pdf 11Mo - Atelier International du Grand Paris
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PENSER › II. UNE CROISSANCE PARADOXALE<br />
… et une panne <strong>du</strong> bien-vivre<br />
Cet affaiblissement de la performance francilienne s’accompagne d’une panne <strong>du</strong> bienvivre.Comme<br />
dans toutes les métropoles, le trait le plus visible et généralement mis en<br />
avant est la montée des inégalités sociales et spatiales. On l’a dit précédemment, dans le<br />
cas francilien, cet accroissement des inégalités apparaît surtout aux extrêmes <strong>du</strong> spectre<br />
social. La bipolarité Est/Ouest a pivoté et est marquée aujourd’hui par de forts contrastes<br />
entre le Sud-ouest et le Nord-est de la métropole. Mais surtout, on assiste, ces dernières<br />
années, d’un côté à un appauvrissement progressif des grands quartiers d’habitat social<br />
(les ZUS) et de l’autre à une spécialisation sociale renforcée des quartiers les plus riches.<br />
Mais la panne métropolitaine s’exprime par un phénomène nous semble-t il aussi alarmant :<br />
la métropole n’est plus attractive. Depuis les années quatre-vingt-dix, le solde migratoire<br />
est négatif, de façon pérenne. La métropole attire encore les jeunes, étudiants ou actifs<br />
débutants. Mais elle ne sait plus retenir, non seulement ses retraités mais aussi ses actifs<br />
des classes d’âge intermédiaires qui préfèrent la qualité de vie des grandes villes de province.<br />
Cette désaffection n’est pas compensée par l’attrait que représente toujours <strong>Paris</strong><br />
pour les migrants des pays pauvres.<br />
On le comprend aisément, ces deux pannes s’alimentent mutuellement : que deviendra<br />
à moyen terme l’économie de la connaissance propre à la métropole si elle ne trouve pas<br />
sur place ses techniciens de laboratoire ? Quel est l’avenir de la filière d’excellence des<br />
biotechnologies si dans le même temps le secteur hospitalier métropolitain est désorganisé<br />
par « l’évaporation » de dizaines de milliers d’infirmières ?<br />
Un facteur explicatif majeur : la dissociation entre les deux géographies<br />
de la métropole<br />
Les facteurs explicatifs de ces pannes métropolitaines sont multiples et tiennent pour une<br />
bonne part à des phénomènes socio-économiques a-territoriaux ou nationaux.<br />
Il en est pourtant un, majeur, qui tient à la spécificité de l’organisation et des transformations<br />
territoriales de la région-capitale : deux géographies de la métropolisation y sont de<br />
plus en plus distinctes.<br />
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freinent la mobilité résidentielle, la forme de la ville n’est pas la<br />
même. On dit donc aux architectes urbanistes qui ont <strong>du</strong> talent<br />
que l’on voudrait mettre l’accent sur la mobilité résidentielle. Si<br />
l’on se trouve dans un système où il y a des verrouillages sur<br />
les 3 types de freins à la mobilité résidentielle, ce sont d’autres<br />
types de ville et d’autres types de transports, d’autres systèmes<br />
qu’il faut développer pour que les métropoles soient efficaces et<br />
agréables à vivre. En Ile-de-France, il y a toujours cette volonté<br />
d’équilibrage au nom d’une équité territoriale, un équilibre qui va<br />
<strong>du</strong> centre à la périphérie, de l’est à l’ouest, etc… Tandis que dans<br />
votre réflexion, vous ne raisonnez pas en termes d’équité, mais<br />
toujours avec un souci de garder de la mixité malgré tout.<br />
Le problème de la mixité en Ile de France, ce n’est pas le<br />
problème des catégories sociales modestes et très modestes,<br />
c’est le problème de l’unipôle.<br />
La contradiction majeure pour l’Ile-de –France, c’est d’abord<br />
un mécanisme économique et social, à savoir que l’on a un<br />
nombre croissant de jeunes professionnels qui lèvent le camp,<br />
fuite qui est compensée par l’arrivée de nouveaux arrivants. Le<br />
problème de la fracture, de la mixité, évoqué tout à l’heure, ne<br />
se pose vraiment qu’entre les classes moyennes d’un côté et de<br />
l’autre le lumpenprolétariat qui arrive de façon croissante en<br />
Ile-de-France. C’est un problème politique. Depuis une quinzaine<br />
d’année on assiste à une arrivée massive d’immigrants d’origine<br />
d’Afrique Centrale.<br />
Voilà donc une question à prendre en considération lorsqu’un<br />
urbaniste souhaite mettre en place de la mixité.<br />
CDP : Oui, l’idée de mixité est très complexe en effet. Nous<br />
n’avons pas la prétention de dire qu’avec des plans on peut créer<br />
de la mixité, non. Mais dire que l’on peut créer des conditions qui<br />
évitent la privatisation de l’espace, dans des zones comme Val<br />
d’Europe, c’est possible. La mixité ne signifie pas qu’il y ait des<br />
riches et des pauvres ensemble, c’est une illusion. Mais on peut<br />
envisager des endroits où l’espace soit transformable, que rien<br />
ne soit ancré pour toujours, qu’il y ait <strong>du</strong> mouvement. La chose<br />
prodigieuse dans les centres urbains, c’est qu’il y a toujours eu<br />
<strong>du</strong> commerce foncier, et donc une possibilité de transformation.<br />
Mais en banlieue, dans les grandes périphéries <strong>du</strong> monde, on sait<br />
que les infrastructures routières et les résidences ont été conçues<br />
de telle manière qu’on ne voit pas comment transformer ces<br />
espaces.<br />
CHRISTIAN DE PORTZAMPARC Architecte-urbaniste, mandataire