d’Horace-Bénédict de Saussure, sont venus d’autres pays et continents à la poursuite de ce sport alpin, etparmi lesquels nombreux sont ceux qui y sont demeurés pour l’éternité.Ita Marguet►►►◄◄LES LIVRESLa Démocratie-Monde: Pour une autre gouvernance globalepar Pascal Lamy (Ed. du Seuil)Une citation de Jean Monnet choisie commeépigraphe résume le propos de l'auteur: "Lesnations souveraines du passé ne sont plus le cadreoù peuvent se résoudre les problèmes du présent.Et la Communauté (européenne n.d.l.r.) elle-mêmen'est qu'une étape vers les formes d'organisation dumonde de demain". Les problèmes évoqués parJ.Monnet étaient cependant d'une dimension moinsimpressionnante que ceux que rencontreaujourd'hui la communauté mondiale et auxquels laglobalisation donne un impact tel qu'ils pèsent déjàou pèseront demain sur notre vie quotidienne. Lacrise de l'énergie, les menaces sur l'environnement,la lutte contre les pandémies, l'instabilitééconomique et monétaire, les mouvementsmigratoires induits par la misère et le terrorismesont autant d'exemples que l'actualité nous rappellechaque jour.L'Etat classique, l'Etat-Nation, accroché à sasouveraineté, est contraint par ces problèmes decoopérer avec ses semblables. Il le fait depuis plusd'un siècle sous une forme organisée, sanstoutefois que la nature profonde des rapportsinternationaux ait fondamentalement changé. Cesrapports sont ceux d'entités égales en droits quidéfendent jalousement leur indépendance malgré lapression des réalités. L'efficacité de l'actioncommune des Etats demeure donc problématique,alors que l'opinion en attend des résultats concrets.L'organisation actuelle de l'action internationalen'assure pas non plus à ses agents, les grandesinstitutions couronnées par l'Organisation desNations Unies, une légitimité suffisante: que l'onsonge au Conseil de Sécurité, l'organe le pluspuissant du système, qui reste dominé par cinqpays vainqueurs dans un conflit terminé depuissoixante ans et qui maintient en position subalternedes pays comme l'Inde, le Brésil, l'Allemagne ou leJapon.Enfin, l'action internationale n'est pas assez lisiblepour l'opinion mondiale et ne nourrit pas un véritabledébat démocratique capable d'éclairer les acteurs.Il est donc nécessaire d'imaginer des formes depouvoir nouvelles qui permettraient de concilierefficacité, légitimité et lisibilité, autrement dit desformes véritablement démocratiques.Prenant comme terme de comparaison l'expériencede coopération internationale qu'il considère commela plus aboutie, malgré ses limites, à savoirl'édification de l'Union Européenne, l'auteur fixe desjalons pour tracer la voie vers ce qu'il appelle unedémocratie "alternationale". Parmi ces jalons, ildistingue des valeurs, des lieux, des acteurs, desmécanismes de gouvernance réelle et desprincipes.Pour construire une véritable communautéinternationale, nous avons besoin de valeurscommunes incarnées dans des préférencescollectives globales – au sens de mondiales,universelles comme on disait autrefois. La santé,par exemple, serait sans aucun doute l'une de cespréférences. Il faut ensuite définir pour chacunedes normes minimales qu'un effort persévérantrelèverait pas à pas. Enfin, il faut s'entendre sur desbiens collectifs mondiaux, socles concretsindispensables d'une gouvernance mondiale, définis21
par l'absence de rivalité dans leur consommation etla non-exclusion de consommateurs potentiels: laprotection de la couche d'ozone en est un bonexemple, mais on peut y ajouter notamment lesréserves internationales de pêche ou la pollution del'air.Les lieux où s'inscrit l'action internationale sont uneautre catégorie conceptuelle importante. La régionpeut être le cadre d'une première approche de ladémocratie alternationale car elle permet, plusfacilement qu'au plan mondial, d'identifier un espacede vie commun. Le plan où se situe cette actionpeut être défini par la notion de subsidiarité, quipermet de mener les politiques au niveau où l'on ena besoin et où elles peuvent avoir un effet, ce quileur assure la légitimité, conciliant proximitédémocratique avec le citoyen et efficacité. Enfin, ilfaut ce que l'auteur appelle des lieux de cohérencepour remédier au handicap résultant de l'isolementdes institutions, car deux organisations n'ont pasnécessairement des actions compatibles du seul faitque ce sont les mêmes Etats qui les animent. Quel'on songe par exemple à la question de lacohérence entre l'Organisation internationale duTravail et l'Organisation mondiale du Commerce.Une vraie communauté internationale n'émergeraque si l'on dispose d'un espace commun dereprésentation et de débat. Dans cet espace, il fautdes acteurs globaux: les grands sommetsinternationaux ne sont plus des lieux pour l'actionpolitique, ils sont surtout "le théâtre de négociationssubtiles, d'amendements ambigus sur des textespréparés des mois à l'avance, d'avancéesmillimétriques ou de reculs obscurs, enveloppésdans des formulations supposées permettre àchacun de rentrer victorieux chez lui". Lesparticipants défendent les intérêts de leursmandants mais ne sont pas des acteurs capablesde porter des questions globales. La scène doitdonc être élargie pour que les débats et les enjeuxsoient visibles de tous, pour qu'elle accueille desacteurs connus, des figures symboliques capablesde porter des enjeux politiques devant les citoyensdu monde. Sur cette scène, les objets de l'actionseront débattus et identifiés. On pourra également yprésenter les résultats obtenus, et pas seulementles résultats finaux, mais aussi les résultatsintermédiaires, afin que l'opinion puisse juger del'efficacité de l'action entreprise.Pour construire la démocratie comme principed'organisation des pouvoirs mondiaux, il faut définirdes majorités fonctionnelles qui, tout engarantissant la démocratie, assurent néanmoinsl'efficacité. Il faudrait également qu'un acteur neutrepuisse être doté d'une capacité d'initiative, afin desurmonter les effets paralysants de la méfiance quirègne entre les Etats. Dans chaque organisationdevrait exister un tiers de confiance qui proposeraitdes initiatives, dégagerait des compromis,suggérerait des solutions. Il faudrait de plus desmécanismes d'arbitrage des différends.Enfin, l'action alternationale démocratique doit êtresous-tendue par deux principes, et tout d'abord lasolidarité. En effet, pas de démocratie sanssolidarité. La mondialisation ne doit pas être unemachine de destruction de toutes les solidarités. Lapremière mondialisation, celle du 19 ème siècle et dudébut du 20 ème , a vu les gouvernants concilierouverture des échanges et solidarité: la premièreapportait la croissance, la deuxième assurait laredistribution qui réparait les effets négatifs de lapremière. Il faut persévérer dans cette voie. Quant àl'autre principe, la transparence, l'auteur y voitsurtout un moyen de permettre aux contre-pouvoirsde jouer leur rôle. Parmi ces contre-pouvoirs, lesreprésentants de la société civile devraient êtresystématiquement consultés.A nous, anciens fonctionnaires internationauxretournés à la société civile, ayant cependant gardétout notre intérêt et notre goût pour l'actioninternationale, cet ouvrage apporte le fruit d'uneanalyse nourrie de l'expérience de son auteur, à lafois homme politique et représentant de la hautefonction publique internationale. Ce livre dense peutfaire plus en nous indiquant les voies possibles denotre propre action en tant que citoyens et quemembres de cette communauté internationalequ'ambitionne de soutenir la Fédération desAssociations d'anciens Fonctionnairesinternationaux à laquelle appartient notre propreassociation. Il y faudrait un projet précis et concret,dont la définition gagnerait beaucoup à s'inspirerdes réflexions du Directeur général del'Organisation mondiale du Commerce.J.HanusEditions du Seuil, collection ‘’La République des idées’’, prix € 10.50►►►◄◄22