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Enver Hoxha - Les khrouchtchéviens - communisme-bolchevisme

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A l'idée de Khrouchtchev selon laquelle «c'est la rupture des relations qui a conduit les dirigeants<br />

yougoslaves dans le giron de l'impérialisme», nous opposâmes dans notre lettre de réponse la thèse<br />

selon laquelle c'étaient les dirigeants yougoslaves eux-mêmes qui avaient trahi le marxisme-léninisme<br />

et qui avaient engagé leur peuple et leur patrie dans la voie de l'asservissement aux impérialistes<br />

américains et anglais et de leur diktat, que leur ligne antimarxiste constituait le facteur qui avait nui<br />

gravement aux intérêts vitaux des peuples de Yougoslavie, que c'étaient eux-mêmes qui avaient<br />

détaché la Yougoslavie du sein du camp du socialisme, qui avaient converti le parti yougoslave en un<br />

parti bourgeois et l'avaient détaché du mouvement international du prolétariat.<br />

Tout en faisant bien ressortir ces vérités, nous indiquions plus bas que nous approuvions les efforts des<br />

autres partis communistes pour aider à sauver les peuples de Yougoslavie de l'asservissement et de la<br />

misère, mais nous soulignions une fois de plus qu'à notre avis les dirigeants yougoslaves s'étaient<br />

engagés à fond dans la voie anti-marxiste, dans la voie de la soumission aux impérialistes américains<br />

et anglais.<br />

Indirectement, nous disions ainsi à Khrouchtchev que nous ne partagions pas ses espoirs et ses<br />

illusions à propos des dirigeants yougoslaves et en particulier du «camarade Tito», comme il avait<br />

commencé à l'appeler. J'exposai aussi ces idées à Khrouchtchev au cours d'un autre entretien que j'eus<br />

avec lui, le 23 juin 1954. Mais il fit semblant de ne pas relever la différence de nos positions<br />

respectives sur la question yougoslave. Peut-être ne voulait-il pas créer de conflit avec nous dès nos<br />

premières entrevues officielles. Peut-être aussi nous sous-estimait-il et ne voulait-il rien savoir de nos<br />

objections. Je me rappelle qu'il était en pleine euphorie et qu'il parlait avec l'assurance de quelqu'un<br />

qui a le vent en poupe. Il venait de rentrer d'une visite éclair en Tchécoslovaquie (il était maître en<br />

toutes sortes de visites : éclair, incognito, officielles, amicales, sensationnelles, silencieuses, diurnes,<br />

nocturnes, déclarées, non déclarées, brèves, longues, avec une suite ou strictement personnelles, etc.).<br />

«A Prague, me dit-il, j'ai reparlé du problème yougoslave avec des représentants de quelques partis<br />

frères qui se trouvaient là-bas. Tous étaient pleinement d'accord avec moi et ils ont considéré les<br />

efforts de notre parti comme très importants.» Puis, me regardant droit dans les yeux, il ajouta :<br />

«Nous-mêmes, les Hongrois, les Bulgares, les Roumains et d'autres encore, avons accompli ces<br />

derniers temps des pas positifs vers la normalisation des rapports avec la Yougoslavie...»<br />

Je devinai pourquoi il mettait l'accent là-dessus. Il voulait me dire par là : Tu vois, nous sommes tous<br />

d'accord, il ne vous reste donc, à vous aussi, Albanais, qu'à vous rallier à nous. Je lui expliquai<br />

brièvement que nos relations avec le parti et l'Etat yougoslaves étaient une longue histoire, la direction<br />

yougoslave elle-même étant seule responsable de la dégradation de nos rapports, et que si les rapports<br />

albano-yougoslaves d'Etat à Etat étaient détériorés à ce point, cela ne tenait pas à nous, mais aux prises<br />

de position et aux actes réitérés anti-marxistes et anti-albanais des dirigeants de Belgrade.<br />

«Kanietchno, kanietchno ! [En russe : bon, bon.] s'exclama Khrouchtchev et je compris qu'il ne<br />

voulait pas me voir m'engager plus avant dans la discussion de ce problème.<br />

«Nous avons pris, dit-il, toutes les mesures. Demain, notre ambassadeur en Yougoslavie ira rencontrer<br />

Tito, qui se trouve en ce moment à Brioni. Il y a beaucoup de chances, pensons-nous, pour que nous<br />

parvenions à nos fins. Dans le cas contraire, conclua-t-il, nous aurons recours à d'autres méthodes.»<br />

C'est ainsi que s'ébaucha le roman d'amour Khrouchtchev-Tito. Quelques jours après, Khrouchtchev<br />

remit par écrit à Tito ses idées ou ses «conclusions» sur la «nouvelle analyse» de la question<br />

yougoslave. Naturellement Tito se réjouissait de voir Khrouchtchev mener les choses de la manière<br />

dont il l'avait prévu, mais en vieux renard qu'il était, il ne se montra pas si léger que de se jeter dans les<br />

bras de Khrouchtchev. Au contraire, Tito, qui au reste s'y employait, entendait que Khrouchtchev, de<br />

même qu'il s'était incliné le premier, fît encore le premier pas et vînt lui demander pardon à Belgrade.<br />

Par ailleurs, Tito était enfoncé jusqu'au cou dans le bourbier de l'impérialisme, il avait les pieds et les<br />

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