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Lire le livre - Bibliothèque

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- Parce qu'il est faci<strong>le</strong> de s'y perdre. De s'y cacher. Il faut fuir, Anabel, pour votre<br />

sécurité ! Le chef, appelons-<strong>le</strong> comme ça, de la petite bande qui vous a en<strong>le</strong>vée était<br />

un type dangereux. Vraiment. Il n'y a plus rien à redouter de lui, mais <strong>le</strong>s autres sont<br />

toujours dans la nature. Ne protestez pas ! Faites-moi confiance ! Vous me faites<br />

confiance ?<br />

- Oui, bien sûr, mais vous ? S'il y a réel<strong>le</strong>ment un danger ?<br />

- Je vais disparaître, Anabel, disparaître, ça m'est déjà arrivé tant et tant de fois dans<br />

<strong>le</strong> passé que je ne m'en formalise pas. C'est assez désagréab<strong>le</strong>, une vraie corvée, il<br />

faut se reconstruire des habitudes, recommencer à apprivoiser des inconnus, c'est<br />

bien du tracas... Ma maison a brûlé. Vos ravisseurs se sont chargés de la besogne. Ce<br />

qui me chagrine un peu : rassemb<strong>le</strong>r cette bibliothèque m'avait donné un travail fou !<br />

Mais je la reconstituerai ! Je ne suis pas pressé. Quant au magasin, mieux vaut ne<br />

plus y remettre <strong>le</strong>s pieds. Ce serait trop dangereux. Je préfère couper <strong>le</strong>s ponts,<br />

effacer toutes <strong>le</strong>s traces. Écoutez-moi, Anabel, écoutez-moi attentivement, allons à<br />

l'essentiel, nous n'avons que peu de temps devant nous ! Ce que je vais vous dire,<br />

vous pourrez <strong>le</strong> raconter autour de vous, plus tard, mais personne ne vous croira. On<br />

vous prendrait pour une fol<strong>le</strong>, une mythomane. Si bien que vous préférerez garder <strong>le</strong><br />

si<strong>le</strong>nce...<br />

Monsieur Jacob prit une profonde inspiration avant de poursuivre. De temps à autre <strong>le</strong><br />

regard d'Anabel avait croisé celui de Maxime, dans <strong>le</strong> rétroviseur. Pour la première<br />

fois, il lui adressa un sourire.<br />

- Il y a longtemps, Anabel, il y a très longtemps, à l'époque je n'avais pas <strong>le</strong>s moyens<br />

de calcu<strong>le</strong>r avec précision, mais disons que j'évalue tout cela à une dizaine de milliers<br />

de... vos années.<br />

- Comment ? murmura Anabel.<br />

- Ne m'interrompez pas, sinon ce sera diffici<strong>le</strong>. Écoutez simp<strong>le</strong>ment. Une dizaine de<br />

milliers d'années, oui. Ma tribu - c'est <strong>le</strong> terme <strong>le</strong> plus approprié - vivait quelque part<br />

en Asie du Nord. Du moins je <strong>le</strong> pense. Inuti<strong>le</strong> de vous dire que je n'avais pas de carte<br />

et que la façon dont je me représentais <strong>le</strong> monde était assez rudimentaire. Mais plus<br />

tard, bien plus tard, je suis retourné dans cette contrée, comme en pè<strong>le</strong>rinage, j'ai<br />

reconnu <strong>le</strong> contour des montagnes, <strong>le</strong>s méandres des f<strong>le</strong>uves, la végétation. C'est<br />

accessoire, tota<strong>le</strong>ment accessoire pour ce qui vous concerne. Nous étions nomades.<br />

Nous emportions nos troupeaux d'une place à l'autre, dans de longues migrations. Je<br />

n'étais qu'un jeune garçon, douze ans à peine. Tom, évidemment - à l'époque, il ne<br />

s'appelait pas Tom, pas plus que je ne m'appel<strong>le</strong> Jacob, mais tout cela n'a vraiment<br />

aucune importance -, Tom donc, n'avait que deux ou trois ans, et mon autre frère,<br />

celui qui a provoqué tous vos ennuis, et que vous avez croisé chez moi, n'était guère<br />

plus vieux... il y avait aussi « Marcus », plus âgé, vingt ans sans doute. Vous en avez<br />

entendu par<strong>le</strong>r, n'est-ce pas ?<br />

Anabel se passa la main sur <strong>le</strong> visage, secoua la tête en fixant <strong>le</strong>s voitures qui<br />

entouraient la Mercedes, <strong>le</strong>s panneaux publicitaires qui balisaient <strong>le</strong> parcours de<br />

l'autoroute.<br />

- Non... non..., murmura-t-el<strong>le</strong>. Je ne peux pas vous croire !<br />

Monsieur Jacob ignora sa réplique.<br />

- Libre à vous de me croire ou non. Je vous dis la vérité, je vous <strong>le</strong> jure ! Combien<br />

étions-nous au total ? Trois cents, peut-être un peu plus. Mon père était <strong>le</strong> chef. Il y<br />

avait un autre terme mais, pour vous <strong>le</strong> désigner, ce vocabulaire est bien plus<br />

simp<strong>le</strong>... Un soir, au cours de la transhumance de nos troupeaux, des chèvres, des<br />

moutons, nous étions tous réunis devant de grands feux. Nous nous sentions en<br />

sécurité. La présence d'un feu m'a toujours apaisé, el<strong>le</strong> m'est nécessaire, vous <strong>le</strong><br />

savez... Et soudain, un souff<strong>le</strong> furieux a tout balayé autour de nous. Nous<br />

connaissions <strong>le</strong>s vents, <strong>le</strong>s saisons où ils se <strong>le</strong>vaient, cel<strong>le</strong>s où ils étaient inexistants,

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