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Droit à l’eau et industries extractives : la responsabilité des multinationales<br />

où les changements successifs de propriétaires de la mine<br />

ont totalement effacé leur responsabilité quant aux impacts<br />

environnementaux de long terme, et où l’État se retrouve à<br />

devoir assumer les frais de la dépollution 4 .<br />

entre les usages de l’eau (puisqu’une partie de ces eaux usées<br />

étaient auparavant réutilisées pour l’irrigation) et de durabilité<br />

à long terme (si les eaux ainsi vendues aux firmes pétrolières<br />

ne sont pas retournées au milieu) 7 .<br />

Le problème concerne aussi toutes les mesures mises en<br />

place par les entreprises minières ou pétrolières pour assurer<br />

l’accès à l’eau potable des communautés riveraines de leurs<br />

exploitations : qu’adviendra-t-il lorsque ces firmes partiront<br />

et que les écosystèmes, eux, auront subi des dommages irréversibles<br />

? Dans la région de Cajamarca au Pérou, une mine<br />

exploitée depuis vingt ans a totalement détruit le système<br />

naturel d’approvisionnement en eau. Les milliers de mètres<br />

cube d’eau utilisés par la mine sont retraités par une station<br />

d’épuration avant d’être acheminés à Cajamarca. « Une fois<br />

la mine fermée, qui s’occupera de ce système artificiel ? », s’interroge<br />

un élu régional 5 . De<br />

même, au Chili, la mine de<br />

Cerro Colorado (propriété<br />

de BHP Billiton), suite à une<br />

décision de justice, s’est engagée<br />

à maintenir le niveau<br />

d’eau d’une lagune et d’une<br />

zone humide traditionnellement<br />

utilisées pour irriguer<br />

les cultures et abreuver les<br />

animaux par les indigènes Aymara. Ce qu’elle fait au moyen<br />

d’un système artificiel puisant directement dans une nappe<br />

souterraine. Mais lorsque la mine fermera, la lagune et la zone<br />

humide vont probablement à nouveau s’assécher 6 . Seule une<br />

véritable restauration environnementale – coûteuse et pas<br />

toujours possible – constitue une solution durable.<br />

Le marché du traitement des eaux usées<br />

des industries extractives constitue désormais<br />

l’une des cibles commerciales prioritaires<br />

des entreprises privées de l’eau.<br />

Au Chili, confrontées à la fois à des conflits environnementaux<br />

et à la précarisation croissante de leur approvisionnement<br />

en eau du fait du dérèglement climatique, les entreprises minières<br />

se tournent de plus en plus vers le dessalement 8 : « Le<br />

groupe BHP Billiton construit actuellement, au sud d’Antofagasta,<br />

la plus grande usine de dessalement d’eau de mer du continent<br />

– d’une capacité de traitement de 2 500 litres d’eau par seconde<br />

– pour alimenter l’une de ses mines d’extraction de cuivre.<br />

D’autres groupes, comme Antofagasta Minerals, ne dessalent<br />

qu’une petite partie (8 %) de l’eau de mer qu’ils utilisent, le sel ne<br />

nuisant pas à la plupart des procédés de traitement du cuivre.<br />

Selon les estimations de la<br />

commission chilienne sur le<br />

cuivre (Cochilco), ce procédé<br />

permettrait de stabiliser la<br />

demande en eau douce de<br />

l’industrie minière autour de<br />

550 millions de mètres cubes<br />

annuels à partir de 2016. »<br />

Le recours au dessalement<br />

pose néanmoins des problèmes<br />

environnementaux – notamment sa consommation<br />

énergétique et la pollution occasionnée par les déchets<br />

extrêmement salins séparés de l’eau. Ces problèmes, pour<br />

l’instant, ne pèsent pas lourd au Chili au regard des bénéfices<br />

environnementaux apportés par le dessalement, mais il n’en<br />

ira pas forcément éternellement ainsi, surtout si les usines<br />

de dessalement se multiplient.<br />

SOLUTIONS TECHNOLOGIQUES<br />

Pour remédier aux impacts de leurs activités, les multinationales<br />

minières ou pétrolières sont de plus en plus souvent<br />

amenées à mettre en avant des solutions technologiques,<br />

qu’il s’agisse d’assurer leur approvisionnement en eau (par<br />

exemple à travers les technologies de dessalement de l’eau<br />

de mer) ou de dépolluer leurs eaux usées.<br />

Au Texas, la réutilisation des eaux usées urbaines après traitement<br />

commence à se répandre. Certaines firmes de gaz<br />

de schiste achètent ainsi leurs eaux usées traitées à des<br />

municipalités de l’État. Mais l’application à grande échelle de<br />

cette solution pose encore des problèmes de concurrence<br />

4 Simon Gouin, « À Salsigne, un siècle d’extraction d’or, 10 000 ans de<br />

pollution ? », réf. citée.<br />

5 Simon Gouin, « Conga : quand l’or du Pérou attire de nouveaux conquistadors<br />

», réf. citée.<br />

6 Anne Le Bon, « Chili : quand l’industrie minière assoiffe les villages et<br />

pollue l’environnement », réf. citée.<br />

On rappellera que dans le cadre de son projet abandonné de<br />

mine d’uranium en Namibie, Areva a également fait construire<br />

une usine de dessalement, qui vend aujourd’hui de l’eau à des<br />

municipalités et à d’autres entreprises minières. Le groupe<br />

français souhaite désormais céder son usine au gouvernement<br />

namibien, mais les négociations achoppent sur le prix<br />

de revente.<br />

Le marché du traitement des eaux usées des industries extractives<br />

constitue désormais l’une des cibles commerciales<br />

prioritaires des entreprises privées de l’eau. Veolia, en particulier,<br />

s’est engagée dans des projets importants conçus comme<br />

des « vitrines » de son savoir-faire. Au Canada, elle a passé<br />

contrat avec Shell pour construire une usine de production<br />

7 Anna Driver, « In downturn, frackers turn to toilet water in droughtprone<br />

Texas », Reuters, 21 août 2015, http://www.reuters.com/article/<br />

us-pioneer-natl-rsc-fracking-water-idUSKCN0QQ0CA20150821.<br />

8 Anne Le Bon, « Chili : quand l’industrie minière assoiffe les villages et<br />

pollue l’environnement », réf. citée.<br />

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