يسرية بلقاضي - Bibliothèque Centrale Université de Ouargla
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3.4 Le rire et le sérieux :<br />
Le rire a une profon<strong>de</strong> valeur <strong>de</strong> conception du mon<strong>de</strong> , c’est une <strong>de</strong>s<br />
formes capitales par lesquels s‘exprime la vérité sur le mon<strong>de</strong> , dans son<br />
ensemble, sur l’histoire, sur l’homme , c’est un point <strong>de</strong> vue particulier et<br />
universel sur le mon<strong>de</strong> qui perçoit ce <strong>de</strong>rnier différemment, mais <strong>de</strong> manière<br />
non moins importante (sinon plus) que le sérieux ; c’est pourquoi la gran<strong>de</strong><br />
littérature (qui pose d’autre part <strong>de</strong>s problèmes universels) doit l’admettre au<br />
même titre que le sérieux : seul le rire , en effet peut accé<strong>de</strong>r à certains<br />
aspects du mon<strong>de</strong> extrêmement importants.<br />
Bakhtine insiste sur la complexité du rire carnavalesque. C’est avant<br />
tout un rire <strong>de</strong> fête. Ce n’est donc pas une réaction individuelle <strong>de</strong>vant tel ou<br />
tel fait « drôle » isolé. Le rire carnavalesque est premièrement le lieux <strong>de</strong><br />
l’ensemble du peuple ( ce caractère populaire , nous l’avons dit, est inhérent<br />
à la nature même du carnaval), tout le mon<strong>de</strong> rit, c’est le rire « général ».<br />
Deuxièmement, il est « universel » il atteint toute chose et toutes gens, le<br />
mon<strong>de</strong> entier parait comique, il est perçu et connu sous son aspect risible.<br />
Troisièmement, ce rire est ambivalent ; il est joyeux , débordant d’allégresse,<br />
mais en même temps il est railleur , sarcastique , il nie et affirme à la fois,<br />
ensevelit et ressuscite à la fois.<br />
Il est nécessaire <strong>de</strong> mettre à côté <strong>de</strong> l’universalisme du rire son second<br />
trait distinctif c'est-à-dire son lieu indissoluble et essentiel avec la liberté.<br />
Nous avons vu que le rire chez Khadra était absolument extra-officiel. Dans<br />
la culture classique le sérieux est officiel, autoritaire, il s’associe à la<br />
violence, aux interdits et aux restrictions. Jamais le pouvoir ,la violence,<br />
l’autorité n’emploient le langage du rire.<br />
Donc le véritable rire, ambivalent et universel, ne récuse pas le sérieux<br />
,il le purifie et le complète. Il le purifie du dogmatisme, du caractère<br />
unilatéral, <strong>de</strong> la sclérose, du fanatisme et <strong>de</strong> l’esprit catégorique, <strong>de</strong>s<br />
éléments <strong>de</strong> peur ou d’intimidation, du didactisme, <strong>de</strong> la naïveté et <strong>de</strong>s<br />
illusions, d’une néfaste fixation sur un plan unique, <strong>de</strong> l’épuisement stupi<strong>de</strong>.<br />
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