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Lorsqu’il fut trop loin pour m’entendre, je foudroyai Shay du regard.
– Tu es fou ou quoi ?
– De vouloir écouter Nev ? demanda-t-il avec un sourire placide. Je ne pense pas, non. Même si je
suppose que l’opinion de Mason sur son talent est un peu faussée.
– Tu sais ce que je veux dire, rétorquai-je sans sourire. Ren sera là.
– Oui, probablement.
Je ne pouvais m’empêcher d’imaginer les deux garçons dans le même bar sombre et bondé. Le mot
« désastre » s’inscrivit comme une enseigne lumineuse en travers de mon esprit.
– Il voudra…
Je me mordis la lèvre.
– Se comporter comme ton petit ami ? demanda Shay en haussant les sourcils. En public ?
Je baissai les yeux et hochai la tête.
– Je comprends.
– Merci, Shay, dis-je, soulagée qu’il ne s’entête pas. J’aurais vraiment aimé que tu puisses venir.
– Ah bon ? demanda-t-il en jouant avec la porte de mon casier. Et pourquoi ça ?
Je fronçai les sourcils.
– Tu ne peux pas juste te contenter de ça ?
– Je ne crois pas, répondit-il avec un sourire joueur. Non.
– Tu es toujours aussi agaçant ?
Son sourire me fit mal au cœur, me rappelant à quel point son espièglerie pouvait me faire rire. La
soirée serait stressante sans lui pour soulager mon anxiété.
– Réponds-moi.
– Je ne sais pas si c’est important, mais tu vas me manquer, dis-je en m’approchant de lui. Dimanche,
c’est loin.
À peine ces mots sortis de ma bouche, je me mordis la lèvre.
Mais qu’est-ce que j’ai dit ? J’aurais mieux fait de me taire…
– C’est agréable à entendre, lança-t-il avec un sourire dangereux. Mais je serai quand même là ce soir.
Mon cœur s’arrêta de battre.
– Quoi ? Mais tu viens de dire que…
– Je sais, Calla, dit-il en me pressant la main. À ce soir.
Je le dévisageai. Il rit et partit.
Mason engagea sa Land Rover sur le chemin en graviers. Le véhicule imposant détonnait à côté des
motos et des vieilles voitures des habitués.
Bryn défit sa ceinture.
– Je ne sais pas ce qu’on fait là. Je préférerais largement être à l’Éden.
– Nev ne joue pas à l’Éden, rétorqua Mason. Et puis, c’est bien de changer un peu.
– Crois-moi, c’est mieux ici, dis-je, le ventre noué à la seule idée de retourner dans le club d’Efron.
Mason et moi échangeâmes un regard. Nous n’avons rien dit, mais je savais que nous pensions la même
chose. Nous ne risquions pas de croiser Logan au Burnout.
Ansel passa le bras autour de la taille de Bryn et la força à sortir de la voiture.
– Tu vas t’amuser et tu le sais.
Elle fit la moue jusqu’à ce qu’il l’embrasse. Alors un grand sourire éclaira son visage.
Le Burnout 1 avait été construit sur les vestiges d’un café ravagé par le feu une décennie plus tôt. Au
lieu de raser le bâtiment, les nouveaux propriétaires avaient simplement construit le bar tout autour, sur
l’ancien site. Du bois carbonisé apparaissait un peu partout, comme une œuvre d’art moderne placée là
par erreur. Au sol, les lattes en bois dur faisaient saillie, si bien qu’à certains endroits, il était facile de
trébucher.