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Ineffable Magazine n°11

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La mer ramènera d’autres envahisseurs tels que

les Vandales. Quant aux Arabes, ils arrivèrent par

le désert, depuis Damas, Sinaï, Egypte, jusqu’au

cœur du Touat saharien. Comment résistèrent-ils?

Tout comme les commerçants chinois traversant

le désert de Gobi, grâce à une plante, née dans les

steppes chinoises de moyenne altitude, utilisée

(encore aujourd’hui) pour combattre le syndrome

de chaleur toxique. Les Arabes, maîtres de la

distillation, en tirèrent un colorant bleu résistant

au soleil, comme le précieux bleu pharaonique (à

base de lapis-lazzuli), et de surcroît médicinal.

Dans le désert du Touat, ils apprirent aux Touareg

à cultiver le pastel (en français), anyil de Jerusalem

(en espagnol), isiatis tinctorial (terminologie

scientifique), puis à teindre des habits médicinaux

les protégeant du soleil, par lesquels ils sont

encore connus comme Hommes Bleus (même

si depuis, l’indigo, non médicinal, a remplacé le

pastel).

Les Arabes sont venus par petits groupes,

amenant techniques et organisations nouvelles.

Néanmoins, ce ne fut pas une immigration massive.

Ils amenaient de nouvelles techniques, notamment

d’irrigation, de distillation et de colorants, ce qui

permit à Alger de s’enrichir, grâce au Kermès

(cochenille donnant un rouge vif, devenu couleur

royale espagnole) et au pastel (plante venue des

contreforts des Himalaya donnant une couleur

bleue résistante au soleil - couleur royale de

France).

L’innovation du système décimal, ainsi que l’Islam,

révolutionnèrent la société. Mais, attachés au

nomadisme, ils se mêlèrent peu aux populations

locales et aujourd’hui, ils ne représentent que 1%

au plus de la population algérienne. La boussole

et l’art de la cartographie, ainsi que les judicieuses

inventions de Vitruve, comme le bateau

démontable, assurèrent la domination musulmane

en mer.

Pendant ce temps, l’Andalousie souffrait, alors

que les catholiques violaient tous les accords

de cohabitation entre les diverses religions

espagnoles. Les convertis, puis descendants

de convertis y étaient à présent vus comme

« anciens mécréants » et virent leurs droits se

réduire à peau de chagrin, leurs boutiques ou

ateliers pillés, leurs enfants brûlés vif. On les

força à les convertir en leur donnant un nouveau

nom aux accents porcins (Cerda, Grassa, Porcell,

etc.), sachant ce que représentait le porc pour

juifs et musulmans, les mettant ainsi à l’opprobre

de leur propre communauté, comme vis-àvis

des chrétiens. Puis, commença la dictature

de l’assiette (ceux qui refusaient de manger du

homard pouvaient finir brûlés vifs), l’espionnage

des voisins (récompensés lorsqu’un converti était

pris retournant à la religion de ses ancêtres),

les tortures arbitraires et les interrogatoires

inhumains. Le monde musulman de l’autre côté

de la Méditerranée leur apparut alors comme leur

seule planche de salut. L’immigration andalouse se

fit massive depuis l’Espagne vers Alger, ainsi que

depuis le Sud de l’Italie, la Sardaigne et la Sicile,

où sévissaient des Inquisiteurs particulièrement

effroyables (tel l’archevêque qui terrorisa Palerme,

Diego de Haedo).

L’Espagne se désertifia donc de tous ses artisans,

commerçants et scientifiques, lesquels fuyaient

l’horreur catholique sur de petites barques vers

Alger. L’Espagne tenta d’enrayer cette fuite de

cerveaux en interdisant l’embarquement vers

l’Afrique depuis ses ports, ce qui provoqua l’afflux

massif des convertis espagnols vers les ports

français, notamment Marseille, les plus riches

versant des bourses afin que les plus pauvres

puissent embarquer aussi. De véritables banques

solidaires se sont créées, afin de fuir l’horreur de

l’Inquisition espagnole.

Marcus Vitruvius Pollio - babelio.com

Novembre • Décembre • Janvier 2019/20 - ineffable

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