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Le Chevalier - N°62

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MARTIGNY LA VITICOLE

La relation qu’entretient la ville du coude du Rhône avec l’univers du vin remonte à

bien au-delà des Romains. De récentes avancées archéologiques le confirment.

Il y a deux ans, des fouilles menées à Popovac, en Croatie, ont donné

lieu à la découverte d’une inscription datant du II e siècle après J.-C.. Il

y est fait mention que le vin valaisan était déjà consommé (et surtout

apprécié) par les Romains à cette époque. Des efforts soutenus ont été

nécessaires afin de déchiffrer ces éléments peu lisibles sur la stèle qui

leur sert de support. On y a récolté les informations suivantes: «Aurelius

Constantius a greffé, sur la demande pressante de Venantius son

fils, 400 arpents de vignes dont des cépages du Valais.»

Cette inscription est naturellement loin d’être anodine. Elle est estimée

dater de 280 après Jésus-Christ. Tirant les enseignements de leur

investigation, les historiens en ont déduit que l’élevage du vin était une

pratique maîtrisée par les Valaisans depuis en fait déjà des décennies,

voire même des siècles plus tôt.

Tout n’est pas clair

La Société d’histoire du Valais romand (SHVR) a confirmé en 2019 que

la découverte croate prouvait que la vigne s’était bel et bien développée

sous l’Empire romain dans notre canton. Pour autant, le groupement

d’historiens a replacé cette avancée sur une échelle plus étendue:

«Tout ce qui précède l’an 1052 et la première mention écrite d’une

vigne en Valais n’est que mystère et hypothèse. On avait bien fait état

de traces de pollens de vignes, recensé de nombreux grains de raisin à

Gamsen ou exhumé plusieurs serpettes notamment à Martigny, mais

rien qui ne témoignait avec certitude d’une culture de la vigne et de

la production de vin au début de notre ère. Pour les serpettes, le lien

entre l’objet et son usage n’est par exemple pas toujours évident».

De fait, des analyses de sédiments du lac avaient permis de trouver

des grains de pollen de vigne antérieurs à 5000 ans avant J.-C. Il n’a

toutefois pas été possible aux scientifiques d’opérer une distinction

viable entre la vigne sauvage (vitis sylvestris) et la vigne cultivée (vitis

vinifera). Grâce au recoupement de ces études historiques et archéologiques,

les experts avaient conclu que les plus vieux cépages connus

en Valais, tels que le Cornalin, la Rèze et l’Arvine, ne remontaient peutêtre

pas aussi loin.

Si l’on se concentre à nouveau sur la seule Antiquité, les amphores qui

avaient été notamment découvertes à Martigny avaient en revanche

confirmé l’hypothèse selon laquelle l’élite du Valais pœnin ne dédaignait

pas non plus la consommation de vins étrangers, arrivant de

Rhodes ou de Palestine.

Archéologues peu soutenus

Du point de vue du déroulement de ces recherches, force est de

constater que, dans le Vieux-Pays, les relations entre vignerons et

archéologues n’ont pas toujours été cordiales. C’est en effet au fil des

défoncements des vignes que la plus grande partie du patrimoine

archéologique trouvé sur l’adret valaisan a été mise au jour.

Le recensement des découvertes effectuées lors de ces travaux viticoles,

principalement vers la fin du XIXe siècle, a amené des informations

qui peuvent être surprenantes. Une centaine de mentions de

vestiges archéologiques liés au vignoble sur la rive droite du Rhône

entre Fully et Rarogne ont été répertoriées. Parfois, ce sont des cimetières

entiers qui auraient été démantelés.

Hormis les rares vestiges végétaux mentionnés plus tôt, la production

viticole n’a, pour sa part, guère été attestée en Valais par l’archéologie.

Ainsi, on n’a pas, pour l’instant, retrouvé d’infrastructures telles que

des pressoirs, des cuves, des caves ou des tonneaux. En raison

de la découverte de petits gobelets,

placés dans les tombes, on peut se demander

si le vin ne se consommait pas

pur (et non pas coupé d’eau, comme dans

l’Antiquité classique). On retrouve en effet

ces mêmes petits gobelets dans le Haut-Valais,

particulièrement dans le secteur de

Gamsen, au pied du Simplon, une

région fortement influencée par

l’Italie.

Cruche en bronze

provenant de Martigny,

époque romaine

Amphores vinaires

provenant de Massongex et

Martigny. 1 er -4 e siècle apr. J.-C.

Sommaire

photos de couverture et du spectacle

p. 6 : Yvan Lastes

- autres photos du Chevalier : Fabienne

Bruttin

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