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Iran: vers un espace public confessionnel? - Sciences Po

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— dont neuf femmes — ont estimé d’elles-mêmes ou sur avis de leur entourage qu’ellesétaient potentiellement dignes d’être reconnues comme aslah par le Conseil de surveillancede la Constitution et ont affiché cette conviction dans l’<strong>espace</strong> <strong>public</strong>, en commençantà faire campagne, en donnant des interviews à la presse, en questionnant lesfondements mêmes de la Constitution. Par exemple Mme Azam Taleghani, fille de l’<strong>un</strong>edes figures les plus marquantes de la Révolution, entendait, en faisant acte de candidature,lever l’équivoque de la possibilité, ou non, pour <strong>un</strong>e femme de devenir Président dela République. Elle n’a obtenu qu’<strong>un</strong>e demi-réponse : elle a bien été écartée, avec les huitautres candidates, mais auc<strong>un</strong>e mention de leur sexe n’a été invoquée par le Conseil àl’appui de sa décision.Du point de vue du devenir de la société politique, ces épisodes sont importants en euxmêmeset il serait trop facile de se gausser du caractère incontestablement non démocratiquede la consultation. D’autres enjeux sont en cause à tra<strong>vers</strong> les joutes, en effettrès contrôlées, des candidats ou des factions : ils portent sur l’orientation de la société,sur la place qu’y occupent les différentes catégories de la population, sur les principesde légitimité du pouvoir, comme l’a prouvé la victoire de M. Khatami.Une lecture rapide pourrait également conclure à la “ colonisation ” du champ électoralpar des représentations religieuses. Mais il est peut-être plus intéressant de s’interrogersur la réciproque : la rationalisation de la notion d’aslah dans l’arène politique restera-t-ellesans effets dans la sphère religieuse ? Les “ sources d’imitation ” elles-mêmesne seront-elles pas appréciées en fonction de critères spécifiques et ne seront-elles pasdésormais reconnues comme aslah au regard de telle ou telle qualité ? Dans l’immédiatmieux vaut s’arrêter à cette idée selon laquelle la République enregistre <strong>un</strong> début de processusde formation de l’<strong>espace</strong> <strong>public</strong> et d’institutionnalisation de cet “ usage <strong>public</strong> duraisonnement ” 18 , processus auquel participent massivement les institutions et les pratiquesreligieuses. Le propre de l’être-en-société est bel et bien de raisonner sur la scène publique.Dans cette mesure, le processus dont nous parlons s’est enclenché avant la Révolution.Mais les penseurs ou les précurseurs de cette dernière, <strong>un</strong> Morteza Motahhari,ou <strong>un</strong> Bagher Sadr, voire <strong>un</strong> Allameh Tabâtabâi ont fait sortir ce profil social de son ghettolaïciste ou sécularisé et lui ont conféré <strong>un</strong>e légitimité islamique incontestable, quitte àbadigeonner du vert de la religion le positivisme ambiant. Les pratiques sociales ont faitle reste.18 Jürgen Habermas, L'Espace <strong>public</strong>, Paris, Payot, 1993.Les Etudes du CERI - n ° 27 - juin 1997 33

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