Giannada 48pp (juin 2005) (Page 1) - Le Nouvelliste
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La légèreté des choses<br />
ÉCONOMIE DE MOYENS ET DISSOLUTION DE LA PÂTE COLORÉE<br />
■<br />
En 1954, de retour d’un<br />
voyage en Espagne, Nicolas<br />
de Staël s’installe à Antibes. Il<br />
prépare une exposition pour le<br />
musée Grimaldi et loue un atelier<br />
sur les remparts proches du<br />
musée. Il peint 350 tableaux en<br />
six mois dans lesquels il tente de<br />
retrouver la simplicité des grands<br />
maîtres, Vélasquez, Manet, Chardin,<br />
Matisse. Parmi cette vaste<br />
production des marines, des paysages<br />
et des ciels qu’il a sous ses<br />
yeux, il réalise une série d’«Ateliers».<br />
Ce «Coin d’atelier à Antibes»,<br />
avec ses étalements vaporeux<br />
de rouges, a probablement<br />
été réalisé au tampon d’ouate. La<br />
peinture s’épaissit à mesure que<br />
l’on se rapproche du premier<br />
plan. Par endroits, la toile laissée<br />
blanche lance des éclairs de<br />
Nicolas de Staël, La Lune, 1953, h/t, 162 x 97 cm , collection particulière.<br />
lumière. La maîtrise de la composition,<br />
à la fois très dépouillée<br />
et très solide, tient compte de la<br />
leçon de l’abstraction.<br />
La nature morte retient l’intérêt<br />
de Nicolas de Staël depuis 1952,<br />
tout comme le nu et le paysage,<br />
ces genres classiques de l’histoire<br />
de l’art. Ses premières natures<br />
mortes sont proches des «Compositions»<br />
mosaïquées des<br />
années précédentes. Il peint<br />
d’abord une série de pommes,<br />
par exemple ces «Cinq pommes»<br />
de 1952 présentes à Martigny.<br />
Puis viennent les bouteilles<br />
(«Bouteilles», 1952) et les fleurs.<br />
L’année suivante se place la série<br />
des ateliers peints à Antibes, avec<br />
leurs chaises, étagères, chevalet<br />
et une mise en scène de tous les<br />
outils du peintre. Ce motif très<br />
classique renvoie bien sûr à d’innombrables<br />
toiles célèbres de<br />
Vélasquez, Manet, Courbet,<br />
Matisse, etc.<br />
Au cours de ce travail, la matière<br />
se dissout, devient impalpable<br />
jusqu’à évoquer cette insoutenable<br />
légèreté des choses dont parle<br />
le poète. Une partie de l’enjeu<br />
consiste à garder la succession<br />
des plans, à suggérer la profondeur.<br />
La pâte épaisse des bouteilles<br />
de 1952 s’allège avec les<br />
ateliers, les bateaux ou les<br />
mouettes de 1955. L’exposition<br />
de Martigny se clôt avec le Nu<br />
couché de 1955, à la couleur lisse<br />
et pourtant si dense, que l’on<br />
mettra en comparaison avec les<br />
Etudes de nu au fusain. On<br />
retrouve cette économie de<br />
moyen dans les nombreux dessins<br />
au feutre ou à la plume qui<br />
prolongent et enrichissent cette<br />
rétrospective.<br />
VR<br />
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