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360° magazine / avril 2022

Numéro 212 | FETISH

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l’un des éléments qui me renvoyait à mon altérité,<br />

et on m’a longtemps signifié qu’il fallait que je<br />

ressemble à une norme très contraignante, allant<br />

totalement à l’encontre de ma nature. » Pour celle<br />

qui est maintenant à la tête de deux enseignes, le<br />

métier de coiffeur·euse·x souffre avant tout d’un<br />

manque de valorisation, avec un salaire de base<br />

qui n’atteint pas 4000 CHF par mois.<br />

Sur l’arc lémanique, les salons mixtes<br />

proposant des tarifs non-genrés se<br />

comptent sur les doigts d’une main. Pour<br />

Olga Baranova, directrice de campagne<br />

pour le Mariage pour touxtes, c’est toutefois<br />

la taxe rose de manière plus générale<br />

qu’il convient de dénoncer : « Les gens<br />

réagissent souvent de manière épidermique,<br />

lorsque l’on évoque cet enjeu. Ils<br />

se sentent attaqués dans leur masculinité<br />

ou leur féminité, alors que nous serions<br />

tous·tes·x gagnant·e·x·s, si cela était remis<br />

en question. »<br />

ZHENYA G., FEMME TRANS*, COIFFEUSE CHEZ<br />

TRIBUS URBAINES<br />

La coiffure, que l’on associe volontiers au domaine<br />

de la mode et au milieu artistique, n’est pas un<br />

domaine aussi inclusif qu’il n’y paraît. Ce n’est<br />

en tous cas pas l’expérience que Zhenya en a fait.<br />

« Avant d’arriver chez Tribus Urbaines,<br />

j’étais employée dans un salon pour<br />

hommes, et la patronne ne souhaitait<br />

avoir que des employés hommes. Je ne<br />

pouvais donc pas être moi-même, se<br />

souvient la trentenaire. C’était très pénible,<br />

mais il fallait que je travaille. J’ai<br />

finalement révélé ma transidentité à<br />

des collègues, qui n’ont pas été surpris.<br />

Malheureusement, quand c’est arrivé<br />

aux oreilles de la patronne, elle m’a licenciée…<br />

» Souhaitant aller de l’avant, Zhenya<br />

ne conteste pas le licenciement.<br />

Lorsqu’elle postule dans le salon de Sylvie Makela,<br />

la jeune femme ne cache pas sa transidentité. Son<br />

pressentiment d’être enfin arrivée au bon endroit<br />

ne la trompe pas, et le salon de la rue de La<br />

Madeleine lui ouvre grand ses portes.<br />

« Que Tribus Urbaines me donne une place<br />

au sein de sa famille, c’était énorme, pour<br />

moi. J’ai pu reprendre confiance après<br />

m’être si longtemps sentie exclue. » Être<br />

confrontée à des femmes très différentes<br />

les unes des autres, qui la perçoivent<br />

comme n’importe quelle femme, et se<br />

sentir à l’aise, l’Algérienne d’origine l’apprécie<br />

chaque matin en arrivant au travail<br />

: « Dans ce lieu vraiment inclusif, et<br />

totalement safe, je ne suis pas mégenrée<br />

et j’ai même eu des client·e·x·s trans*, qui<br />

étaient ravi·e·x·s de me rencontrer. »<br />

Tribus Urbaines a également ouvert un salon a<br />

Genève, où réside Zhenya. Elle préfère toutefois<br />

éviter de travailler dans ce quartier animé, où elle<br />

s’est souvent faite agressée. « En plus, je ne souhaite<br />

pas être en vitrine. Ici à Lausanne, le salon<br />

est à l’étage, et je m’y sens bien. » Les agressions,<br />

la lumineuse Zhenya continue cependant d’en subir,<br />

dans les gares et les trains. « C’est dur, d’être<br />

constamment associée à des activités qualifiées<br />

de douteuses, insultée… En plus, être travailleuse<br />

du sexe, je ne pense pas que ce soit forcément<br />

douteux, c’est certainement plus éthique que de<br />

travailler dans une multinationale, mais ce n’est<br />

pas moi ! »<br />

* nom connu de la rédaction<br />

22 SOCIÉTÉ INCLUSION

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