Ineffable Magazine n°11
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1. Entre mort et traditions :
Quand l’ange de la mort vient happer les âmes
des vivants, une vague de froid s’installe dans
toute l’atmosphère qui entoure la dépouille
fraîchement cueillie, les personnes prennent du
temps pour s’en rendre compte et faire face à la
réalité douloureuse. C’est là que les traditions de
nos ancêtres font leur entrée pour atténuer ce
chagrin qui creuse un abîme profond où plusieurs
sentiments se jettent et s’affrontent : amour,
manque, regrets, haine, plaintes et lamentations.
Citer les traditions appelle obligatoirement à citer
la religion, nos aïeux étaient à cheval sur le bon
déroulement de la veillée en restant très pointilleux
sur l’application correcte des croyances.
Quand le corps gît dans la demeure, les premiers
gestes fait par les proches sont ceux de fermer les
yeux et la bouche et recouvrir le défunt d’un drap.
La suite est connue, on annonce la nouvelle aux
proches et aux gens du village tout en prévenant
la mosquée pour organiser la prière qui se fera le
jour-même (pour certains) ou le lendemain (pour
d’autres).
L’apport d’une aide aux proches du défunt est
une action importante dans nos traditions (aides
dans les tâches ménagères, cuisine, etc.) c’est
non seulement prouver que l’on est là pour la
famille, mais c’est aussi faire un dernier geste
symbolique à l’égard de l’être aimé qui nous quitte
soudainement. L’un de ces gestes, est celui du
lavage mortuaire. Ce dernier peut être fait par un
membre de la famille qui y tient réellement ou par
un membre extérieur. C’est une tâche délicate
qui demande beaucoup de courage aux proches,
et beaucoup d’attention aux inconnus.
La prière est faite à la mosquée ou au cimetière,
cette oraison est de courte durée contrairement
à celles qui sont faites habituellement.
En Algérie, il n’y a que les hommes qui assistent
aux funérailles, les femmes quant à elles doivent
attendre le lendemain ou les jours qui viennent
pour s’y rendre. Leur absence est justifiée par
le fait que la femme est sensible et délicate. Par
conséquent, elle ne peut guère maîtriser sa peine
et son chagrin.
Les traditions n’ont pas fini de confesser tous
leurs secrets, on continue à rendre hommage
à l’être qui nous a quitté durant des jours bien
précis comme le troisième et le quarantième
jour. Le troisième jour suivant l’enterrement, les
proches préparent à manger et se présentent
au cimetière pour placer l’épitaphe. Lors du
quarantième jour, c’est El Wa3da, on prépare à
manger, et on invite tous les passants à prendre
place dans une sorte d’offrande censée aider le
mort dans l’au-delà. Et puis il y a le moment où
l’on dépose une partie des offrandes sur la tombe,
pour que les visiteurs du cimetière en bénéficient
également en guise de bienfaisance. C’est là une
sorte de Sadaqa au nom du défunt. Le choix de
ces deux jours en particulier n’est pas fortuit, dans
la tradition kabyle par exemple une croyance dit
que l’âme du défunt erre autour de la maison
durant la troisième nuit, puis demeurera dans la
tombe jusqu’au quarantième jour.
Nous venons de passer en revue les traditions les
plus répandues dans notre pays, bien que parfois
quelques divergences sont à noter d’une region
à une autre. Et pour sauvegarder toutes ces
traditions et tous ces rites, la littérature dans sa
grandeur fait son entrée en offrant un travail de
sauvegarde qui traverse les temps.
Alger, vendredi au cimetière d'El-Keittar
Novembre • Décembre • Janvier 2019/20 - ineffable
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