Enver Hoxha - Les khrouchtchéviens - communisme-bolchevisme
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C'était là, dans son essence, le contenu de notre seconde lettre envoyée à la direction soviétique.<br />
S'il y a lieu de parler ici de «retrait», ce ne peut être le cas qu'en ce qui concerne le fait que nous n'y<br />
renouvelions pas notre proposition d'organiser préalablement une réunion du Kominform. Cette<br />
proposition aurait maintenant été sans valeur, car Khrouchtchev nous avait mis devant le fait accompli<br />
et il était parti pour Belgrade. D'autre part, bien que nous ayons exprimé nos vues en soutien aux<br />
principes, nous ne pouvions pour autant nous opposer ouvertement à la direction soviétique et aux<br />
autres à une époque où le problème était encore en évolution. Quoi qu'il en fût, nous aiguisâmes<br />
encore plus notre vigilance et ouvrîmes encore mieux les yeux. Pour nous, alors comme par le passé,<br />
l'attitude à l'égard des révisionnistes de Belgrade était et demeurait la pierre de touche pour juger si un<br />
parti suivait une ligne marxiste saine ou une voie erronée, antimarxiste. C'est en cela que nous<br />
devions, à l'avenir, mettre aussi Khrouchtchev et les <strong>khrouchtchéviens</strong> à l'épreuve.<br />
Peu de temps après ces événements, à l'été 1955 je reçus une invitation à «aller sans faute passer des<br />
vacances en Union soviétique».<br />
A l'époque de Staline j'y allais pour travailler et très rarement pour me reposer. A l'époque de<br />
Khrouchtchev on se mit à faire pression sur nous pour que nous allions en vacances là-bas, et il était<br />
difficile de refuser, car les Soviétiques posaient la question sur le plan politique. Pour ma part, je<br />
n'avais pas envie d'y aller, car, en fait, on ne pouvait s'y reposer et le voyage était fort long. Pour<br />
arriver à Moscou il nous fallait d'abord faire huit jours de bateau de Durres à Odessa et cela sur des<br />
navires de petit tonnage (comme le Kotovski, le Tchiaturi) qui vous secouaient rudement. Il fallait<br />
aussi deux autres jours de train d'Odessa à Moscou, puis un autre jour en avion de Moscou au Caucase,<br />
but de notre périple (Kislovodsk, etc.), c'est-à-dire onze jours pour le voyage aller et tout autant pour le<br />
retour, plus quelques jours de réunion; on comprendra donc de quel genre de vacances il s'agissait.<br />
A peine arrivés à Moscou, nous commencions nos entretiens avec les dirigeants soviétiques, mais nous<br />
n'y prenions pas le plaisir que nous procuraient ceux que nous avions avec Staline. Ils se déroulaient<br />
maintenant dans une atmosphère tantôt d'irritation contenue, tantôt de frictions manifestes.<br />
Il en fut de même cette fois-là au cours des deux entretiens que, à peine arrivé à Moscou, j'eus avec<br />
Souslov. Dès l'abord, il me dit que nous discuterions de la question yougoslave, soulignant sur un ton<br />
impérieux :<br />
«La direction de votre parti doit bien considérer cette question, vous ne devez pas avoir une vue rigide<br />
du problème yougoslave».<br />
Je l'écoutais sans le quitter des yeux et, devinant mon mécontentement, il opéra un certain retrait :<br />
«Leurs erreurs restent des erreurs, dit-il, mais notre but est de nous réconcilier et d'avancer dans la<br />
voie de l'amitié avec la Yougoslavie. Notre Comité central, poursuivit-il, a, dans sa dernière réunion,<br />
analysé une fois de plus nos rapports avec la Yougoslavie et nous allons vous remettre nous-mêmes le<br />
rapport qui y a été présenté, car il est très secret.»<br />
Il se tut un instant, cherchant à découvrir l'impression que m'avaient produite ses propos, puis continua<br />
:<br />
«L'essentiel, c'est que le Comité central du Parti communiste de l'Union soviétique a examiné la<br />
question yougoslave sous un jour réaliste, en tenant compte de l'action traîtresse de Beria, et nousmêmes<br />
avons fait notre autocritique à ce propos. Notre Comité central a conclu que la rupture des<br />
relations avec la Yougoslavie avait été une erreur, autrement dit que c'avait été une décision hâtive.<br />
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