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CATHOLIQUES ET PROTESTANTS SUR LA RIVE GAUCHE DU ...

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corps évangélique. Celui-ci fait parvenir deux requêtes à l’empereur sans que le sort des<br />

luthériens de Hüffelsheim ne s’améliore.<br />

Cet exemple nous montre combien le recours à la justice locale reste délicat, voire dangereux.<br />

Il rappelle le rôle essentiel des officiers locaux qui peuvent exercer tous types de contraintes<br />

afin d’empêcher le recours à une juridiction supérieure – sans parler de l’inefficacité d’une<br />

plainte auprès de la justice locale - et utiliser cette même justice afin de rendre la vie<br />

impossible à certains sujets. Au milieu du XVIIIe siècle, dans le comté de Sarrewerden, les<br />

catholiques pâtissent d’une justice partiale 1691 :<br />

« Lorsqu’il se présente quelques sujets du Comté de Nassau comme juridisciable par devant le<br />

S r Ludre, Bailli, avant de décider sur leurs contestations ou de statuer sur leurs demandes, il<br />

s’informe d’eux s’ils sont catholiques ou luthériens […] sa haine contre la Religion catholique<br />

est nottoire; N’obmettant rien pour la détruire dans leur juridiction en refusant aux catholiques<br />

les passations des contracts d’acquisition des Biens qu’ils acquièrent, ou en faisant exercer sur<br />

eux le Retrait par des Luthériens. Un fait est que le R. Père François Genin, Recteur des Jesuites<br />

du Colllège de Bouquenom ayant achetté au mois de mars 1745 une fauchée de prey située sur<br />

le Ban de harskirch, juridiction de Sarwerden Nassau, de Pierre Pastor, Catholique Bourgeois de<br />

Bouquenom. […] Et pendant le mois de juillet de la même anne, lorsque le R. Père Recteur<br />

voulut faire mettre la faux dans son prey, il en fut empeché par le S r Ludre […] qui dit avoir<br />

exercé le Retrait sur ce prey au profit du Prince son maître. Et sur les remontrances du R.P.<br />

Recteur luy fit que ce prey êtoit sur Bien de Roture et non susceptible de Retrait féodal, le juge<br />

luy repondit pour toute Raison qu’il n’êtoit lutherien, que par consequent il ne convenoit pas<br />

qu’il possedoit des Biens dans cette souveraineté » 1692 .<br />

Peut-être n’est-ce pas là un comportement que l’on peut étendre sans modération à l’ensemble<br />

des justices locales. Il n’y a pas un blocage systématique de l’appel, en dehors des territoires<br />

soumis à la règle du non appellando. Dans la seigneurie de Fénétrange, des luthériens ont<br />

mené leurs enfants se faire baptiser par les ministres du comté de Sarrewerden ; l’un d’eux,<br />

Jean Jacques Leuch, est condamné à l’amende en première instance par l’officier du prince de<br />

Salm qui lui accorde cependant l’autorisation de faire appel à la Chambre impériale 1693 .<br />

L’enjeu autour des justices locales est de premier ordre ; la lutte pour accéder aux fonctions<br />

de justice constitue un pas essentiel pour la reconnaissance officielle de sa confession ainsi<br />

qu’elle offre la possibilité d’assurer une justice plus équitable. C’est la question de la parité<br />

dans les institutions qui est ici posée. Dans la province d’Alsace, les Français ont vite saisi<br />

l’enjeu en ordonnant de peupler les cours de justice par des catholiques. Ici et là apparaissent<br />

des récriminations de sujets dont la confession n’a pas de représentants en justice 1694 . Il<br />

faudrait enquêter sur le poids des justices locales dans la coexistence confessionnelle car il y a<br />

là un élément déterminant du quotidien de ces hommes et de ces femmes. Quoi qu’il en soit,<br />

même une forte personnalité locale a une influence limitée et le recours, l’appel, à une<br />

instance supérieure existe toujours, quelque difficile soit-elle. Pour les terres d’Empire<br />

1691 Un rapport de 1752 mentionne que « depuis 3 ou 4 ans dans la plupart des endroits ces juges contraignent les<br />

femmes catholiques de se servir de sage-femmes luthériennes qu’ils leur proposent, ce qui est contraire a toutes<br />

les ordonnances des evesques […] a la liberte et a la raison qui veuillent que ces personnes soient choisies a la<br />

pluralité des voix et prettent serment entre les mains de leurs curés. La contrainte des juges de nassau peut<br />

mesme avoir les suittes les plus funestes plus facilles à penser qu’a descrire, la même chose arriva aux israelites<br />

en Egypte par les ordres de pharaon » (ADMM Ms 149 fol. 68v).<br />

1692 ADM 29 J 103.<br />

1693 ADMM B 694 n°8.<br />

1694 A Oberrotterbach (seigneurie de Guttenberg), en 1715, le P. Johannes Maria dénonce le fait que tous les<br />

officiers de justice locale sont luthériens et qu’il n’y ait pas un seul catholique. Le 11 mars 1718, d’Angevilliers<br />

indique qu’il doit y avoir une alternance entre les officiers des deux confessions (BOMBERGER, op. cit., p.<br />

200).<br />

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