The EmLit Project - Arts @ Brunel
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TRADUCTIONS FRANÇAISES 195<br />
GIORGIA – Si on l’exprime comme ça, le problème est difficile à résoudre. Qui peut<br />
exprimer, de manière appropriée, sur la scène, la douleur d’abandonner la vie, je ne<br />
dis pas seulement la douleur physique mais aussi la terreur d’être obligé d’abandonner<br />
cette vie…<br />
MATTEO – Donc, on ne fera rien.<br />
M. CLESCERI – Rien, c’est un hommage manqué, c’est rien ! Alors pourquoi vous,<br />
les acteurs, êtes-vous venus ici ?<br />
ANGELA – On ne croyait pas qu’il était si difficile de parler de vous…<br />
GIORGIA – On ne s’était pas mis à votre place…<br />
M. CLESCERI – Vous ne pouvez pas vous mettre à notre place : vous ne ferez que<br />
faire semblant, mais ça peut servir aussi à perpétuer notre souvenir, même si c’est au<br />
théâtre.<br />
MATTEO – Désormais personne ne peut nous convaincre que les acteurs soient<br />
appropriés…<br />
M. CLESCERI – Je ne crois pas non plus que des acteurs professionnels puissent<br />
nous représenter.<br />
Une tenture est ouverte dans le studio; le Chef des bandits est assis, le Bandit est<br />
debout à côté de lui. Tous deux sont armés et encagoulés. Tout le monde est surpris.<br />
Les victimes du massacre s’éloignent, vers le décor du fond. Silence embarrassant à<br />
cause de la présence de deux bandits.<br />
DRAMATURGE, ANGELA, GIORGIA, MATTEO, CHEF DES BANDITS,<br />
BANDIT<br />
DRAMATURGE – Qui êtes-vous ?!<br />
CHEF DE BANDITS – Qui nous sommes ? Je ne le sais pas. Je veux le savoir de<br />
vous.<br />
DRAMATURGE – Pourquoi êtes-vous armés et encagoulés ?<br />
CHEF DE BANDITS – Si je dois jouer mon rôle, je veux garder l’incognito.<br />
DRAMATURGE – Je ne veux pas de personnages incognito. Enlevez vos cagoules.<br />
CHEF DE BANDITS – On ne peut pas. Nous avons été chargés d’une mission qui<br />
exigence habileté et confidentialité : nous ne pouvons donc rien enlever. Les tueurs ne<br />
peuvent être présents avec les tués ! Et nous sommes ceux de l’embuscade !<br />
DRAMATURGE – On ne peut pas mettre une pièce en scène sans savoir avec qui on<br />
travaille ! Et d’ailleurs, je ne veux rien mettre en scène du tout : je ne veux pas que<br />
vous tiriez sur des personnes sans armes, même pas pour rire !<br />
CHEF DE BANDITS – Sans armes ? mais ils ne sont pas sans armes ! Ce sont des<br />
gens dangereux. Des gens qui pensent. Qui commencent à penser, peut-être. Mais qui<br />
pensent. Ils ont des idées, des idéaux ! Ce sont des gens dangereux ! Il y en a de plus<br />
en plus : ils deviennent une foule, un peuple : le peuple qui pense est dangereux !<br />
Moi, j’ai un devoir tout simple : tirer sur les idées ! Si je tire sur la tête de ces<br />
personnes, c’est encore mieux : c’est là le centre des pensées !<br />
DRAMATURGE – Mais êtes-vous des acteurs ou des personnages ? A t’écouter<br />
parler, tu me sembles trop convaincu.<br />
CHEF DE BANDITS – J’ai bien appris mon rôle. Je suis acteur quand j’agis pour le<br />
compte d’autrui et je suis un personnage quand j’agis pour mon propre compte!<br />
DRAMATURGE – Et dans ce cas là ?<br />
CHEF DE BANDITS – J’ai été invité à donner une leçon au peuple de Portella des<br />
Gênets. On m’a dit de tirer en l’air pour les effrayer : tout le monde a peur des coups