Boxoffice Pro n°466 – 10 avril 2024

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EXPLOITATION LES SALLES VÉO RASSEMBLÉES À SARLAT ©Cécile Vargoz La situation du réseau, mais aussi les sujets d’actualité pour l’exploitation en général, ont été abordées lors d’une AG conviviale, qui a aussi permis de visiter la future école-studio de France Tabac. C’est à Sarlat que le réseau Véo a tenu son assemblée générale, le 28 mars, dans la région où l’entente est la plus représentée, et dans une ville où se dessine un vaste projet, porté par Ciné Passion et la Société d'Economie Mixte du Périgord avec les collectivités. Un studio de tournage couplé à une école publique aux métiers techniques du cinéma, dans les anciens locaux de France Tabac [plus d’infos à suivre], qu’ont pu visiter les adhérents de Véo la veille de leur AG… au Rex de Sarlat. « Ce cinéma a un riche passé et une identité, mais aussi un bel avenir à construire, en lien avec le projet de Ciné Passion sur le territoire », a introduit Julien Robert, directeur du site depuis l’an dernier. Un réseau qui s’agrandit… Le Rex a donc rejoint l’entente de programmation qui rassemble plus de 250 établissements, et qui en 2023 a franchi la barre des 400 écrans, avec l’arrivée du Celtic de Baud (Morbihan), du nouveau cinéma de Labarthesur-Lèze (Haute-Garonne), sans oublier les deux salles supplémentaires du Ciné 32 à Auch. Suivront en 2024 le Ciné Galaure de Saint-Vallier-sur-Rhône, le Rex de Neuville-sur-Saône, le cinéma Andronis de Montendre et le futur Vauban de Bitche, en Moselle, qui va rouvrir après 20 ans d’inactivité. Le réseau couvre donc l’ensemble du territoire, présent dans 45 départements et 10 régions, quand bien même l’Auvergne-Rhône-Alpes, la Nouvelle-Aquitaine et l’Occitanie représentent toujours à elles trois 90 % des entrées. Les travaux et projets se poursuivent, avec entre autres une 2 e salle pour le Louis Malle de Prayssac (Lot), qui ouvrira en 2024, un nouveau cinéma à Lavaur (Tarn) pour fin 2025 et celui de la Cartoucherie à Toulouse dont le chantier va débuter en juin prochain. En Nouvelle-Aquitaine, une dizaine de projets significatifs sont aussi en cours. …et qui retrouve son public plus vite que les gros circuits Cette croissance a permis à Véo de doubler sa fréquentation en 20 ans pour représenter aujourd’hui 4 % de part de marché au niveau national. Avec 7,24 millions de spectateurs en 2023 (salles programmées et celles de Véo Exploitation), le nombre d’entrées a progressé de 21 % par rapport à l’année précédente, ce qui confirme « que les petits cinémas de proximité remontent plus vite que les gros », constate Emmanuel Baron. En effet, « ceux qui s’appuient généralement sur une offre de blockbusters américains ont été plus pénalisés que nos petites salles, qui programment beaucoup de films français », rappelle Jean Villa, directeur général de Véo Cinémas, pour qui « les gros circuits ne doivent pas se tromper d’ennemi : les “petits” ne leur prennent pas d’entrées ». En effet, l’an dernier dans les salles Véo, Astérix a fait plus d'entrées que Barbie, et Sur les chemins noirs représentent 7,5 % de part de marché, contre moins de 3 % pour Oppenheimer ou Fast & Furious. L’art et essai a retrouvé une place 22 N°466 / 10 avril 2024
aussi importante qu’en 2019 dans le réseau, soit 45 % des séances pour 38 % des spectateurs. De façon générale, l’accès aux films s’est nettement amélioré depuis le Covid, y compris sur les avant-premières. « Aujourd’hui, nous obtenons facilement les films en semaine 3, mais c’est leur exposition qui reste un sujet de tension avec les distributeurs », souligne Emmanuel Baron. Des séances “inutiles” Le débat n’est pas nouveau : face aux exigences des distributeurs, les salles entendent s’adapter à la spécificité de leurs territoires. Chez Véo, le nombre de séances a augmenté de 11,7 % par rapport à 2019, mais pour des moyennes plus faibles (22 spectateurs par séance contre 25 avant le Covid). Les bordereaux à la séance, instaurés depuis l’été 2023, permettent d’objectiver ce phénomène en montrant que certaines séances se font à perte. « Nous avons été estomaqués du nombre de séances à moins de 4 spectateurs » témoigne Emmanuel Baron, pointant notamment « une dépense énergétique inutile ». Un vrai sujet dont la branche de la petite exploitation de la FNCF s’est emparée. Son président, Rafael Maestro, rappelle en effet que les crispations demeurent. « Sur un marché contraint de 185 000 entrées, dont 83 % se font toujours dans les 15 premiers jours d’exploitation, l’accès au film peut redevenir un sujet pour nos petites salles ». Il s’agit donc de mieux communiquer sur leurs atouts : « Une communauté de spectateurs, fidélisée par une proximité géographique et affective et un travail d’animation. » Renouveler les publics Un message à faire passer aussi auprès du public jeune, soit les 15-45 ans : « Consommez local, mais pas plus cher, dans un esprit de vivre ensemble : un vrai sujet politique La force d’un réseau et d’une équipe « Notre force, c’est d’être fédérés, et cela fait 35 ans que l’on apporte de la confiance », s’est réjoui Jean-Pierre Villa, président de la SAS Véo-Sagec-Ciné 32, qu’il a fondé aux côtés d’Alain Bouffartigue. Le regroupement de la programmation et de la facturation est aussi un atout pour les distributeurs, qui n’ont qu’un interlocuteur. Pour les salles, Véo est une force de proposition, par exemple en négociant des avant-premières pour l’ensemble du réseau, ou encore en ayant souscrit une offre groupée à l’agenda Access Dynamic, « que nous avons décidé, après une phase test de 6 mois, d’offrir à tous nos adhérents », a annoncé Emmanuel Baron lors qui dépasse le cadre des cinémas », estime Rafael Maestro, et qui interroge aussi le renouvellement de la profession. Les équipes des cinémas ont en effet connu beaucoup de turnover depuis le Covid, accueillant des personnes peu expérimentées. Or, comme le souligne un autre exploitant de Dordogne, « il faut des jeunes pour parler aux jeunes, il faut susciter des vocations, et pour ça, accepter toutes les demandes de stage que l’on reçoit ». Et bien sûr, il faut réfléchir à ce qu'on montre aux jeunes, en s’appuyant notamment sur les recommandations du comité 15-25 de l’Afcae. Reste qu'ici comme ailleurs, les inquiétudes sont grandes sur l’éducation aux images, depuis la mise en place du RCD par l’Éducation nationale, qui, pour rappel, prive les enseignants de formation sur leur temps de travail. La mesure affecte particulièrement Collège au cinéma, et ce d’autant plus que beaucoup de séances scolaires passent désormais par la part collective du pass Culture. « C’est très bien pour un film comme Simone, mais cela ne s’accompagne pas d’un travail d'éducation », remarque Rafael Maestro, selon lequel “Collège”, « le principal pilier pour le renouvellement du public, est en train de disparaître ». Les exploitants s’inquiètent par ailleurs de la pérennité du pass Culture, même si Yves Le Pannerer, conseiller cinéma à la Drac Nouvelle-Aquitaine, ne pense pas que l’outil, encore en cours de déploiement et qui génère des entrées en salles, s’arrêtera de sitôt. Quant à Lycéens au cinéma, la réforme du lycée a aussi un impact : à Sarlat cette année, on compte 100 élèves de moins sur le dispositif. Bref, de l’avis de tous, il est urgent que les ministères de la Culture et de l’Éducation nationale se parlent. de cette AG. L’équipe qu’il dirige s’est renforcée ces derniers mois, avec la nomination de Thomas Lenne en tant que directeur adjoint, mais aussi l’arrivée au pôle logistique de Laurence Bourgeois et d’Aurélien Uribelarréa. Cinq personnes travaillent ainsi principalement à la gestion des disques durs et KDM – toujours un gros sujet de (pré)occupations ! – sept à la programmation, répartis entre Auch, Egletons et Lyon, tandis qu’Aurélie Bordier s’occupe de la distribution et de l’Unipop de ville en ville, ce qui dépasse les salles de l’entente. ©Cécile Vargoz De la réforme art et essai à l’écologie des salles Bien entendu, les débats sont revenus sur la réforme du classement art et essai, dont les contours seront dévoilés à Cannes lors des Rencontres nationales de l’Afcae. En attendant, les inquiétudes exprimées il y a un an, déjà à Cannes, sont toujours là : « Si la finalité de cette réforme, avec une enveloppe constante, est de subventionner davantage les salles des grandes villes au détriment des territoires ruraux, c’est inadmissible pour nous », a ainsi souligné Jean-Pierre Villa. L’équation reste donc difficile entre le soutien à la programmation la plus pointue et l'équité territoriale. Enfin, alors que le coût de l’énergie était au cœur des discussions l’an dernier, il s’agit dorénavant d’avoir une vision sur le long terme de l’empreinte carbone des cinémas. La commission de la FNCF dédiée à la transition écologique des salles, dont Jean Villa fait partie, vient de lancer un questionnaire pour objectiver les principaux sujets. « C’est très rapide à remplir, et plus les petites salles y répondront, plus nous serons crédibles », a encouragé le directeur de Véo Cinémas, sachant que sur ce sujet aussi, les grands groupes n’ont pas forcément les mêmes priorités que les petits… ©Véo Distribution Loup y es-tu ? Cécile Vargoz L’an dernier, Véo s’est lancé dans la distribution pour accompagner le documentaire de Clara Bouffartigue, immersion dans un centre médico-psycho-pédagogique, à la rencontre des équipes, des enfants et de leur famille. Sept mois après sa sortie, le film est toujours en salle, notamment aux 3 Luxembourg à Paris qui propose des débats chaque semaine. « Après 160 ciné-débats en présence de la réalisatrice ou de nos Catherine Dolto et Clara Bouffartigue, lors d'un débat aux 3 Luxembourg en décembre, après la projection de Loup y es-tu ? L'équipe Véo sur la scène du Rex partenaires – notamment la Ligue des Droits de l’Homme et la Fédération des orthophonistes –, dont une séance à l’Assemblée nationale, nous avons réussi à fédérer un réseau de professionnels de la santé mentale, peu à peu élargi à tous les métiers du soin. Les étudiants en médecine, les écoles d'éducateurs, les syndicats d’enseignants s'intéressent à l’avenir des CMPP, et le film peut être vu aussi par des collègiens », explique Aurélie Bordier, ajoutant qu’un dossier pédagogique est en cours d’édition. À ce jour, Loup y es-tu ? totalise plus de 10 000 entrées, et ce n’est pas fini : 40 cinés-débats sont déjà datés jusqu’en octobre 2024. 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