abandonnant, et c’est un changem<strong>en</strong>tconsidérable, la traditionnelle trichotomiedes coniques 9 pour la démonstration de leurspropriétés.* Desargues crée un nouveau mode démonstratifqu’il qualifie de « démonstration par lerelief », c’est-à-dire par la perspective. Il utilisealors des considérations de géométriedans l’espace pour établir des propriétés de30
REPERES - IREM. N° 63 - avril 2006LES TRANSFORMATIONSEN GEOMETRIE …géométrie plane, ce qui est <strong>en</strong> rupture avec latradition euclidi<strong>en</strong>ne.Il crée la « méthode des <strong>transformations</strong> »qui consiste à démontrer <strong>une</strong> propriété sur <strong>une</strong>configuration complexe — <strong>une</strong> conique quelconque— <strong>en</strong> la démontrant tout d’abord sur<strong>une</strong> configuration simple — le cercle — et <strong>en</strong>la transportant du cercle à la conique parperspective ou projection.Desargues, consci<strong>en</strong>t de la généralité etde la fécondité de sa démarche « Cette démonstrationbi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du s’applique <strong>en</strong> nombred’occasions et fait voir la semblable génération... »,saura transmettre ses idées et aura <strong>une</strong> postéritéimmédiate et brillante : Pascal « Essaisur les coniques » 10 suivi d’un important Traitésur les coniques 11 .Par la création d’<strong>une</strong> transformation quipermet d’<strong>en</strong>g<strong>en</strong>drer dans le plan toute coniqueà partir d’un cercle et d’<strong>en</strong> démontrer les propriétésà partir de celles du cercle, Philippede La Hire, dans ses « Planiconiques », introduitdans la géométrie <strong>une</strong> nouvelle syntaxedémonstrative, dégagée de la sémantique dela vision dans l’espace et donc des référ<strong>en</strong>tsmétaphoriques liés à la perspective. Il fait ainsifaire à la notion de transformation naissantele saut dans l’abstraction qui permettra d’<strong>en</strong>objectiver le concept .Cette création trouvera des applicationsimmédiates dans l’oeuvre de Newton : « Principesmathématiques de la philosophie naturelle.» (Voir article I).Ces idées se perdront au cours duXVIIIème siècle <strong>en</strong> même temps que se perdrala pratique de la géométrie à la manièredes anci<strong>en</strong>s, la vieille sci<strong>en</strong>ce étant supplantéepar la géométrie de Descartes 12 et le calculinfinitésimal 13 . Il faudra att<strong>en</strong>dre la fin duXVIIIème siècle pour que les méthodes de lagéométrie arguési<strong>en</strong>ne 14 retrouv<strong>en</strong>t de l’intérêtaux yeux des savants, par la création dela géométrie descriptive de Monge 15 et par lesouvrages de Carnot 16 . <strong>Les</strong> idées de Desarguesseront réintroduites par J. V. Poncelet etseront à la base du grand « Traité des propriétésprojectives des figures 17 » qui fondera la géométriesynthétique moderne et la géométrieprojective.II. La redécouverte.L’influ<strong>en</strong>ce de l’œuvre de Monge.L’œuvre capitale de Poncelet.Après plusieurs déc<strong>en</strong>nies d’abandon,les méthodes de la géométrie seront remises<strong>en</strong> usage dans l’œuvre de G. Monge. Mongese fit reconnaître alors qu’il était chargé dedessiner des plans et de réaliser des modèles<strong>en</strong> plâtre à l’école royale du génie de Mézières,<strong>en</strong> inv<strong>en</strong>tant <strong>une</strong> méthode graphique quidevait rapidem<strong>en</strong>t donner naissance à la géométriedescriptive, pour résoudre un problèmede défilem<strong>en</strong>t 18 . Monge, à l’instar deDesargues, s’intéressera toute sa vie auxproblèmes posés par les différ<strong>en</strong>ts corps demétiers : dessin architectural, coupe despierres et du bois, charp<strong>en</strong>terie, dessins demachines, de vaisseaux, etc., et trouveradans ces problèmes matière à géométrie et àinv<strong>en</strong>tions géométriques. Cela le conduira àvoir, à conceptualiser tous les problèmes à traversla géométrie, et à élaborer ainsi desméthodes qui s’avéreront d’<strong>une</strong> très grandefécondité. C’est ainsi, pour ne donner qu’<strong>une</strong>xemple, qu’il introduisit les <strong>transformations</strong>de contact sous le terme de « courbes etsurfaces réciproques » afin de résoudre <strong>une</strong>équation différ<strong>en</strong>tielle de la forme y = xF(y’)+ f(y’) <strong>en</strong> la transformant <strong>en</strong> <strong>une</strong> équation linéai-31