Extrait Mémento Sociétés Civiles 21 - Editions Francis Lefebvre
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© Éd. <strong>Francis</strong> <strong>Lefebvre</strong> DÉMEMBREMENT DE PROPRIÉTÉ<br />
Parce qu’il doit en conserver la substance, l’usufruitier n’a pas le droit de vendre la chose sur<br />
laquelle porte son usufruit. Cette règle supporte toutefois deux exceptions.<br />
La première est spécifique au portefeuille de valeurs mobilières : voir n os 62340 s.<br />
La seconde concerne le quasi-usufruit. Il y a quasi-usufruit lorsque l’usufruit porte sur une chose<br />
consomptible, c’est-à-dire sur un bien qui est consommé par son premier usage (l’argent, par<br />
exemple). Le droit à la jouissance passe alors par le droit de disposer du bien : le quasi-usufruitier<br />
est libre d’utiliser ce bien comme il le souhaite dans la limite des dispositions des articles 601 et 602<br />
du Code civil (obligation de fournir caution, dont le défaut oblige à l’emploi du bien, sauf dispense<br />
dans l’acte constitutif de l’usufruit : voir n o 62038). Vis-à-vis du nu-propriétaire, le quasi-usufruitier<br />
devient débiteur d’un bien semblable ou de sa valeur en argent estimée à la date de restitution<br />
(C. civ. art. 587). Le nu-propriétaire n’a plus un droit direct sur la chose mais un simple droit de<br />
créance sur le quasi-usufruitier.<br />
> Précisions Le quasi-usufruit institué par<br />
la loi concerne les biens consomptibles par<br />
nature. L’extension conventionnelle du quasiusufruit<br />
à des biens non consomptibles tels<br />
que des parts de sociétés a été développée par<br />
la pratique avec l’aval d’une partie de la doctrine<br />
(M. Grimaldi et Roux, La donation de valeurs mobilières<br />
avec réserve de quasi-usufruit : Defrénois 1994<br />
Usufruit, droit réel<br />
art. 35677 p. 3 ; M. Grimaldi, L’usufruit et le quasiusufruit,<br />
questions de droit civil : Droit et patrimoine<br />
novembre 1999 p. 55 ; L. Aynes sous Cass. 1 e civ.<br />
12-11-1998 n o 1673 : D. 1999 p. 167), certains<br />
auteurs étant plus réservés (R. Libchaber, Le portefeuille<br />
de valeurs mobilières : bien unique ou pluralité de<br />
biens ? : Defrénois 1997 art. 36464 p. 65).<br />
L’usufruitier dispose d’un droit réel, c’est-à-dire d’un droit direct et<br />
immédiat sur la chose. Il est dans une situation radicalement différente de celle du locataire, qui n’a<br />
qu’un droit personnel contre le bailleur.<br />
Le droit réel de l’usufruitier a une nature mobilière s’il s’applique à un meuble (notamment à des<br />
droits sociaux), immobilière lorsqu’il porte sur un bien immobilier. L’opération donnant naissance à<br />
l’usufruit immobilier doit être publiée au fichier immobilier, pour être opposable aux tiers ou pour<br />
leur information selon les cas (Décret 55-22 du 4-1-1955 art. 28, 1 o et 3 o ). Elle doit donc être constatée<br />
par acte authentique notarié, juridictionnel ou administratif (C. civ. art. 710-1). L’usufruit immobilier<br />
peut être hypothéqué (C. civ. art. 2397).<br />
L’usufruitier peut en principe librement céder son droit à un tiers. Cependant, l’usufruit étant<br />
attaché à la personne de l’usufruitier, la durée de l’usufruit en cas de cession d’un usufruit préconstitué<br />
sera en tout état de cause limitée à la vie du cédant. Par exemple, si X, usufruitier de droits<br />
sociaux, vend à Y son usufruit viager, le décès de X mettra fin à l’usufruit détenu par Y.<br />
Usufruit, droit temporaire L’usufruit est nécessairement constitué pour une durée limitée.<br />
Pour les personnes physiques, la durée maximale de l’usufruit est la durée de vie de l’usufruitier :<br />
c’est l’usufruit viager.<br />
L’usufruit peut être constitué pour un terme fixe (dix ans, par exemple) mais si l’usufruitier décède<br />
avant l’arrivée du terme, l’usufruit prendra fin dès la date du décès (Cass. ch. réunies 16-6-1933 : DH<br />
1933 p. 393).<br />
Si le terme est fixé en fonction de l’âge d’un tiers, le décès avant terme de ce tiers permet quand<br />
même à l’usufruit de perdurer jusqu’au jour où ce tiers aurait atteint l’âge prévu, à condition que<br />
l’usufruitier soit lui-même toujours en vie (C. civ. art. 620).<br />
La durée de l’usufruit accordé à une personne morale ne peut pas être supérieure à trente ans<br />
(C. civ. art. 619). La Cour de cassation a précisé que cette règle est d’ordre public : il ne peut pas y<br />
être dérogé par convention (Cass. 3 e civ. 7-3-2007 n o 06-12.568 : RJDA 7/07 n o 793). Dans un arrêt isolé,<br />
une cour d’appel a cependant estimé que la limite de trente ans n’est applicable qu’à un usufruit<br />
transmis ou cédé et a jugé qu’une personne morale titulaire d’un droit de propriété peut donc, en<br />
cas de cession de la nue-propriété de ce bien, se réserver un usufruit pour une durée supérieure (CA<br />
Caen 24-1-1995 n o 93-2503 : BRDA 19/95 p. 6 ; F.-D. Poitrinal, L’usufruit réservé par une personne morale : Dr. et<br />
Patrimoine 1996 p. 46, Defrénois 1996 I p. 392, obs. C. Atias, JCP G 1995 IV 1360). Cet arrêt (non frappé de<br />
pourvoi) a été critiqué par la doctrine (C. Atias, Defrénois 1996 I p. 393), car les travaux préparatoires<br />
du Code civil indiquent très clairement que le législateur a entendu limiter dans tous les cas la<br />
durée de l’usufruit permise à une personne morale.<br />
Une autre cour d’appel a par ailleurs jugé que si l’article 619 du Code civil prévoit que l’usufruit<br />
accordé à une personne morale ne dure que trente ans, de sorte qu’il n’existe pas en principe de<br />
transmission à titre définitif de l’usufruit à l’égard d’une personne morale, il en va autrement<br />
lorsque la personne morale se trouve déjà titulaire du droit de nue-propriété, dès lors que l’acquisition<br />
des droits d’usufruit lui confère alors la pleine propriété du bien, de sorte que le droit d’usu-<br />
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