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BANTOUSTANSCiskei, Bophuthatswana, Venda... , la géographie et l'histoireignorent ces Etats. Tandisqu'ils sont pour l'apartheid, undes pivots essentiels <strong>du</strong> système.a concentration des Africainsdans des bantoustans a des racineshistoriques en Afrique <strong>du</strong>Sud même ou des réserves existaientdès <strong>le</strong> XIxe sièc<strong>le</strong>.Ces réserves ont été légaliséespar <strong>le</strong>s Lands Acts de 1913 et 1936 qui en ontfixé <strong>le</strong>s limites. Il s'agissait déjà de déposséder<strong>le</strong>s Africains de <strong>le</strong>urs terres et de contrô<strong>le</strong>rla circulation des populations. Mais laconstitution des bantoustans correspond, el<strong>le</strong>,à des impératifs plus modernes et permet,en outre, de dénier à la majorité de la populationtout droit politique et territorial touten la maintenant à disposition comme maind'œuvre.Une des solutions envisagées et qui sera fina<strong>le</strong>mentretenue fut la constitution d'Etatsnoirs indépendants. En attribuant aux Africainsla nationalité d'un des bantoustans ainsicréés, l'on pouvait alors <strong>le</strong>s transformer enimmigrés dans <strong>le</strong>ur propre pays, l'Afrique <strong>du</strong>Sud. Leurs territoires furent découpés enmorceaux éparpillés ou en « taches noires ».Les Blancs entendaient conserver <strong>le</strong>s 87 fl/o <strong>du</strong>territoire sud-africain qu'ils s'étaient réservé,fût-ce au prix de la crédibilité de <strong>le</strong>ur tentative.Vorster, successeur de Verwoerd, résumait en1968 la philosophie de la bantoustanisation :« Il est vrai que certains Africains travail<strong>le</strong>ntpour nous. Ils continueront de la faire pendantdes générations encore malgré notre idéalde séparation complète ... Mais pour autant,cela ne <strong>le</strong>ur donne pas <strong>le</strong> droit d'a<strong>voir</strong> des revendicationspolitiques, ni maintenant ni dansl'avenir .. . Qu'ils soient ou non résidents permanentsne change rien à l'affaire ... » (1).Dix bantoustans vont être créés : Bophuthatswana,Lebova, Kwandebe<strong>le</strong>, Gazankulu,Venda, Kangwane, Qwaqwa, Kwazulu,Transkei et Ciskei.Pour la mise en place d'autorités loca<strong>le</strong>s, Pretoriaréactiva <strong>le</strong>s anciennes structures triba<strong>le</strong>set <strong>le</strong>s coiffa d'administrateurs blancs.Au fil des années, Pretoria affecta une « nationalité» à chaque Africain (2) de façon àfaire baisser <strong>le</strong> nombre des Noirs dans <strong>le</strong>s zonesblanches, à restreindre <strong>le</strong>ur accès à la nationalitésud-africaine.La tribalisation fut poussée à outrance pourémietter encore <strong>le</strong>s ensemb<strong>le</strong>s ainsi créés. Pretoriane se priva pas de jouer des différendsentre notab<strong>le</strong>s (3), nourrissant un racismetribal.22LES CAMPSDE PRETORIALes collaborateurs de l'apartheid mis à la têtedes bantoustans se targuent parfois decondamner l'apartheid et <strong>le</strong>s « abus» de Pretoria.Cela ne va jamais très loin et ils sontau contraire des relais efficaces de la répressionraciste.Au Transkei, <strong>le</strong> clan de Kaiser Mantazina demandeune extension de son territoire et dénoncePretoria, il est aussi l'homme <strong>le</strong> pluspayé d'Afrique <strong>du</strong> Sud, entretient la corruptionet mène des milices contre l'UDF.Au Bosphuthatswana, Mangope sollicite <strong>le</strong>sinvestissements étrangers dont ses sujets nevoient jamais la cou<strong>le</strong>ur et soutien la poli tiquede Pretoria. Il parcourt <strong>le</strong> monde en servantde vitrine à la politique des bantoustans.Il a notamment été reçu à Paris.Au Ciskei, où <strong>le</strong>s é<strong>le</strong>ctions truquées sont larèg<strong>le</strong>, Lennox Sebe touche 200 fois <strong>le</strong> revenumoyen.Mais la tête de liste est sans conteste GastaButhe<strong>le</strong>zi, présenté comme un grand <strong>le</strong>aderafricain. Il ne se prive pas de se montrer commeun militant anti-apartheid et de réclamerla libération de Nelson Mandela. Ex-militantde l'ANC, saisi par <strong>le</strong> démon <strong>du</strong> pou<strong>voir</strong>,membre de la famil<strong>le</strong> roya<strong>le</strong> zouloue, il a acceptéde jouer <strong>le</strong> jeu des racistes en prenantla tête <strong>du</strong> bantoustan zoulou.Chantre de la « fierté zouloue », il a créél'Inkhata, organisation tribaliste, auxiliaireprécieux de la police sud-africaine et qui faitla chasse aux militants de l'ANC et de l'UDF.Les Impies (la branche armée de l'Inkhata)ont ainsi tué l'avocate Victoria Mxenge et sonmari et, <strong>le</strong> 21 janvier 1987, tentèrent de tuerVictor Ntuli, proche de l'UDF. On re<strong>le</strong>va 13morts. En 1985, des pogroms anti-Indiens firentdes dizaines de tués et, en 1986, de nombreuxPondos furent massacrés.En perte de vitesse (4), l'Inkhata reste un outilprivilégié de Pretoria, qui fait monter <strong>le</strong> cyc<strong>le</strong>de la vio<strong>le</strong>nce. L'Inkhata est responsab<strong>le</strong> del'essentiel de la guerre menée dans la régionde Pietermarisburg contre <strong>le</strong>s organisationsanti-apartheid et qui a fait des milliers de tués.Une situation identique prévaut dans tous <strong>le</strong>sbantoustans avec <strong>le</strong>s groupes de Vigilants quituent <strong>le</strong>s militants de l'UDF et d'autres groupesnon raciaux. Pretoria tire <strong>le</strong>s ficel<strong>le</strong>s: diviserpour régner.De 1984 à 1986 : 20 000 morts, 14000 casde vio<strong>le</strong>nce recencés, 23 000 maisons détruites(5) en Afrique <strong>du</strong> Sud. Une bonne partest à l'actif de ces chefs de bandes.Un des aspects <strong>le</strong>s plus inhumains de cette véritab<strong>le</strong>néocolonisation à usage interne estsans conteste celui des déportations massivesde population.« .. .4 169 000 habitants des bantoustans ontdéjà été déportés, et comme il est prévu de"développer" tous <strong>le</strong>s bantoustans sans exception,on peut penser que <strong>le</strong>s 2 834 000Africains qui <strong>le</strong>s occupent encore vont l'êtreéga<strong>le</strong>ment. Quelque incroyab<strong>le</strong> que cela puisseparaître, c'est donc au total 13,9 millionsd'Africains à peu près, qui pourraient êtrechassés de chez eux dans <strong>le</strong> cadre de la politiquede bantoustanisation <strong>du</strong> gouvernementsud-africain. Parmi ceux-ci, 6,27 millions environl'ont déjà été. Les 7, 7 millions qui restent,soit ont été déportés récemment, soitvont l'être dans l'avenir. Dans certains cas,vont être déplacés des gens qui l'ont déjà étéjusqu'à deux ou trois fois, <strong>du</strong>fait des aspectscontradictoires ou des changements dans laBAN TOUST.dNUne ouverture ...politique de bantoustanisation, ou <strong>du</strong>fait dela modification des frontières des bantoustans... » (6).On peut ainsi être Sud-Africain <strong>le</strong> dimancheet se réveil<strong>le</strong>r Bophuthatswanais immigré irrégulier<strong>le</strong> lundi !Des 3,2 millions d'Africains vivant dans <strong>le</strong>szones rura<strong>le</strong>s blanches en 1960, il ne restaitque 1,4 million de personnes en 1980. Aujourd'hui,65 fl/o de la main-d'œuvre sudafricainedépend officiel<strong>le</strong>ment d'un bantoustan.Intérêt supplémentaire pour <strong>le</strong> régime d'apartheid,l'indépendance de quatre bantoustansentre 1976 et 1981 a permis de faire passer laproportion de population blanche de 16 fl/o en1976 à 18,2 en 1981. En fait, aujourd'hui, el<strong>le</strong>ne représente que 14 fl/o de la population tota<strong>le</strong>d'Afrique <strong>du</strong> Sud.Certains rêvent d'une Afrique <strong>du</strong> Sud sansNoirs, sur 83 fl/o <strong>du</strong> territoire actuel.La situation dans <strong>le</strong>s bantoustans (7) est parail<strong>le</strong>urs dramatique. Ces Etats de complaisancen'ont aucune ressource pour la plupart. Ilétait même interdit, jusqu'en 1970, d'y instal<strong>le</strong>rune entreprise.DIITRIBUTIOH GEOGRAPHIQUE DES HOMELAHDS IH ... mb" 19111)1BOTS_ANA105".-oPAlUlJ,JICUU 'I(ltllACUIAINU1 _1 7,,01'"2 ..... belt 8 h.~3 f'IIUIw 9 v~ ....4s..Jto ... 0114 10 ~5 SmlIo.Sud 11 l~IM6S""IS~l tLe tiers de la population des bantoustans viten fait dans des camps de « réinstallation»aux conditions de vie et d'hygiène terrib<strong>le</strong>s etoù règne <strong>le</strong> désespoir (8).La litterature officiel<strong>le</strong> n'hésite pas à par<strong>le</strong>rde « surplus» et de « non-pro<strong>du</strong>ctifs ». Réser<strong>voir</strong>sde main-d'œuvre, <strong>le</strong>s bantoustanssont éga<strong>le</strong>ment des dépôtoirs pour êtres humains.Le taux de mortalité infanti<strong>le</strong> (50 fl/oavant deux ans) autorise même à par<strong>le</strong>r demouroir (9) dans certains cas.Une tel<strong>le</strong> situation n'est que la tra<strong>du</strong>ction économiquedes choix faits par Pretoria qui acantonné <strong>le</strong>s populations africaines dans <strong>le</strong>szones <strong>le</strong>s plus pauvres, sur des terres insuffisanteset <strong>le</strong> plus souvent arides.Les seu<strong>le</strong>s ressources sont ou des retours d'argentdes travail<strong>le</strong>urs dans <strong>le</strong>s entreprises extérieuresou des subsides directs de Pretoriaqui y consacre 9 fl/o de son budget (77 fl/o <strong>du</strong>budget tous <strong>le</strong>s bantoustans).Le Ciskei par exemp<strong>le</strong>, compte 35 fl/o de chômeurs,n'a pas de ressources agrico<strong>le</strong>s et sur493 millions de rands de budget, en reçoit 342millions de Prétoria.Le Bophuthatswana, pourtant <strong>le</strong> seul qui disposede ressources naturel<strong>le</strong>s importantes (mines),voit son plus gros investissement se résumerà Sun City, <strong>le</strong> plus grand lieu de plaisirafricain ou <strong>le</strong>s Sud-Africains blancs viennentjouer au casino, alimenter la prostitutionet se saou<strong>le</strong>r. Un bordel géant.Lieux de mort pour <strong>le</strong>s uns, de plaisirs pour<strong>le</strong>s autres, <strong>le</strong>s bantoustans qui abritent officiel<strong>le</strong>ment74 fl/o de la population sudafricainene contribuent que pour 3,5 fl/o auPNB.Mise sous contrô<strong>le</strong> de la population par desbandes armées, déportations massives, dénid'identité, entassement sur des territoires sansressources, surexploitation de la main-d'œuvre,cela rappel<strong>le</strong> quelque chose à nos mémoireseuropéennes.Et Vorster soulignait <strong>le</strong> trait lorsqu'il rappelaiten 1945 <strong>le</strong> cousinage de son régime aveccelui des fascistes italiens et des hitlériens.Les bantoustans sont des camps .•René François(/) Vorster, Premier ministre, Debates 14 avril /968.(2) En particulier, en /970, avec <strong>le</strong> Bantu Homeland CilizenshipA ct.(3) Les Pedis, rattachés de force au Lebowa ont, par exemp<strong>le</strong>,vu <strong>le</strong>s Pedis de Mountsee devenir sujets <strong>du</strong> K wandebe<strong>le</strong>.(4) The Star, journal sud-africain, 23 et 14 septembre/98/.(5) Conférence de l'/nstitut français des relations internationa<strong>le</strong>s,8 mars /988.(6) Barbara Rogers, Diviser pour régner, ed. Droit et Liberté,/978.(7) Aucun n'est reconnu comme Etat par un autre pays.(8) On verra, à ce sujet, <strong>le</strong> remarquab<strong>le</strong> film La ddernièretombe à Dimbaza.(9) Rand Daily Mail, journal sud-africain. 6 juin /984.23

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