L'Agence Européenne pour la Sécurité Maritime - EM Normandie

Dans cette étude, les formes d’interprétation du monde doivent s’appréhender à échelle
mondiale, et les fonctions de construction du compromis social s’organisent à échelle de l’UE.
La première étape est alors de saisir un référentiel global qui reprend toutes les échelles
géographiques de notre analyse et de fait une plus grande multitude d’acteurs. Rappelons que
les acteurs ont un rôle crucial dans la création de ces référentiels : le global est la résultante
des élites dirigeantes, à la différence du sectoriel, issus des opérateurs opérationnels (Müller et
Jobert, 1987).
Depuis les années 1980, le référentiel global sur lequel est fondée la vision de la société est
organisé autour de principes néolibéraux, ce que Müller nomme le « référentiel de marché ».
Ce référentiel est communément accepté, pourtant, il ne représente pas une logique unique.
Par exemple, pour la question maritime, certains garde-fous demeurent à échelle
internationale ou sont recherchés pour encadrer ce principe de marché et son autorégulation.
Ainsi, dans un contexte de croissance économique recherchée, le cadre sociétal et
environnemental qui caractérise le référentiel global en matière de transport maritime est
marqué par quatre grandes représentations.
Premièrement, les grandes catastrophes maritimes à l’échelle internationale, le Titanic et
d’autres, puis, les marées noires : le Torrey Canyon en 1967, l’Amoco Cadix 1978, l’Exxon
Valdez en 1989, l’Erika en 1999, le Prestige en 2002, etc.- paraissent de plus en plus
inacceptables. Deuxièmement, les pavillons de complaisance sont très souvent perçus comme
des formes de délocalisation dans le but d’une exploitation abusive. Dans ce contexte, les
multinationales sont vues comme ayant un pouvoir d’action illimité voire immoral. Enfin, la
prise en compte pour l’environnement et l’intérêt croissant pour celui-ci se traduisent par une
conscience commune. Ces représentations imposent des gardes-fous, d’une part pour limiter
ces visions négatives qui pourraient nuire au secteur, d’autre part pour réglementer certains
aspects maritimes dans le but de diminuer les risques que la navigation fait peser sur
l’environnement. Ainsi, la réglementation ou, de manière plus générale les garde-fous, ne sont
pas forcément contraires au développement économique et à la croissance.
Un dernier élément est à considérer, le rôle de nouveaux acteurs : citoyens, affréteurs, etc. En
guise d’exemple, l’Erika a changé le contexte : dans le milieu opérationnel, la procédure de
veting soit, inspecter le navire avant son chargement devient une condition pour affréter, tout
comme l’âge du navire, les demandes de certification, etc. Ces normes sont édictées par les
expéditeurs, donc les affréteurs, pour se couvrir en termes d’image car la représentation
commerciale est cruciale pour les expéditeurs.
C’est au sein de telles représentations, en partie contradictoires, que les discussions à l’origine
de la création d’une agence de sécurité maritime s’organisent en Europe. La volonté d’une
économie de marché forte, en autres dans le domaine maritime, se mêle à la volonté d’agir en
matière de sécurité maritime, suite au naufrage de l’Erika.
Ces caractéristiques du référentiel global sont à saisir avant d’appréhender le référentiel
sectoriel.
2.2.3. Les référentiels européen et du secteur maritime
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La création de l’agence traduit deux référentiels sectoriels qui s’enchevêtrent, comme nous
allons le voir. Ceux-ci interagissent entre eux et, respectivement, avec le référentiel global.