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The Red Bulletin Juin 2019

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« Les danseurs bénéficient<br />

même des neurosciences<br />

et de la psychologie. »<br />

cune d’entre elles. Leur programme de répétition<br />

est tellement chargé que même le fait de manger<br />

correctement représente un enjeu de taille pour<br />

les danseurs. « Il nous arrive d’avoir seulement<br />

quinze minutes de pause avant de nous y<br />

remettre, donc pour ne pas se sentir trop lourds,<br />

on évite les plats de pommes de terre », explique<br />

Claire Calvert. Elle se rappelle ce nutritionniste<br />

qui était si inquiet quand il est venu visiter la<br />

compagnie dans les jours précédant l’ouverture<br />

du service de santé : « Quand il a vu comment ça<br />

se passait, il nous a dit : “Si j’étais vous, j’aurais<br />

toujours des encas avec moi et je me contenterais<br />

d’un gros repas le dimanche.” Il ne savait tout<br />

simplement pas quoi nous dire d’autre. »<br />

Désormais, ils suivent des régimes alimentaires<br />

intelligents et spécifiques à la danse établis<br />

par la nutritionniste du Royal Ballet, Jacqueline<br />

Birtwisle. Pour avoir de l’énergie, les danseurs<br />

consomment des aliments faciles à digérer<br />

comme du porridge, des œufs brouillés, du<br />

risotto, du houmous, de la salade, du yaourt à la<br />

grecque, des baked beans ou des Buddha Bowls<br />

(repas végétariens complets dans un bol). Ils<br />

mangent des poissons gras riches en oméga-3<br />

(saumon, maquereaux, anchois, sardines et<br />

harengs) pour optimiser la récupération musculaire<br />

et préfèrent l’huile d’olive, pour ses vertus<br />

anti-inflammatoires, à l’huile de tournesol. Après<br />

une représentation tard dans la soirée, un repas<br />

lourd peut être difficile à digérer, ils optent alors<br />

pour des smoothies à base de purée d’oléagineux<br />

pour réparer les muscles. Et comme ils passent<br />

beaucoup de temps à l’intérieur, ils prennent<br />

aussi de la vitamine D, d’autant plus qu’il a été<br />

prouvé qu’elle augmentait de 18,7 % la force isométrique<br />

des danseurs – celle qui est renforcée<br />

par des exercices « statiques » comme le gainage.<br />

Bien entendu, on ne peut pas convaincre<br />

tous les danseurs d’adopter cette nouvelle<br />

dynamique et certains ont toujours<br />

des réticences par rapport à son<br />

approche scientifique. « Il y a toujours une certaine<br />

scission, mais elle n’est plus aussi marquée<br />

qu’avant, admet Retter. Tout d’abord parce que<br />

nous avons des danseurs qui passent par la Royal<br />

Ballet School et qui apprennent désormais en<br />

quoi leurs capacités physiques peuvent les aider.<br />

Et ensuite parce que maintenant, nous avons ces<br />

“champions” au top qui réalisent que cet apport<br />

scientifique ne les détourne pas de leur expression<br />

artistique, mais l’améliore au contraire. »<br />

FOCUS<br />

Matthew Ball<br />

En mars dernier, Matthew<br />

Ball reçoit un appel du<br />

directeur du Royal Ballet :<br />

le danseur étoile David<br />

Hallberg s’est blessé au<br />

mollet en interprétant le<br />

rôle principal d’Albrecht<br />

dans Giselle. Lui, qui n’a<br />

interprété ce rôle qu’une<br />

seule fois, doit le remplacer.<br />

« Quand on n’a pas<br />

d’autre choix, on s’en<br />

remet à sa routine. J’étais<br />

moins stressé qu’avant<br />

d’autres représentations. »<br />

Devenu danseur étoile<br />

depuis, Matthew a développé<br />

des stratégies pour<br />

rester concentré sur<br />

scène. « En donnant un<br />

signal au cerveau pour<br />

qu’il se concentre sur<br />

quelque chose de facile à<br />

identifier. Si mes émotions<br />

prennent le dessus, si ma<br />

fréquence cardiaque s’affole,<br />

je pose ma main sur<br />

mon cœur pour concentrer<br />

tous mes efforts dessus. »<br />

La science ne remplacera jamais le talent nécessaire<br />

pour créer de la beauté artistique sur scène.<br />

Et si le rôle principal d’un danseur est de transcender<br />

les limites de son corps afin de susciter<br />

une émotion chez son public – faisant ainsi passer<br />

le sport au rang d’art –, la science a un rôle de<br />

soutien essentiel à jouer. « Quand on participe à<br />

une course, on court tout simplement, dit Claire<br />

Calvert. Nous, on doit se mouvoir avec grâce, être<br />

élégants, sourire et créer une réaction émotionnelle,<br />

même si à la fin, on n’en peut littéralement<br />

plus. Faire des squats, ce n’est pas cela qui m’aidera<br />

à faire 32 fouettés, il faudra quand même<br />

que je m’exerce à effectuer les pas. Mais je suis<br />

désormais armée d’une force et d’une confiance<br />

qui me permettent d’être plus présente dans ma<br />

performance, je peux donc mieux me concentrer<br />

sur l’histoire ou le personnage. »<br />

Ce sentiment est peut-être bien la pierre<br />

angulaire de toute cette révolution dans le ballet.<br />

Les danseurs doivent exécuter des chorégraphies<br />

précises et soumises à un contrôle rigoureux,<br />

mais d’une certaine manière, ils peuvent exprimer<br />

leur personnalité dans le cadre de cette performance.<br />

« C’est quand on a confiance que l’on<br />

laisse transparaître notre joie naturelle dans nos<br />

performances », explique Claire Calvert.<br />

En associant les valeurs traditionnelles du ballet<br />

que sont la discipline et la persévérance aux<br />

idées nouvelles de la science, les danseurs créent<br />

un équilibre parfait – sur scène et en dehors. « La<br />

transition est déjà en marche, déclare Gemma<br />

Pitchley-Gale. On est en plein dedans. »<br />

THE RED BULLETIN 73

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