« Chaque étape m’a permis d’affûter mon regard en vue de solutions. » Vous vous êtes entraînée avec Barbara Zangerl, l’une des meilleures grimpeuses au monde. Comment l’avez-vous rencontrée ? J’ai fait la connaissance de sa sœur, Claudia, sur un rocher. On fait donc des rencontres pendant les ascensions… Oui, tout comme on en fait en ski, sur la montagne. Nous nous sommes alors retrouvées pour faire du bloc en salle. Et puis Babsi m’a dit : « Viens demain matin à sept heures pour t’entraîner », et j’y suis allée. Ensuite, c’est allé très vite. J’ai très rapidement sauté quelques degrés de difficulté. Comment cela se fait-il ? Je ne sais pas, j’étais motivée. Je m’entraînais tous les jours avec Babsi. Nous étions à fond. En échange, je l’ai emmenée skier. Dans les années qui ont suivi, Nadine Wallner a gravi des parcours de plus en plus difficiles. Ceux-ci peuvent également représenter des chapitres individuels de la vie de l’athlète. Ils portent les noms de Paradigme, Border Crosser ou Euphoria et marquent une évolution qui étonne même ses collègues grimpeurs. DÉTENDUE Nadine Wallner ne lâche jamais la corde. Maîtriser aussi rapidement des parcours si complexes témoigne d’un talent unique et d’une volonté incomparable. En 2019, Nadine est devenue la deuxième femme à vaincre le Prinzip Hoffnung, le Principe Espérance sur le mur appelé Bürser Platte (dans le district de Bludenz dans le Vorarlberg), qui est considéré comme l’un des parcours traditionnels les plus difficiles d’Europe (8b/8b+ E9-E10). La paroi est lisse, les endroits précis où les grimpeurs peuvent mettre le pied sur cette roche glissante restent un mystère pour le commun des mortels. Nadine Wallner a décrit son exploit comme étant un précieux processus d’apprentissage. Chaque étape a aiguisé sa perception de grimpeuse, élargi son répertoire de mouvements et affûté son regard en vue de solutions. Mais le rythme auquel Nadine Wallner évolue lui a, à nouveau, causé des ennuis. Elle s’est blessée au majeur de la main droite. Que s’est-il passé ? J’avais trop d’énergie, les tendons n’ont pas suivi. Il leur faut plus de temps pour s’habituer à l’effort. C’est après le Prinzip Hoffnung que les problèmes ont commencé. J’ai longuement hésité, puis j’ai décidé de me faire opérer à l’automne 2019. Suite à cela, j’ai fait une pause, et ce n’est qu’au printemps suivant que j’ai repris l’escalade et, punchline ultime, le parcours s’appelle Touch the Future... La rate, le pied, maintenant le doigt… Avec toutes ces blessures, n’avez-vous jamais songé à abandonner ? Non, le ski vaut bien mieux que ça, l’escalade vaut bien mieux que ça, et la montagne aussi. Quand nous sommes descendus en rappel hier, il faisait déjà nuit. En hiver, je reste souvent sur la montagne jusqu’au dernier moment, je ne veux pas rentrer chez moi, il fait si bon là-haut. J’aimerais y rester. Qu’est-ce qui vous plaît le plus ? Monter ou descendre, escalader ou skier ? Difficile à dire. J’aime le ski parce que c’est relax, parce que c’est facile, et que cela va presque tout seul. Dans l’escalade, il faut faire un gros effort brutal. Mais quand ça va, c’est vachement bon. Instagram : @nadinewallner 64 THE RED BULLETIN
DÉTERMINÉE Comme aux échecs, un bon grimpeur anticipe plusieurs coups d’avance. PHILIP PLATZER/RED BULL CONTENT POOL THE RED BULLETIN 65