Les Jeux du Val-de-Marne - Conseil général du Val-de-Marne
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TRIBUNES 41<br />
débattre en val-<strong>de</strong>-marne<br />
GROUPE<br />
VAL-DE-MARNE<br />
AUTREMENT<br />
Le <strong>Conseil</strong> général hors-la-loi<br />
Catherine Procaccia<br />
<strong>Conseil</strong>lère générale<br />
Canton <strong>de</strong> Vincennes Ouest<br />
Membre <strong>de</strong> la commission <strong>de</strong><br />
l’enseignement et <strong>de</strong> la formation<br />
au <strong>Conseil</strong> général<br />
Sénatrice <strong>du</strong> <strong>Val</strong>-<strong>de</strong>-<strong>Marne</strong><br />
Face aux revendications syndicales <strong>de</strong> son personnel qui refuse <strong>de</strong> se voir appliquer le principe d’un jour <strong>de</strong> carence en cas<br />
d’arrêt maladie, le prési<strong>de</strong>nt <strong>du</strong> <strong>Conseil</strong> général et l’exécutif départemental ont décidé <strong>de</strong> passer outre. La journée <strong>de</strong> carence<br />
correspond, en début d’arrêt maladie, au laps <strong>de</strong> temps <strong>du</strong>rant lequel le salarié n’est pas in<strong>de</strong>mnisé. Depuis le 1 er janvier<br />
2012, l’ensemble <strong>de</strong>s fonctionnaires est concerné. Cette situation inédite met la collectivité en infraction.<br />
© A. BAChellier<br />
Efficace sur l’absentéisme<br />
Mise en place par le gouvernement Fillon,<br />
l’instauration pour les fonctionnaires d’un<br />
jour <strong>de</strong> carence est la transposition ré<strong>du</strong>ite<br />
<strong>de</strong> ce qui s’applique dans le privé où les<br />
salariés sont, eux, assujettis à trois journées<br />
non payées en cas <strong>de</strong> congés maladie.<br />
La mesure, <strong>de</strong>stinée à limiter les inégalités<br />
entre le secteur privé et le public mais aussi<br />
à lutter contre l’absentéisme, s’est révélée<br />
efficace dans <strong>de</strong>s collectivités comme dans<br />
la fonction publique hospitalière.<br />
Des résultats probants pour la Fédération<br />
hospitalière <strong>de</strong> France, qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une<br />
évaluation sérieuse <strong>de</strong> son impact avant <strong>de</strong><br />
la modifier. Une enquête réalisée auprès <strong>de</strong>s<br />
établissements <strong>de</strong> santé a enregistré un<br />
recul <strong>de</strong> 7 % <strong>de</strong> l’absentéisme pour 127 000<br />
jours <strong>de</strong> carence, soit une ré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s<br />
dépenses <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 10,4 millions d’euros.<br />
Dans le <strong>Val</strong>-<strong>de</strong>-<strong>Marne</strong>, un hôpital estime que<br />
le jour <strong>de</strong> carence a ré<strong>du</strong>it <strong>de</strong> 20 % l’absentéisme,<br />
permettant d’économiser 4 600 jours<br />
<strong>de</strong> travail pour 2 400 agents et 150 000 euros<br />
par an.<br />
La perspective d’une future remise en cause<br />
<strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> gestion génère un climat <strong>de</strong><br />
méfiance et perturbe l’organisation <strong>de</strong>s collectivités<br />
et hôpitaux.<br />
En coulisse, nombreux maires et prési<strong>de</strong>nts<br />
<strong>de</strong> conseils généraux et régionaux <strong>de</strong><br />
gauche se félicitaient <strong>de</strong> cette disposition,<br />
qui leur permettait <strong>de</strong> mieux gérer leurs<br />
collectivités.<br />
<strong>Les</strong> faux prétextes <strong>du</strong> conseil général<br />
<strong>du</strong> <strong>Val</strong>-<strong>de</strong>-<strong>Marne</strong><br />
Lors d’une commission permanente en<br />
novembre 2012, le groupe UMP découvre<br />
avec surprise que l’exécutif départemental<br />
n’a appliqué le jour <strong>de</strong> carence qu’à partir <strong>de</strong><br />
juillet 2012.<br />
Sur un an d’existence <strong>de</strong> la loi, notre collectivité<br />
l’a respectée avec six mois en retard<br />
et décidé <strong>de</strong> sa suspension dès le 1 er décembre.<br />
Raison évoquée par Christian Favier : « Nous<br />
ne l’appliquons pas car nous attendons que<br />
la loi soit abrogée. »<br />
Une réponse incroyable pour celui qui est<br />
aussi, tout comme moi, un législateur.<br />
Le gouvernement complice<br />
Cette disposition, qui s’appliquait à l’ensemble<br />
<strong>de</strong>s 5,2 millions <strong>de</strong> fonctionnaires, <strong>de</strong>vait<br />
permettre 120 millions d’euros d’économies<br />
à l’État. <strong>Les</strong> retards d’entrée en vigueur dans<br />
certains ministères ou collectivités comme<br />
notre Département expliquent en partie que<br />
seulement 60 millions d’euros soient comptabilisés.<br />
60 millions : une goutte d’eau aux yeux <strong>du</strong><br />
gouvernement socialiste : « L’impact budgétaire<br />
<strong>du</strong> jour <strong>de</strong> carence est très limité »… et<br />
ne mérite pas la grogne <strong>de</strong>s syndicats <strong>de</strong><br />
fonctionnaires !<br />
Début février 2013, la ministre <strong>de</strong> la Fonction<br />
publique, Marylise Lebranchu, a annoncé<br />
sa volonté d’abroger le jour <strong>de</strong> carence,<br />
comme si les finances <strong>de</strong> l’État et <strong>de</strong>s collectivités<br />
pouvaient se permettre <strong>de</strong> faire fi<br />
d’économies tangibles.<br />
Mais seule une loi peut abroger une autre<br />
loi et c’est donc dans le prochain budget que<br />
le gouvernement et sa majorité reviendront<br />
sur la disposition… sauf si, entre-temps, il<br />
change encore d’avis : les couacs gouvernementaux<br />
font partie <strong>du</strong> quotidien !<br />
En attendant, la ministre a donné en quelque<br />
sorte l’absolution à tous les contrevenants<br />
en ne répondant pas à la question que je lui<br />
posais ce 26 mars. Ce mutisme tra<strong>du</strong>it clairement<br />
l’embarras <strong>du</strong> gouvernement quand<br />
sa ministre <strong>de</strong> la Santé estime, « qu’il serait<br />
souhaitable que tout le mon<strong>de</strong> soit logé à la<br />
même enseigne ».<br />
Si chacun d’entre nous décidait <strong>de</strong> faire <strong>de</strong><br />
même, nous pourrions ne pas payer une<br />
augmentation <strong>de</strong>s impôts, en espérant que<br />
l’État modifie le taux, circuler sur les voies<br />
en sens unique en attendant que la ville en<br />
change le sens, ou faire voter les mineurs<br />
dans l’attente que l’âge <strong>du</strong> vote soit abaissé !<br />
Drôle <strong>de</strong> conception <strong>de</strong> la légalité.<br />
Cette situation me scandalise : pour moi,<br />
comme pour notre groupe « le respect <strong>de</strong> la<br />
loi n’est pas une option ».<br />
Qui va payer ?<br />
Nous, contribuables <strong>du</strong> <strong>Val</strong>-<strong>de</strong>-<strong>Marne</strong>, payons<br />
déjà le surcoût <strong>du</strong> maintien <strong>de</strong> cette rémunération<br />
: en <strong>de</strong>ux mois, 1 890 jours d’arrêt<br />
maladie ont été recensés pour un montant<br />
total <strong>de</strong> 128 000 euros. Calcul rapi<strong>de</strong> : c’est<br />
768 000 euros <strong>de</strong> per<strong>du</strong>s sur un an !<br />
Sans compter qu’en payant le personnel dès<br />
le premier jour d’arrêt maladie, la collectivité<br />
s’expose à <strong>de</strong>s sanctions qui seront imputées<br />
et payées… par nous, <strong>Val</strong>-<strong>de</strong>-Marnais !<br />
Cette situation montre la complaisance <strong>du</strong><br />
gouvernement envers les collectivités <strong>de</strong> sa<br />
couleur politique, sa faiblesse vis-à-vis <strong>de</strong>s<br />
revendications <strong>de</strong> ceux qui l’ont élu et qui<br />
sont déçus par son inaction.<br />
Cette remise en cause <strong>de</strong>s fonctions régaliennes<br />
est aussi grave qu’elle est préoccupante<br />
pour l’avenir <strong>de</strong> l’État et <strong>de</strong> notre pays. ■<br />
www.catherine-procaccia.com<br />
@cprocaccia<br />
val<strong>de</strong>marne-autrement.fr<br />
le magazine <strong>du</strong> conseil général • N°301 • MAI 2013