DESSINS
Parmi les dessins animés diffusés sur les chaînes de télévision publique, le choix est vaste. Certaines séries d’animation se démarquent toutefois par leur volonté de ne pas véhiculer de stéréotypes de genre et d’aborder des thèmes multiples, à hauteur d’enfant. Par Line Golestani Selon l’Étude longitudinale française depuis l’enfance, les enfants âgés de 3 à 5 ans passent en moyenne 1h30 par jour devant un écran, télévision en tête. Durant cette heure et demie passée devant la TV, ce sont principalement les dessins animés que regardent les enfants. Si l’on note dans ceux-ci une nette amélioration dans la répartition des rôles fille/garçon, les personnages explicitement masculins sont encore majoritaires. Les stéréotypes de genre, s’ils semblent également se faire plus discrets, restent cependant présents dans énormément de séries d’animation. Alors que bannir totalement les écrans reste un vœu pieux pour beaucoup de parents, s’assurer que les dessins animés devant lesquels nos chérubins passent une partie de leur temps ne renforcent pas chez eux les stéréotypes de genre est plus que souhaitable. Les séries ont par ailleurs tout à gagner à mettre en avant une figure à laquelle les enfants de tous genres peuvent s’identifier. Les chefs d’œuvre d’animation de l’allemand Max Lang (Le Gruffalo, Monsieur Bout-de-Bois, Zébulon le Dragon, La baleine et l’escargote), adaptés des livres de la Britannique Julia Donaldson, prouvent qu’un dessin animé peut captiver les enfants dès 4 ans (et leurs parents) avec des histoires originales, drôles et poétiques, qui font la peau aux stéréotypes de genre. Ces films d’animation font toutefois entre 25 et 45 minutes et c’est devant des séries d’animation aux épisodes bien plus courts que les enfants se retrouvent à l’heure du petit-déjeuner ou du goûter. Parmi cellesci, La Famille Blaireau-Renard (adaptée de l’ouvrage jeunesse de Brigitte Luciani Monsieur Blaireau et Madame Renarde) se distingue notamment par la diversité des thèmes abordés. Explications. LA FAMILLE RECOMPOSÉE COMME POINT DE DÉPART « Le sujet de départ, c’est la famille recomposée, et d’autres thématiques viennent s’y greffer », explique Florian Ferrier, le réalisateur d’origine alsa- DESSINS ANIMÉS cienne, également scénariste et écrivain. « Comment construit-on une fratrie, et vit-on avec le “ nouveau ” parent, et cette nouvelle famille qui ne partage pas toujours nos goûts et nos traditions ? » Du deuil, celui que les enfants blaireaux doivent faire de leur mère, à la maladie d’Alzheimer, dont Papi Renard manifeste les premiers signes, on parle de tout, ou presque, dans cette série lauréate du Prix export Unifrance 2020, récompensant les programmes audiovisuels français les mieux vendus dans le monde. « La force de la série, c’est d’aborder ces nombreux thèmes au premier degré – les jeunes enfants ne maîtrisant pas le second degré – avec justesse et légèreté », remarque le réalisateur. « Le fait qu’il s’agit d’animaux donne aussi une certaine distance ; l’identification n’est pas la même qu’avec des personnages humains. » Dans la forêt où vit la famille Blaireau-Renard, les autres familles ont toutes leurs particularités. Martis (la martre), est élevé par sa mère, qui dort la journée et s’active la nuit, s’agissant d’un animal nocturne. Pico, le petit marcassin, est quant à lui « couvé » par ses trois mamans, les laies (femelles sangliers) vivant d’ordinaire en hardes. Autant de mâles que de femelles, dans ce décor « où la nature tient le premier rôle ». Roussette, la petite Renarde, est plus sportive que ses frères blaireaux, et court même plus vite que les deux chats sauvages, qui jouent les caïds. Son beau-père, Edmond le Blaireau, de nature un peu soupe-au-lait, est plutôt strict et très investi, contrairement à son père Basile, fantasque et peu fiable. Ce père – un peu absent – Roussette ne sait pas toujours quand il passera la voir, alors qu’elle rêverait de le voir davantage. La série se distingue également par sa forme : une belle bande-son sans électronique et des plans qui font jusqu’à 15-20 secondes, « un rythme lent, inexistant dans la plupart des séries jeunesse, “ sur-découpées ” », note le réalisateur. France Télévision tente par ailleurs d’inciter d’autres séries à réduire le nombre de plans. « On a trop de dessins animés où l’on se prend des claques pendant dix minutes, car ça crie et bouge sans cesse », regrette Florian Ferrier. SOCIÉTÉ 17