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La mort du Roi Arthu..

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cornique Mordred ou Mordret), rivalité de mâles doublée d’une rivalité de « chefs de guerre ». Or, l’<strong>Arthu</strong>r historique n’était rien d’autre qu’un<br />

<strong>du</strong>x bellorum au service des rois bretons (voir J. Markale, Le <strong>Roi</strong> <strong>Arthu</strong>r et la Société celtique, pp. 193-218). Dans la tradition primitive,<br />

Mordret n’est ni le neveu ni, a fortiori, le fils incestueux d’<strong>Arthu</strong>r, mais un simple rival. Les auteurs des récits arthuriens, notamment celui de<br />

<strong>La</strong> Mort le roi Artu, sont à l’évidence les inventeurs de cette filiation, conforme à un schéma mythologique où une espèce de lutte cosmique<br />

qui met aux prises le père et le fils.<br />

{69} Souvenir d’événements historiques : pendant tout le haut Moyen Âge, les Gaëls d’Irlande se sont livrés à des expéditions de pillage sur<br />

les côtes de Grande-Bretagne. L’alliance de Mordret avec les Irlandais, les Saxons et les Pictes d’Écosse correspond à une réalité vécue dont<br />

subsistent de nombreuses traces en Cornouailles comme au Pays de Galles.<br />

{70} Il semble bien que, dans les versions primitives de la légende, la femme d’<strong>Arthu</strong>r fût la complice de ses ravisseurs. Mais à partir <strong>du</strong><br />

moment où le personnage de <strong>La</strong>ncelot eut supplanté ses autres amants (Kaï, Yder et même Gauvain), il devenait impossible de mettre l’accent<br />

sur l’infidélité – si conforme soit-elle au schéma celtique – de la reine, sous peine de minorer son amour fou et idéal pour le fils <strong>du</strong> roi Ban (et<br />

vice versa).<br />

{71} <strong>La</strong> Mort le roi Artu parle de la Tour de Londres, détail qui montre que l’auteur voulait glorifier la capitale des Plantagenêts.<br />

{72} On reconnaît ici le thème déjà répété <strong>du</strong> héros lunaire qui reçoit sa force d’une divinité solaire, autrement dit de la femme-soleil. Voir<br />

l’intro<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> Cycle <strong>du</strong> Graal, 5 e époque, « Gauvain et les chemins d’Avalon ».<br />

{73} D’après <strong>La</strong> Mort le roi Artu, récit attribué à Gautier Map, avec des détails empruntés au Morte Darthur de Thomas Malory.<br />

{74} Hautement incongrue, la crainte exprimée par Guenièvre figure dans <strong>La</strong> Mort le roi Artu, bien que ce récit, loin de comporter la<br />

moindre allusion à une quelconque liaison, volontaire ou forcée, de Guenièvre et Mordret, prête à la reine une attitude franchement hostile à<br />

l’endroit de son neveu et gardien. Force est donc d’admettre que l’auteur de cette version, très fortement christianisée par ailleurs, suit ici un<br />

modèle archaïque où Guenièvre était la complice de son ravisseur. C’est ce qui ressort des textes primitifs, en particulier <strong>du</strong> modèle littéraire<br />

par excellence qu’est l’Historia Regum Britanniae <strong>du</strong> clerc gallois Geoffroy de Monmouth (1135), où l’on peut lire ce passage : « On<br />

annonça que Mordret, son neveu, à qui il avait confié la régence de Bretagne, avait ceint la couronne sur sa propre tête, et que, de plus, le<br />

traître tyran vivait en a<strong>du</strong>ltère et hors mariage avec la reine Guenièvre. » C’est alors qu’<strong>Arthu</strong>r revient dans l’île de Bretagne et affronte une<br />

première fois Mordret dans une bataille au cours de laquelle périt Gauvain. Il faut noter que <strong>La</strong>ncelot n’apparaît dans aucun récit arthurien<br />

avant Le Chevalier de la Charrette de Chrétien de Troyes, vers 1170, et qu’il n’est donc pas question de <strong>du</strong>el fratricide entre lui et Gauvain.<br />

{75} Il s’agit <strong>du</strong> monument mégalithique de Stonehenge dans le Wiltshire. Voir Le Cycle <strong>du</strong> Graal, 1 e époque, « <strong>La</strong> Naissance <strong>du</strong> roi<br />

<strong>Arthu</strong>r ». Seule <strong>La</strong> Mort le roi Artu situe la bataille suivante dans la plaine de Salisbière, près de gros rochers dans lesquels il n’est pas<br />

difficile de reconnaître les « trilithes » de Stonehenge. Si le Morte Darthur de Malory se contente d’une simple allusion à Salisbury, les<br />

traditions galloises anciennes situent unanimement la bataille à Camlann. On a localisé ce Camlann un peu partout en Grande-Bretagne,<br />

notamment à la frontière écossaise et en Cornouailles – l’écart se passe de commentaires. À noter d’abord que Camlann, dérivé d’un ancien<br />

camboglanna, signifie « rive courbe » et que de nombreuses rivières de Grande-Bretagne portent le nom de Camel, incontestablement dérivé<br />

de combo, « courbe ». Il faut ensuite signaler la tradition de Cornouailles solidement implantée sur une rivière Camel, à Camelford, très<br />

exactement : on montre là le Slaughter Bridge, le « Pont <strong>du</strong> Meurtre », où se serait déroulé le <strong>du</strong>el d’<strong>Arthu</strong>r et Mordret. Compte tenu de<br />

l’origine cornique de la légende arthurienne, il faudrait donc placer le combat historique à Camelford, mais le récit de <strong>La</strong> Mort le roi Artu se<br />

déroule réellement entre Glastonbury et Winchester, c’est-à-dire dans l’immense plaine de Salisbury, si riche en monuments mégalithiques.<br />

Non contente de faire de Merlin le constructeur « magique » de Stonehenge, la tradition locale place également non loin de là, sur Cadbury Hill,<br />

le Camelot ou Kamaalot d’<strong>Arthu</strong>r. Enfin, c’est à Glastonbury que se trouve le tombeau présumé d’<strong>Arthu</strong>r et de Guenièvre, ce qui laisserait<br />

supposer qu’une antique tradition mythologique concernant <strong>Arthu</strong>r et Merlin recouvre les comtés <strong>du</strong> Wiltshire et <strong>du</strong> Somerset, eux-mêmes<br />

véritables charnières entre la péninsule de Cornouailles – Devon et le Pays de Galles, lieux privilégiés des exploits des chevaliers de la Table<br />

Ronde.<br />

{76} <strong>Arthu</strong>r commet ici une erreur manifeste. Les Triades galloises insistent toutes sur la faiblesse des troupes d’<strong>Arthu</strong>r : « En apprenant<br />

que l’armée d’<strong>Arthu</strong>r était ainsi affaiblie, Medrawt [Mordret] se tourna contre lui […] Avec ce qui survivait de ses soldats, <strong>Arthu</strong>r réussit à<br />

aborder dans cette île. » (Triade 10 <strong>du</strong> Livre Rouge de Hergest, J. Loth, Les Mabinogion, éd. de 1913, II, p. 237.)<br />

{77} Le Morte Darthur de Thomas Malory présente les choses fort différemment. Très affecté par les présages funestes qui s’accumulent,<br />

le roi cherche à composer avec Mordret. Il envoie Bedwyr et Lucan en ambassadeurs : « Peu importe la façon dont vous vous y prendrez,<br />

mais concluez un traité avec Mordret […] Proposez-lui autant de terres et de biens que vous le jugerez bon. » Il est vrai que Mordret a « une<br />

armée redoutable de cent mille hommes ». Finalement, l’accord se fait : « Mordret accepte de recevoir la Cornouailles et le Kent <strong>du</strong>rant la vie<br />

<strong>du</strong> roi <strong>Arthu</strong>r, étant enten<strong>du</strong> que, celui-ci <strong>mort</strong>, lui écherra toute l’Angleterre. » Une entrevue est décidée entre <strong>Arthu</strong>r et Mordret, entrevue<br />

pacifique, mais celle-ci est troublée par un incident : l’un des hommes d’<strong>Arthu</strong>r, mor<strong>du</strong> par une vipère, tire son épée, ce qui crée une confusion<br />

et déclenche la bataille. Il semble que Thomas Malory, qui a composé sa compilation vers 1450, juste avant le déclenchement de la guerre des<br />

Deux-Roses, ait été influencé par les tentatives de compromis esquissées à l’époque tant par les York que par les <strong>La</strong>ncastre.<br />

{78} Cette anecdote se trouve dans la seconde branche <strong>du</strong> Mabinogi gallois.<br />

{79} Neuf, d’après Geoffroy de Monmouth (Historia Regum Britanniae). Les trois corps qu’au même instant constitue Mordret<br />

n’impliquent évidemment pas d’infériorité numérique.<br />

{80} D’après <strong>La</strong> Mort le roi Artu, récit attribué à Gautier Map. Thomas Malory se montre beaucoup plus succinct sur cette bataille. Quant<br />

à Geoffroy de Monmouth, voici dans quels termes il raconte la <strong>mort</strong>elle bataille de Camlann : « Il serait douloureux de décrire le carnage qui<br />

fut fait de part et d’autre, comment les mourants gémissaient, combien grande était la furie des combattants. Tous les hommes recevaient des<br />

blessures et en infligeaient, mouraient ou apportaient la <strong>mort</strong>. À la fin, quand la plus grande partie <strong>du</strong> jour fut passée, <strong>Arthu</strong>r, avec un seul<br />

corps dans lequel il avait mis 6666 hommes, chargea le groupe où se tenait Mordret. Ils se frayèrent un chemin avec leurs épées, et <strong>Arthu</strong>r<br />

continua d’avancer, infligeant terrible carnage là où il passait. Il fit tant que le traître maudit fut tué […] <strong>Arthu</strong>r lui-même, notre renommé roi,<br />

fut <strong>mort</strong>ellement blessé, et fut emporté jusque dans l’île d’Avalon, pour que ses blessures pussent être soignées. Il transmit le pouvoir sur la<br />

Bretagne à son neveu Kystennin [Constantin], fils de Kador de Cornouailles. Ce fut en l’an 542 de l’Incarnation. » D’après l’une des Triades<br />

de l’Île de Bretagne, trois personnes survécurent à la bataille de Camlann : Morvran, fils de Tegid et de Keridwen (voir Le Cycle <strong>du</strong> Graal,

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