Remacle par lui-même (1960). Extrait de " L’Encyclopédie Spirou " (Mini-récit n o 16) © Dupuis / Remacle Remacle dans sa bibliothèque. Gag de Poche n o 51 : " La forêt silencieuse " (1966). Texte d’Yvan Delporte. - © Dupuis 14
De toute évidence, Remacle savait rire et se montrer amical, mais le tableau était loin d’être idyllique, comme en témoigne Yvan Delporte : « Remacle n’était pas très liant. Je me souviens que Franquin, par gentillesse, lui avait vanté les mérites d’un modèle de plume à dessin. Remacle avait suivi son conseil pour ensuite venir se plaindre auprès de moi en grommelant : « Les plumes de Franquin, ça ne me convient pas du tout ! Pourquoi m’a-t-il conseillé un matériel pareil ?! » C’était ça, Remacle, toujours un peu méfiant. » (10) Quand Remacle est entré en 1955 au studio de dessin et de lettrage des éditions Dupuis, Maurice Rosy y travaillait en qualité de « donneur d’idées », avant d’en assumer la direction un an plus tard : « J’ai toujours trouvé, dit-il, que Remacle était un homme pessimiste et inquiet, perpétuellement en quête de reconnaissance pour son travail. Cette reconnaissance, il ne l’attendait pas seulement de son public, mais aussi des autres dessinateurs du journal Spirou, avec lesquels il aurait voulu établir des relations d’équivalence. Il a dû souffrir, à mon avis, de se sentir en retrait par rapport à des gens comme Franquin ou Peyo, qui étaient beaucoup moins réservés que lui. Son inquiétude obsessionnelle pouvait le rendre agressif, et ses relations avec ses confrères n’ont pas toujours été harmonieuses, c’est vrai. Marcel Denis, qui le fréquentait beaucoup et qui était, lui, extrêmement gentil, faisait un peu contrepoids, il « amortissait » en quelque sorte le côté acide de Remacle. Morris, lui, s’en accommodait plutôt bien. J’irais même jusqu’à dire qu’il aimait ça ! » (13) « Il n’était pas sociable, raconte Walthéry, il parlait peu mais il était capable de lâcher des plaisanteries douteuses, d’un parfait mauvais goût, des choses qui pouvaient faire rire – d’ailleurs moi j’aimais bien ! – mais qui ne tombaient peut-être pas toujours au bon moment. Je sais qu’il y a des dessinateurs qui n’aimaient pas trop ça… » (17) Parmi les auteurs qui ont bien connu Marcel Remacle, quatre au moins semblent avoir entretenu avec lui des relations privilégiées. Morris, bien sûr, dont nous venons de parler, qui le fascinait par l’élégance et le dynamisme de son style. Subjugué par son habileté graphique hors du commun, Remacle subit son influence à un point tel qu’il lui arriva même de collaborer avec lui, les Dalton s’en souviennent encore… Maurice Tillieux, ensuite, dont il appréciait beaucoup la compagnie et qui lui écrivit plusieurs scénarios (parfois de façon anonyme), dont le plus remarqué fut « La prise de Canapêche », monument de drôlerie et seizième album des aventures du Vieux Nick et de Barbe-Noire. Puis vient Marcel Denis, bien sûr, son complice et collaborateur à qui il confia l’encrage de sa série Hultrasson le Viking et le dessin d’un unique épisode de Tif et Tondu se déroulant, lui aussi, en milieu maritime. Nous allons y revenir. Mais il y a aussi – et surtout, serait-on tenté de dire – Vittorio Leonardo, un artiste polyvalent que l’on ne présente plus, qui reprit un jour Hultrasson pour un unique 15