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Nulle part et partout - Je me livre ... Eric Vincent

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<strong>Nulle</strong> <strong>part</strong> <strong>et</strong> <strong>part</strong>out<br />

Par quoi allaient-ils enta<strong>me</strong>r leurs exa<strong>me</strong>ns ? Se serviraient-ils du systè<strong>me</strong> expert d'analyse<br />

médicale basé sur une imagerie tridi<strong>me</strong>nsionnelle de sa structure A.D.N. ? Un tout nouveau<br />

systè<strong>me</strong> dont seule<strong>me</strong>nt six hôpitaux français avaient fait l'acquisition. L'hôpital de Haut-<br />

Lévêque ap<strong>part</strong>enait à la liste des heureux élus. Avec un échantillon de sang, c<strong>et</strong> ordinateur à<br />

la puissance de calcul monstrueuse balayait toutes les anomalies génétiques existantes,<br />

détectait les codes prédisposant à certaines maladies, déterminait les incompatibilités, les<br />

risques d'anormalité avec d'autres chaînes A.D.N (en gros, il indiquait un risque avec tel ou tel<br />

<strong>part</strong>enaire). Il était mê<strong>me</strong> capable, sauf cas d'accident ou de maladie virale ou bactériologique<br />

contractée, de déterminer l'âge auquel le patient décéderait. La précision diabolique de la<br />

machine faisait froid dans le dos. Mais elle était nécessaire.<br />

Christian laissa son esprit vagabonder, charmé par les paysages du Massif Central <strong>et</strong> de ses<br />

contreforts qu'il traversait. En c<strong>et</strong>te saison, la neige faisait son apparition sur les hauteurs. Plus<br />

bas, les couleurs de l'hiver tournaient surtout autour du vert. Le vert des sapins, le vert de<br />

l'herbe grasse se gorgeant d'eau depuis le mois de septembre, le vert des vieux murs moussus.<br />

Le vert de l'espoir qu'il s'en sorte rapide<strong>me</strong>nt <strong>et</strong> revienne à une vie plus tranquille. Le vert du<br />

feu pour l'autorisation d'accès à un monde normal. Du vert à perte de vue. Et cependant, le<br />

noir envahissait de plus en plus son horizon. Il se refusa à fer<strong>me</strong>r les yeux. Il sentit la crise<br />

d'hallucinations monter en lui. S'il avait le malheur de clore les yeux, il basculerait dans la folie,<br />

une fois de plus. Abaisser les paupières semblait constituer le facteur déclenchant. Peut-être<br />

pas le seul. Il réfléchit longue<strong>me</strong>nt aux multiples causes qui pouvaient j<strong>et</strong>er son esprit dans la<br />

tour<strong>me</strong>nte, quitte à les séparer mo<strong>me</strong>ntané<strong>me</strong>nt de la réalité. Ses premières absences s'étaient<br />

déclenchées à l'enterre<strong>me</strong>nt de ses parents <strong>et</strong> depuis, cela n'avait plus cessé : l'annonce du<br />

divorce, la découverte de l'ap<strong>part</strong>e<strong>me</strong>nt vidé, la visite à l'avocat, la rencontre avec le banquier<br />

<strong>et</strong> ses actionnaires, la confrontation avec le notaire. A chaque fois, <strong>et</strong> bien d'autres encore, il<br />

avait été soumis à un stress intense. Le premier choc datait du décès de son père <strong>et</strong> sa mère.<br />

Depuis, il avait enchaîné stress sur stress, choc sur choc. Maintenant, alors qu'il roulait<br />

sereine<strong>me</strong>nt, assisté par le guidage automatique de son véhicule, il n'ignorait pas qu'il allait audevant<br />

d'une série d'exa<strong>me</strong>ns médicaux susceptibles de lui causer une frousse mémorable. Du<br />

stress. A cause du danger potentiel, de maladie certaine, de mort possible.<br />

A présent, il était convaincu d'avoir réuni les conditions pour plonger dans une nouvelle folie.<br />

Seule une maladie neurologique était en <strong>me</strong>sure de provoquer de telles réactions. Ou alors, il<br />

s'agissait tout bonne<strong>me</strong>nt d'une tu<strong>me</strong>ur au cerveau. Si la tu<strong>me</strong>ur n'était pas trop développée,<br />

une projection d'ultrasons concentrés casserait l'intruse en mille morceaux, une enzy<strong>me</strong> se<br />

chargerait des déch<strong>et</strong>s <strong>et</strong> le tour serait joué. Après cela, après une analyse, on lui injecterait un<br />

gène anticancéreux afin d'éliminer tout risque de récidive. Par contre, si la tu<strong>me</strong>ur avait atteint<br />

la taille d'une pêche, le pronostic serait <strong>part</strong>iculière<strong>me</strong>nt sombre. Quelle importance ? Ses<br />

parents n'étaient plus de ce monde, il n'avait pas d'enfant ; quant à son ex fem<strong>me</strong>, elle pouvait<br />

aller rôtir en enfer, il n'en avait rien à cirer. Alors...<br />

Dans sa situation, une nouvelle catastrophique pour le commun des mortels n'en serait peutêtre<br />

pas une pour lui. Sûre<strong>me</strong>nt pas, mê<strong>me</strong>. Il devait se faire à l'idée de ne pas passer l'hiver, à<br />

l'idée d'être grave<strong>me</strong>nt malade <strong>et</strong> à l'idée d'entrer définitive<strong>me</strong>nt à l'hôpital.<br />

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