2014_Jahresbericht
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LE SYSTÈME DES<br />
INCITATIONS<br />
DANS L’AIDE SOCIALE<br />
A 10 ANS<br />
CAROLINE KNUPFER, ADJOINTE<br />
DÉPARTEMENT DE LA SANTÉ ET DE<br />
L'ACTION SOCIALE DU CANTON DE VAUD<br />
Les normes CSIAS de 2005 sont un jalon de la<br />
politique sociale suisse. Elles marquent un changement<br />
de paradigme d'une assistance centrée<br />
sur le soutien vers une prestation personnelle<br />
axée sur le marché du travail.<br />
Dans le sillage de la crise économique, de l'individualisation<br />
croissante et des nouveaux<br />
modes de vie, les prestations de l'Etat social<br />
ont connu une sorte de démocratisation dès<br />
les années 1990: le risque de perdre son emploi<br />
n'a plus touché que les seuls travailleurs<br />
peu qualifiés, mais aussi les banquiers, les<br />
pilotes ou les universitaires. Et une partie<br />
considérable de ces personnes, évincées pour<br />
«rationnalisation» ou «au profil inadéquat»,<br />
ont fini chômeurs en fin de droit, parfois candidates<br />
à l'AI. Depuis, les plus faibles parmi<br />
elles sur les plans financier et social ont de<br />
plus en plus souvent besoin d'aide sociale.<br />
Aujourd'hui, même un salaire n'est plus une<br />
garantie de s'en sortir sans soutien public.<br />
L'augmentation du coût des œuvres sociales<br />
liée à cette évolution a donné lieu à un débat<br />
enflammé sur la conception du soutien public,<br />
débat qui a abouti à un consensus large,<br />
fortement marqué par notre notion de statut<br />
axée sur l'activité lucrative: le travail doit être<br />
payant! Les working poor et les personnes<br />
souhaitant s'intégrer doivent être privilégiés<br />
par rapport aux bénéficiaires passifs. La mise<br />
en œuvre de cette idée directrice n'a pas été<br />
facile: dans quelle mesure faut-il privilégier<br />
les bénéficiaires actifs de l'aide sociale par<br />
rapport aux autres? Les bénéficiaires sans activité<br />
lucrative sont-ils tous inéluctablement<br />
passifs?... Les réponses à ces questions sont<br />
entrées dans les normes de 2005 au moyen<br />
d'un système souple, constitué de franchises<br />
sur le revenu des personnes exerçant une<br />
acti vité lucrative, de suppléments d'intégration<br />
pour celles qui participent à des mesures<br />
d'intégration sociale et de suppléments pour<br />
celles qui, pour des raisons structurelles, ne<br />
peuvent pas exercer une activité d'inté gration.<br />
Aujourd'hui, dix ans après l'introduction du<br />
système des incitations, se pose la question<br />
de son impact. Mais également la question<br />
de principe du rôle premier des éléments incitatifs:<br />
motivation individuelle à être actif,<br />
investissement social ou matérialisation de<br />
l'idée de justice sociale? Dans la seule logique<br />
d'activation, il serait sans doute possible de<br />
réduire, voire de supprimer les incitations<br />
financières sans perte pour l'effet d'intégration<br />
recherché, puisque l'État social pourrait<br />
atteindre les mêmes résultats en renforçant<br />
la pression et la mise au pas. À l'opposé, les<br />
défenseurs des investissements sociaux<br />
s'engagent en faveur du maintien ou du développement<br />
des éléments incitatifs, tout<br />
comme ceux qui voient dans les incitations<br />
des éléments de justice sociale. La révision<br />
prévue des normes CSIAS soulève la question<br />
de la pondération de la responsabilité individuelle<br />
des bénéficiaires de l'aide sociale, de<br />
l'égalité des chances et de la solidarité sociale.<br />
Le débat sociopolitique ne devrait pas être<br />
dominé par des réflexions financières à court<br />
terme, mais utilisé comme une chance de<br />
discuter sur des questions fondamentales de<br />
cohésion sociale.<br />
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