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Le Brécaillon - Musée Militaire Genevois

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Lausanne 1964 et Genève 1968<br />

L'ARMEE S'EXPOSE<br />

Philippe COET<br />

«Du point de vue strictement militaire, nous n'en ferons jamais trop»<br />

Paul Chaudet, Conduire ou subir (1968)<br />

Dans un musée militaire, l'armée s'expose. <strong>Le</strong> regard y est généralement<br />

rétrospectif, historique: l'exposition porte sur l'évolution de l'organisation, des<br />

uniformes, de l'équipement, des armes; on y égrène les heures glorieuses et celles qui<br />

le sont moins…<br />

En cette année du 20e anniversaire du <strong>Musée</strong> militaire genevois, il m'a paru<br />

intéressant d'évoquer deux événements devenus par la force des choses historiques,<br />

mais à l'occasion desquels l'armée s'est montrée dans son présent et s'est projetée dans<br />

l'avenir qu'elle (se) prévoyait. L'un de ces événements est national, l'autre genevois; ils<br />

ont en commun leur objectif. Et tous deux s'inscrivent dans ce contexte de guerre<br />

froide qu'une exposition temporaire du musée rappelle actuellement aux visiteurs.<br />

L'évocation de l'Exposition nationale de 1964 à Lausanne et des Journées<br />

genevoises de la Défense nationale de 1968, au-delà des manifestations proprement<br />

dites, me donne l'occasion, à mon tour, d'explorer le thème de notre défense pendant<br />

une période récente de l'histoire, et ce également à travers d'autres événements et<br />

débats importants.<br />

La Suisse vigilante<br />

<strong>Le</strong> titre de l'exposition de la défense nationale est tout un programme à lui seul.<br />

Sur une superficie de 5'500 m2, on peut visiter un bâtiment circulaire (le<br />

«hérisson») et admirer trois flèches de 48 mètres de hauteur. <strong>Le</strong>s 141 pyramides qui<br />

forment le «hérisson» pèsent chacune 3,5 tonnes. Au total on a coulé 3'300 m3 de<br />

béton. <strong>Le</strong>s flèches, en acier, ont vu leur résistance contrôlée dans le tunnel<br />

aérodynamique de la fabrique d'avions d'Emmen. Elles pèsent ensemble 75 tonnes. <strong>Le</strong><br />

premier symbolise la solidité de la défense; les trois autres le dynamisme de l'armée.<br />

<strong>Le</strong> site est pratiquement achevé en 8 mois. Pas moins de 14 compagnies de<br />

sapeurs y travaillent d'avril à novembre 1963. Et c'est une colonne militaire qui amène<br />

de Villmergen à Lausanne les 141 pyramides du «hérisson». Enfin les troupes du génie<br />

collaborent avec les ouvriers civils pour terminer les divers aménagements.<br />

<strong>Le</strong> 30 avril 1964, malgré un incendie survenu 13 jours auparavant sur le toit et<br />

dans la salle de spectacle, tout est prêt. (1)<br />

<strong>Le</strong>s chiffres, les conditions de réalisation sont impressionnants. Et ils sont<br />

manifestement publiés pour impressionner. Car l'armée, qui se doit de figurer dans une<br />

telle vitrine, veut s'y faire remarquer et, pourquoi pas, admirer. Elle doit en fait séduire<br />

42 <strong>Le</strong> <strong>Brécaillon</strong><br />

LAUSANNE 1964 ET GENEVE 1968 - L'ARMEE S'EXPOSE<br />

pour convaincre. Or, dans ce pays de citoyens soldats, où le militaire est intimement<br />

lié au civil, l'armée n'a pas forcément partie gagnée. Nous allons voir que cette armée<br />

dont la mission est de protéger le pays, doit elle-même se défendre et se justifier devant<br />

ce pays. Une exposition nationale lui en fournit une excellente occasion.<br />

L'idée n'est pas nouvelle: l'armée n'a pas manqué les rendez-vous de Berne en<br />

1914 et de Zürich en 1939. (2) On oublie un peu qu'elle était déjà présente à Genève en<br />

1896.<br />

<strong>Le</strong> site de Vidy. On distingue, légèrement en haut et à gauche, en partie<br />

masqués par des arbres, le pavillon de l'armée et les trois flèches<br />

(carte postale de l'Expo 64).<br />

Si l'on en croit la Patrie Suisse, cette présence est alors une nouveauté car «à<br />

Zürich [en 1883 - NDLA], la Confédération n'avait exposé que quelques produits de<br />

la fabrique d'armes et le matériel sanitaire». Il a fallu l'insistance des organisateurs<br />

genevois pour que le Département militaire fédéral donne de l'ampleur à une exhibition<br />

qu'abrite un «Pavillon de l'Art militaire». <strong>Le</strong> principe de l'exposition n'aura guère<br />

changé 68 ans plus tard: montrer armes, munitions, équipements, uniformes, prouesses<br />

techniques, produits au label suisse… On relève bien une pointe d'ironie ça et là, ainsi<br />

l'évocation de cette vitrine qui montre l'effet d'une balle sur différentes matières et<br />

«dont on peut recommander l'examen comme calmant à ceux qui ne rêvent que<br />

<strong>Le</strong> <strong>Brécaillon</strong><br />

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