Extrait du synopsis de l’émission " La bande à Bédé " n o 79 (vers 1984) © France Télévision / Remacle 52
en 1959 dans « Les mangeurs de citron ». Après s’être attardé sur le sort des enfants employés comme mousses, il se penche sur le sort diamétralement opposé des jeunes aspirants issus de la noblesse, véritables enfants-rois aussi autoritaires que capricieux, suscitant la crainte des membres de l’équipage. Son exposé se termine par un condensé d’ingénierie navale, le tout baignant dans un humour débridé qui ne perd jamais ses droits. Sévère à l’extérieur, comique à l’intérieur : voilà qui résume Remacle en quelques mots. Commentés par Barbe-Noire lui-même, ces documentaires cocasses seront réunis dans un album qui figure parmi les préférés du dessinateur et qui sera publié l’année suivante : « Sous les voiles ». C’est dans ce même album qu’apparaît un personnage destiné à pourrir davantage encore la vie de notre pirate, un exécrable nabot nommé Hercule qui, à l’instar du Billy the Kid de Morris et Goscinny, règne en tyran sur une bourgade où Barbe-Noire et son grand-père veulent prendre quelques jours de repos. Estimant peut-être que « bon-papa joli » a épuisé son stock de baffes, Remacle met dans les pattes du « gamin » un petit teigneux beaucoup plus costaud et autoritaire que l’aïeul. Perfide et manipulateur, Hercule deviendra le compagnon de cellule de Barbe-Noire, élaborant des projets d’évasion plus foireux les uns que les autres, avec la complicité de sa « tantine », aussi difforme et repoussante que lui et qui, un malheur n’arrivant jamais seul, va s’enticher d’un Barbe-Noire qui n’avait décidément pas besoin de ça. Les déboires pénitentiaires de ce trio infernal font l’objet de plusieurs histoires courtes que l’on retrouve en majorité dans l’album « Barbe-Noire, Hercule et Cie » (1981). Le calme et la tempête En 1980, Marcel Remacle quitte Haltinne pour s’installer définitivement à Evelette, un petit hameau situé dans la commune d’Ohey, à quelques kilomètres de là. Lucide, il se rend compte que ses efforts pour relancer sa série sont resté vains : les ventes continuent à baisser inexorablement. Malgré sa notoriété et l’estime que lui garde un lectorat resté fidèle, Remacle sait qu’il n’entrera jamais dans la cour des grands. Est-il pour autant tombé dans l’oubli ? Loin de là : nul n’étant prophète en son pays, c’est une fois encore à l’extérieur de nos frontières que se manifeste l’intérêt pour son œuvre. La chaîne de télévision française Antenne 2 produit, dans les années 80, une émission pour enfants appelée « Récré A2 ». Animée par la célèbre Dorothée, elle propose une rubrique consacrée aux vedettes du neuvième art, intitulée « La bande à Bédé ». Pour leur 79e numéro, les producteurs décident de rendre hommage au vieux Nick et contactent Marcel Remacle, qui leur donne bien évidemment le feu vert. « Jamais je n’aurais accepté de passer à la TV, dira-t-il, je suis bien trop timide… » (4) Fort heureusement, il ne s’agit pas ici de placer l’auteur devant les caméras, mais de réaliser une semi-animation au départ de la bande dessinée elle-même, avec chansons à la clé. Cinq albums, savamment refondus en une séquence de 10 minutes à peine, vont en fournir la matière première : « Pavillons noirs », « Le vaisseau du diable », « Les mangeurs de citron », « L’île de la Main Ouverte » et « Barbe-Noire, Hercule & Cie ». Un tour de force que Remacle saluera d’un commentaire plus que laconique : « Ils se sont foulés. » (4) 53