6La létre de l'Enstitut Biarnés e GascoûUn exemple de Paléographie béarnaiseRoger Lapassadepoète béarnaisPar Marilis OrionaaChaque année, de l’automne au printemps, sousJ’ai rencontré l’égide des Amis Roger des Lapassade Archives, se déroulent 1989. auxJ’étais Archives professeur Départementales de lettres des et Pyrénées-Atlantiquesdes venir cours chanteuse de paléographie béarnaise. ouverts Il avait à tous publié ceux qu’in-unje voulais de-seul téressent recueil le déchiffrage de poésie et presque la compréhension vingt ans des auparavant,anciens. et j’avais Ils comportent appris plusieurs par cœur, niveaux. à l’âge Un de cours quinze d’ini-manuscritsans, tiation un permet de ses au pratiquant poèmes d’apprendre les plus émouvants, à identifier sur Lo descrit.écritsJeenmefrançaissuis occupéede l’époquedesclassique,trois recueilsassez facilementqui ontcompréhensibles, les “ductus” du scripteur, les abréviationssuivi, choisissant les textes, leur agencement,et jusqu’au titre des ouvrages,usuelles et l’identification des mots obscurs. Deux autresniveaux familiarisent avec les écritures plus difficiles depuisqu’il la Renaissance me faisait et du Moyen-Âge, confiance. périodes pour lesquellesexistent à Pau, quelques documents en français venant parexemple Une œuvre des notaires mince, de donc, Bayonne mais ou intense. de la Chambre desRoger comptes Lapassade Nérac. était la bonté même,la bonté faite homme, une bonté lucide.Nous Mais nous je voudrais épaulions, attirer ici moi l’attention la chanteuse de nos amis de l’<strong>Institut</strong>sur les cours de débutante, Paléographie lui <strong>Béarnais</strong>e, le vieux susceptibles deprofessionnellepoète les intéresser fragile. plus Je particulièrement. souviens surtout Ces dernières années ilssaontfantaisieeu lieu deincroyable,Novembre à Avrilde sonle jeudihumourde 17 h 30 à 19 h.Après chaque séance, les participants emportent des photocopiesde documents qu’ils ont une semaine pour préparerextravagant.avant la leçon suivante. Les devoirs du soir, en quelque sorte.Il Roger est nécessaire Lapassade pour aborder était cette charmeur discipline d’avoir et drôle. d’abordJ’ai suivi beaucoup les cours d’initiation. ri avec lui. Pour Je mesurer l’ai entendu leur intérêt, à plusieursbon de reprises savoir que faire le béarnais la cour a été en la béarnais, seule langue les officielle joursil estde employée marché dans à la Orthez, Vicomté à du de XIIe vieilles au XVIe dames siècle et de qu’il sa aconnaissance continué a être couramment rencontrées écrite au jusqu’à coin de la Révolution. la rue, et Ilqui servait lui récitaient également de la langue litanie juridique de leurs dans douleurs. des documents Il lesréconfortait de Soule et de d’un Basse-Navarre, compliment: le basque « Mais n’étant Germaine jusqu’à la[ou Réforme Antoinette, qu’une langue ou Augustine…], orale. que me ditesvouslà ? Pour moi, vous êtes toujours la même,Un bon exemple valant mieux que tous les discours, onaussi fraîche et vermeille que le bouton de la rosetrouvera ci-dessous deux courts textes datant de l’an 1513,musquée ». Elles éclataient de rire et retournaientextraits du minutier du Notaire de Saubestre (Cote E 1268 -à F° leur 22 V°). train-train, . Nous donnons requinquées. successivement la transcriptionlittérale du texte original, et un essai de réécriture en béarnaisJusqu’à actuel. Dans sa mort le texte — original, ne serait-ce nous avons que : par admiration1°) numéroté pour lui entre et parce deux traits qu’il obliques était un les rempart lignes du — manuscrit,me suis cela efforcée pour faciliter de croire le repérage à l’occitanisme du lecteur tel qui qu’il vou-jedrait le concevait, s’y rapporter une ; sorte d’humanisme du Sud, unSud 2°) développé aux frontières entre parenthèses indifférentes, les mots du figurant reste. en Mais abrégédix dans ans le plus manuscrit, tard, sa disparition ayant laissé lechamp3°) inscritlibreen capitalesà tousleslesformulesappétits,juridiquesl’occitanismelatines ;4°) ajouté quelques notes explicatives.subventionné s’est tellement déconsidéréque le mot occitan lui-même estDans la version en béarnais moderne, nous avons ajoutéentre parenthèses et en italique les mots sous-entendus.devenu détestable : nationalisme infect,En dépit endoctrinement de leur brièveté, ces des deux enfants, actes suggèrent embrigadementdes jeunes gens, dénigrement de laquelquesréflexions.Sur le plan langue historique française, d’abord. sectarisme, Dans le premier éviction des textes, (oule 10 décembre récupération 1513, Mathieu pour de recyclage) Beluch, habitant de tous de Montagut,près poètes, de Morlanne, écrivains, confirme chercheurs, la vente, pour chanteurs, 87 florinslesavec l’accord conteurs de son de fils Béarn Bertrand, et Gascogne de sa vigne à qui son refusentde de se Lespade. prosterner Ce genre devant transaction la croix oc-étaitcompatrioteArnaudcourant àcitane,l’époqueauetpiedtraduisaitde laquelledes difficultésse bousculentfinancièreset des problèmes d’endettement. Souvent, le vendeur devenaitfermier de sa propre terre, et se réservait le droit de ladésormais cuistrerie, pédanterie, goinfrerie, opportunisme,carriérisme, cynisme, et autres malfaisancesfait, cet acte totalement n’est que étrangères la confirmation à la de personnalité la vente pré-racheter dans un certain délai, ce qui n’est pas spécifié ici.Encédente, Roger plus Lapassade, détaillée, les 28 toute et 29 de octobre simplicité 1513, entre et de lesmêmes grandeur participants, d’âme. ce Tant qui explique et si bien le conditionnel qu’aujourd’hui, “aygosbenut”. paradoxalement, La nouveauté la est seule ici l’acquiescement manière d’être du fils, fidèle héritier àprésomptif. la mémoire du poète occitan Roger Lapassade,et Dans à son le second œuvre, texte, c’est ont peut de s’opposer être surpris de à voir l’avancée Mathieude Béluch l’Église racheter d’Occitanologie au nouveau propriétaire en refusant 800 catégoriquementrouge produit d’employer par une le vigne mot qui occitan n’est plus pour la sienne, dési-litres duvinetgneremployerle béarnaisà cela onzeet ledesgascon.quatre-vingt sept florins qu’ilvient de recevoir (en réalité eux-mêmes obérés par une detteantérieure). Mais 800 litres, cela semble beaucoup pour laconsommation d’un ménage, et sans doute Mathieu était-ilcabaretier.
La létre de l'Enstitut Biarnés e Gascoû7Roger Ici encore, Lapassade nous n’avons (1912-1999) voulu donner qu’un petit exemplede ce que a publié peuvent ses nous premiers enseigner textes ces vieux manuscrits, endehors en des graphie recherches béarnaise purement dans généalogiques. Il en est debien la revue plus Reclams. riches comme Il les par signait exemple du les promesses de mariagepseudonyme où sont Lou énumérés Cardinou et décrits (le chardonneret).ustensiles Mouts compris de nouste dans la est dot paru de la mariée.tous les vêtements, literieetdans un numéro de 1961. Ce petitpoème Sur le très plan pur linguistique concentre d’autre ses thèmescharabia de prédilection juridique, : on l’attachement peut constater qu’en six siècles, lepart, en faisant abstractiondubéarnais à la langue s’est béarnaise, relativement le goût peu de modifié, la moins en tout cassimplicité, la communion avec la nature,la foi.que le français de la même époque. Quant à la graphie, chaquenotaire a son écriture, aucun Malherbe gascon n’étantencore intervenu pour régenter l’orthographe. Fébusiens ouOccitans peuvent également y trouver leur grain à moudre.Une chose est cependant certaine : le son chuintant “CH”est traduit, selon les textes par “ix” ou “igt” mais jamais, enBéarn du moins, par la bizarre forme anglaise “sh” !Louis LABORDE-BALENTEXTE ANOTUM SIT que, cum Matiu de Beluxs, deu loc de Montagutaygos /2/ benut &c. a Ar(nau)t de-Lespade, deud(it)loc, &c. ung trens de t(er)re et binhe /3/situa(de) en lod(it)loc, &c. ap(er) ade La Binhe de Beluxs*, aixi que /4/ esfens sas c(on)front(ations), et p(er) some de quoat(re) vintet sept /5/(xxx) flor(ins)* cor(rentz) c(on)da(n) IX s(o)s &c.Per so es as-saver que /6/ Bertran de Beluxs, filh deud(it)Matiu, me(n)der* de bint et sincqs /7/ ans et mayor de XIIII&c. laude, aboa, ratifica et c(on)frima /8/ lad(ite) bend(itit)on p(er) lod(it) Matiu son pays feyte, UT IN FORMA &c. /9/Obliga &c. C(on)stitui &c. &c. Re(nuncia) Jura &c. Aut(re)ya &c.* /10/ ACTUM a-Mo(n)tagut lo X de desembre milVc XIII. - Test(imonis) : /11/ Peyro de Fexoat, Go(alh)art deLa Fita, de Mo(n)tagut Et jod(it) coa(djut)or &c.* NOTES- L 1 - Un GUILHEM DE BELUIXS fut recencé à Montaguten 1385- L 4 - FLORIN- - Le florin était une monnaie souventutilisée en Béarn.- L 6 - MENDER = mineur.- L 9 - OBLIGA &c. - = Ici, une série d’abréviationsqu’on retrouve dan tous les cahiers de minutes de notaire.Le contractant OBLIGE sa dette sur ses biens, CONSTITUEdes cautions qui paieront pour lui s’il ne le pouvait, RE-NONCE à tout recours à des exceptions que pourraient luifournir les Fors, JURE de respecter ses engagements etc. Cesclauses figurent intégralement dans les expéditions remisespar le notaire aux deux parties,, mais il les connaît par cœur,et se contente donc de les rappeler en bref dans son registre,aide-mémoire auquel il est tenu par loi.Essai de transcription en béarnais actuelQue sie noutat que, coum Matéu de Beluch, dou loc deMountagut, aboùssẹ benut a Arnaut de Lespade, deudit loc,&c. û tros de tèrre dab bigne, situade en loudit loc &c. aperade“La Bigne de Beluch”, atau coum éy héns las soûescounfrountacioûs, e per la soume de oeytante e sèt flourîscourréns , coumptan nau sos (cadû). Per aço, que cau sabéque Bertran de Beluch, hilh deudit Matéu, de ménch de binte cinc ans, e majou de trédzẹ &c., laude, aboue, ratifique ecounfirme ladite bendicioû hèyte per loudit Matéu, lou soûpay enta que en boune forme &c. . Oubligue &c. counstituéch&c. Renouncie , jure &c. Autréye &c. (Hèyt) à Mountagutlou dèts de decémẹ de mile cinc cénts e trédzẹ - Testimònis: Pèyre de Fechoat, Goalhard de Lafite, de MountagutE joudit, coadjutou &c.TEXTE BNOTUM SIT que Matiu de Beluxs et Bertran son filh etC(on)derine /2/ de La Cajunca sa molher, lad(ite) Conderineab boluntat &c. reco- /3/ -nego deber dar aud(it)Arn(aut) de Lespade, deud(it) loc &c. la so(me) /4/ de ontzeflor(iis) cor(entz) c(on)dan IX s(o)s &c. Et aquetz p(er)bendi(rion) de /5/ une pipe* de bin roye, losqueoals lo pr(o)meton pagar /6/ (xxxx) de-qui au jorn de Sent-Miqueu desep(tem)bre p(ro)smar ben(en) /7/ Obligan &c. C(on)situin&c. Re(nuncian) &c. Juran &c. ACTUM et test(monis) /8/UT SUPRA. Et jod(it) coa(djut)or &c.L 5 - PIPE- - Une pipe était une barrique d’environ 600litres.Essai de transcription en béarnais actuelQue sie noutat que Matiu de Beluch, e Bertran, lou soû hilh,e Couderine de la Cajunque, la soûe hémne, ladite Counderinedab la boulountat (de soû marit) a recounegut que déuda audit Arnaut de Lespade, deudit loc, la soume de oùnzẹflourîs courréns, coumptan nau sos (cadû). Et aquéts per labendicioû de ûe pipe de bî rouy, lousquoaus l’an proumetutpaga abans lou die de Sén-Miquèu de Setémẹ qui bién. Anoubligat, counstituat, renounciat e jurat etc. Hèyt e testimòniscoum dessus. E joudit, coadjutou &c.