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La mort du Roi Arthu..

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culpabilité de <strong>La</strong>ncelot, Bohort s’efforça néanmoins de calmer ses angoisses.<br />

« Reine, dit-il, je ne sais quel chevalier t’a tenu semblables propos sur <strong>La</strong>ncelot, mais je considère<br />

ceux-ci comme offensants. Quand bien même ce bavard-là serait l’homme le plus loyal <strong>du</strong> monde, il<br />

méconnaît sûrement la vérité en se montrant si péremptoire. Quant à moi, je sais <strong>La</strong>ncelot doté d’un cœur<br />

si noble que, pour rien au monde, il ne voudrait agir de la sorte. Nomme-moi donc celui qui le calomnie<br />

si étourdiment. – Tu n’en sauras pas davantage sur lui, répondit la reine. Je puis seulement t’affirmer que<br />

<strong>La</strong>ncelot ne sera plus jamais en paix avec moi. – J’en suis d’autant plus navré, reprit Bohort, que, si tu as<br />

conçu une haine si inexpiable envers mon cousin, mes parents et moi-même n’avons plus rien à faire ici.<br />

Je prends donc congé de toi, reine, au nom de mon frère et de mes cousins, et je te recommande à Dieu.<br />

Dès demain, nous nous mettrons en route et irons à la recherche de <strong>La</strong>ncelot jusqu’à ce que nous le<br />

retrouvions, s’il plaît à Dieu. Puis, cela fait, nous resterons dans la contrée où il demeure, nous mettant au<br />

service d’un homme de haut rang susceptible de mériter notre estime. Et si mon cousin ne veut plus vivre<br />

en ce pays-ci, nous traverserons la mer et regagnerons nos terres de Bretagne armorique, où nos hommes<br />

souhaitent depuis longtemps notre retour. Sache, reine Guenièvre, que, sans <strong>La</strong>ncelot, nous n’aurions pas<br />

séjourné si longtemps dans l’île de Bretagne, et que, sans toi, lui-même ne se serait pas tant attardé ici<br />

après la quête <strong>du</strong> Graal. Car, n’en doute pas, il t’a plus loyalement aimée que jamais chevalier n’aima<br />

dame ni demoiselle. »<br />

<strong>La</strong> fermeté de Bohort ébranla et bouleversa la reine au point qu’elle ne put d’abord retenir ses larmes.<br />

Et lorsqu’elle eut recouvré l’usage de la parole, ce fut pour maudire l’heure où lui était parvenue la<br />

nouvelle de sa disgrâce. « Je suis bien malheureuse », dit-elle enfin. Puis, regardant Bohort droit dans les<br />

yeux : « Bohort, demanda-t-elle, me laisseras-tu dans ce triste état ? – Il le faut », répliqua-t-il<br />

froidement. Et, sans ajouter un mot, il sortit de la chambre de Guenièvre.<br />

Allant aussitôt rejoindre son frère et Hector, il leur rapporta la conversation qu’il venait d’avoir avec<br />

la reine. Ils en furent fort attristés, et ils se demandaient, pleins d’angoisse, ce qu’il convenait de faire,<br />

prêts à maudire l’heure où <strong>La</strong>ncelot avait rencontré Guenièvre, quand Bohort, finalement, s’écria :<br />

« Prenons congé <strong>du</strong> roi et allons-nous-en. Il ne nous arriverait rien de bon si nous nous attardions<br />

davantage. Partons à la recherche de <strong>La</strong>ncelot et, quand nous l’aurons retrouvé, nous tenterons de<br />

l’emmener au royaume de Gaunes ou en celui de Bénoïc. Nous ne saurions mieux faire, à condition, bien<br />

sûr, que <strong>La</strong>ncelot puisse se passer de la reine. Hector et Lionel s’étant rangés à son avis, tous trois<br />

allèrent donc trouver le roi et lui demandèrent son congé pour aller en quête de <strong>La</strong>ncelot. <strong>Arthu</strong>r ne le leur<br />

accorda qu’à contrecœur, car il se plaisait à les avoir près de lui, Bohort surtout, dont la gloire, la vie,<br />

les prouesses surpassaient en éclat celles de tous les chevaliers <strong>du</strong> royaume. Aussi déplora-t-il fort de<br />

voir, le lendemain, les gens <strong>du</strong> lignage <strong>du</strong> roi Ban {25} quitter sa cour.<br />

Les voyageurs arrivèrent bientôt à Escalot, mais ils eurent beau y interroger les uns et les autres au<br />

sujet de <strong>La</strong>ncelot, personne ne put leur fournir le moindre renseignement. Et plus ils s’opiniâtraient, plus<br />

ils s’enquéraient de <strong>La</strong>ncelot, moins ils en savaient. Après avoir chevauché huit jours sans rien<br />

apprendre, ils finirent par se dire : « C’est en vain que nous nous fatiguons. <strong>La</strong>ncelot se trouve<br />

certainement dans une retraite dont il ne sortira que lorsque se présentera un événement digne de lui.<br />

Ainsi viendra-t-il sûrement au tournoi prévu à Dinas Emrys. C’est là que nous le retrouverons. » Et voilà<br />

comment ils se résolurent à aller l’attendre à Dinas Emrys, et à y demeurer le temps qu’il faudrait.<br />

Ils ignoraient évidemment que <strong>La</strong>ncelot se trouvait chez la tante <strong>du</strong> chevalier d’Escalot. À son arrivée<br />

là, il n’avait eu que la force de se coucher. <strong>La</strong> dame avait cependant mandé un vieux chevalier qui, logé<br />

tout près, faisait métier de soigner les blessures et y montrait plus de compétence que quiconque dans le<br />

pays. Après avoir examiné le blessé, il déclara se faire fort de le guérir avec l’aide de Dieu, mais la<br />

guérison demanderait <strong>du</strong> temps, vu la largeur et la profondeur de la plaie. De fait, <strong>La</strong>ncelot resta alité un<br />

grand mois, et dans un tel état de faiblesse que le chevalier d’Escalot s’attendait chaque jour à le voir

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