L'Agence Européenne pour la Sécurité Maritime - EM Normandie
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d’interprétation du monde s'attache à montrer qu’il n’y a pas d'action publique sans<br />
référentiels (Müller, 2000 : 189-208). Ces derniers désignent les normes, les représentations et<br />
croyances partagées par des acteurs qui agissent collectivement. De fait, un référentiel est un<br />
construit ; soit <strong>la</strong> perception de <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce d’un secteur donné dans <strong>la</strong> société. Jobert et Müller<br />
(1987 : 65-) distinguent alors trois types de référentiels : le référentiel global, le référentiel<br />
sectoriel et des éléments d’intégration du référentiel sectoriel au global. Le référentiel global<br />
délimite des valeurs, normes et re<strong>la</strong>tions causales qui composent un cadre cognitif et normatif<br />
<strong>pour</strong> les acteurs engagés dans <strong>la</strong> confrontation de leurs intérêts, il permet alors de dépasser en<br />
partie <strong>la</strong> situation d’hyperchoix, celle-ci étant définie comme le « choix entre options qui ne<br />
relèvent pas du même espace de sens » (Müller, 2005 : 162).<br />
D’autre part, cette approche permet d’inclure les re<strong>la</strong>tions causales. En effet, d’après <strong>la</strong><br />
définition des politiques publiques donnée par Müller, l’objet d’une politique publique revient<br />
à gérer le rapport global/sectoriel (« RGS »). En d’autres termes, une politique publique est<br />
une tentative d’ajustement entre <strong>la</strong> représentation d’un secteur donné et celle de <strong>la</strong> société<br />
<strong>pour</strong> réduire les désajustements sociaux (Jobert et Müller, 1987). Le RGS est l’objet des<br />
politiques publiques, et <strong>la</strong> variable déterminante dans les conditions d’é<strong>la</strong>boration de ces<br />
dernières (Müller, 1990 : 25). Car, du point de vue du gouvernement de <strong>la</strong> société, l’objet<br />
d’une politique publique est toujours d’influencer <strong>la</strong> transformation du secteur donné, <strong>la</strong><br />
freinant ou l’accélérant et créant d’autres déca<strong>la</strong>ges entre les secteurs (Müller, 2005 : 156).<br />
Précisions ici que c’est <strong>la</strong> fragmentation de <strong>la</strong> société suivant diverses configurations<br />
d’acteurs (secteurs, communautés diverses) qui nécessite le problème de <strong>la</strong> régu<strong>la</strong>tion<br />
politique (Müller, 2005 : 160). Le secteur est alors défini comme un groupement de rôles<br />
sociaux qui sont organisés suivant une logique de fonctionnement propre, généralement<br />
professionnelle 3 .<br />
Müller décompose ensuite toute politique en 3 processus :<br />
- tenter de gérer le secteur par rapport à <strong>la</strong> société globale (RGS),<br />
- évaluer si ce RGS peut faire l’objet d’une action publique en fonction des<br />
représentations des acteurs concernés (ce que Müller nomme le référentiel),<br />
- déterminer l’acteur ou le groupe d’acteurs qui influence <strong>la</strong> transformation du RGS,<br />
nommé médiateurs par Müller, dont <strong>la</strong> position est stratégique dans l’ensemble du<br />
processus de décisions.<br />
Nous considérons ici les critiques de Palier et Surel qui expliquent qu’il est souvent difficile<br />
de repérer un groupe homogène d’acteurs (2005 : 18). Nous préférons considérer a priori des<br />
influences plurielles tout en tentant, a posteriori de repérer ce que Müller nomme les<br />
« médiateurs ». D’ailleurs, Müller lui-même considère <strong>la</strong> complexité du rôle des acteurs dans<br />
<strong>la</strong> création des matrices normatives et cognitives (Müller, 2000 : 199). A ce titre, le concept<br />
de médiateurs renvoie à des acteurs capables de faire le pont entre deux configurations, deux<br />
univers de sens <strong>pour</strong> lier deux espaces d’actions et de production de sens particulier : le global<br />
et le sectoriel (Müller, 2005 : 183).<br />
En outre, dans l’analyse cognitive des politiques publiques, « même si les matrices cognitives<br />
sont produites par l’interaction d’individus-acteurs, elles tendent à s’autonomiser par rapport à<br />
leur processus de construction et à s’imposer aux acteurs comme modèles dominants<br />
d’interprétation du monde » (Müller, 2000 : 194). Ainsi, le point de départ de l’analyse<br />
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3 Ainsi, l’industrie maritime constitue un secteur et <strong>la</strong> création de l’AESM a <strong>pour</strong> but de modifier <strong>la</strong> prise en<br />
compte de l’environnement et du risque dans le transport maritime. Et, <strong>la</strong> création de l’AESM résulte bien d’une<br />
politique publique puisqu’une autorité, ici supranationale, cherche à « modifier l’environnement culturel, social<br />
ou économique des acteurs sociaux saisis en général dans une logique sectorielle » par le biais « d’un<br />
programme d’action coordonné ».