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Fr-03-07-2013 - Algérie news quotidien national d'information

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Analyses &<br />

Décryptages<br />

La rédaction d'Algérie News propose une<br />

nouvelle rubrique dédiée à l'analyse et au<br />

décryptage de l'actualité qui nous concerne<br />

et qui nous entoure.<br />

Nous lançons un appel à tous ceux et toutes<br />

celles qui veulent y contribuer à travers des<br />

articles ou des propositions. Vos contributions<br />

seront les bienvenues.<br />

Contact : ayachi<strong>news</strong>@yahoo.fr<br />

11<br />

Gouvernance en Algérie<br />

La nature<br />

a horreur<br />

du videPar Abderrahmane<br />

Mebtoul<br />

Il serait malhonnête de ne pas reconnaître que<br />

la situation économique et sociale de l’Algérie,<br />

ne correspond pas à ses potentialités et elles<br />

sont énormes, matérielles et surtout<br />

humaines, richesse bien plus importante que<br />

toutes les ressources en hydrocarbures.<br />

Lire > pages 12 - 13<br />

Paranoïde<br />

L’appartheid<br />

de la mémoire<br />

Par : Sarah<br />

Haidar<br />

On le sait :<br />

l’Algérie a saigné<br />

autant dans<br />

sa chair que<br />

dans sa matière<br />

grise pendant<br />

cette décennie sanguinaire qui érigea la<br />

tuerie en pratique religieuse. Si la<br />

mémoire collective tend à oublier les<br />

anonymes, les entassant dans un simple<br />

chiffre sans visage, elle s’acharne<br />

chaque année à évoquer les intellectectuels,<br />

scientifiques et artistes flingués<br />

au détour d’une opinion libre. Les<br />

Tahar Djaout, Saïd Mekbel, Alloula,<br />

Medjoubi, Lyabès, et tant d’autres<br />

n’ayant pu céder au chantage de la<br />

peur, ont choisi la pensée libre et l’art<br />

tout en sachant qu’en ces années où le<br />

silence était le chemin le moins direct<br />

vers la mort, la parole, elle, les conduisait<br />

tout droit six pieds sous terre.<br />

On s’en souvient régulièrement, on<br />

sort cette longue liste morbide pour<br />

lutter contre l’amnésie et rappeler que<br />

le pays n’a pas seulement perdu des<br />

milliers de vies humaines mais aussi<br />

des lumières et des intelligences irremplaçables.<br />

Néanmoins, dans cette évocation<br />

qui s’essouffle année après<br />

année, on oublie souvent un nom, et<br />

pas des moindres...<br />

Peut-être parce qu’il fut arabophone?<br />

Incompris? Marginal? N’ayant<br />

jamais intégré la grande cour et les<br />

salons étroits de l’intelligentsia<br />

urbaine?<br />

Lui, c’est Bakhti Benaouda, universitaire,<br />

libre-penseur et poète assassiné<br />

en 1995 à Oran alors qu’il assistait à un<br />

match de foot dans son quartier.<br />

Il est vrai que cet esprit alerte et<br />

merveilleusement éclairé n’a pu aboutir<br />

à une reconnaissance d’envergure<br />

pour la simple raison qu’il fut abattu à<br />

l’âge de 35 ans. Mais, en dépit de l’absence<br />

d’ouvrages et de recherches<br />

autour de son travail, l’université et<br />

notamment la pensée philosophique<br />

algérienne lui doivent beaucoup.<br />

Bakhti Benaouda a ce mérite<br />

d’avoir posé la question de la modernité<br />

et de la post-modernité ainsi que<br />

le débat sur l’identité culturelle, à<br />

l’heure où l’Algérie et ses intellectuels<br />

essayaient tant bien que mal de résister<br />

à l’islamisme par une production de<br />

l’urgence et des oeuvres, certes courageuses<br />

et nobles, mais toujours associées<br />

au conjoncturel. Lui, ne semblant<br />

nullement se soucier de son devenir<br />

d’homme, encore moins de la souillure<br />

du sang maculant la liberté de l’esprit,<br />

il a tenté de construire une base de lancement<br />

pour un pays moderne, apaisé<br />

et capable, sans le moindre complexe,<br />

d’apporter sa contribution au savoir<br />

universel.<br />

Réfléchissant et écrivant en marge<br />

du monde et de ses terreurs, il disait:<br />

«La modernité est un instant intellectuel<br />

affranchi de l’identité absolue et<br />

pariant sur le rationnel. Une modernité<br />

qui transmute l’individu de l’individualisme<br />

vers la citoyennté, du paranormal<br />

vers la réalité, afin d’en faire le<br />

maître du destin et du possible, dans<br />

une lucidité antagonique avec l’establishement».<br />

Et à propos de la production<br />

littéraire algérienne, il s’indignait déjà<br />

du pullulement du slogan au détriment<br />

de la création et de la réinvention<br />

du monde. En cette période où intellectuels<br />

et artistes dans leur grande<br />

majorité s’imposaient de choisir un<br />

camp idéologique pour signifier leur<br />

«opposition» à l’obscurantisme,<br />

Benaouda refusait de compartimenter<br />

sa pensée, de verser dans le clanisme ou<br />

l’inféodation intellectuelle d’où qu’elle<br />

vienne.<br />

Viendra peut-être le<br />

jour où tous ces clivages<br />

et incompétences<br />

crèveront dans la fosse<br />

des idéologies<br />

infécondes, et où la<br />

pensée du philosophe<br />

assassiné pourra enfin<br />

s’apprécier à sa juste<br />

valeur.<br />

18 ans après sa mort, il est très rare<br />

que le pays évoque cet esprit lumineux<br />

si ce n’est pour l’inclure dans la<br />

fameuse liste, ou bien le célébrer d’une<br />

manière tragiquement superficielle<br />

tant son oeuvre reste inaccessible aux<br />

professionnels des commémorations<br />

creuses. L’Algérie mais aussi sa «francophonie»<br />

qui semble oublier que la<br />

langue arabe n’a pas donné que des<br />

idéologues inspides et des écrivains à la<br />

petite semaine, et qui se complait souvent<br />

dans un mépris non-dit envers<br />

cette langue, sans doute parce que ses<br />

utilisateurs n’avaient pas accès au<br />

lobby médiatique d’outre-mer!<br />

L’Algérie mais aussi ses «arabophones»<br />

qui, sciemment ou inconsciemment,<br />

veulent confiner Bakhti<br />

Benaouda, l’universel et l’intemporel,<br />

dans le seul périmètre géographique<br />

du «Monde arabe»...<br />

Viendra peut-être le jour où tous<br />

ces clivages et incompétences crèveront<br />

dans la fosse des idéologies infécondes,<br />

et où la pensée du philosophe assassiné<br />

pourra enfin s’apprécier à sa juste<br />

valeur. L’inestimable valeur d’une<br />

modernité rêvée, réfléchie, esquissée et<br />

n’attendant que d’être parachevée dans<br />

sa pleine magnifiscence.<br />

S. H<br />

ALGERIE NEWS Mercredi 3 juillet <strong>2013</strong>

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