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Iran: vers un espace public confessionnel? - Sciences Po

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noblesse de l’ancien militant révolutionnaire collaborateur de l’ayatollah Beheshti et l’ouvertured’esprit du polyglotte frotté à l’expérience de l’Occident. Il s’est présenté commel’homme de la recomposition plus que comme celui de la rupture, et cela n’a en rien entaméles espérances qui se sont portées sur son nom. La participation électorale a étési massive que les autorités ont dû reporter de quatre heures la fermeture des bureauxde vote : elle s’est élevée à 88 %, contre à peine plus de 50 % en 1993. Sur ce point également,les élections législatives de 1996 avaient donné le ton, et l’on a retrouvé durantla campagne présidentielle la forte mobilisation des “ fronts de propagande ” qui avaientdominé la scène l’année dernière.Les résultats illustrent bien certaines des tendances de la société iranienne dont MohammadKhatami s’est fait le porte-parole. Tout d’abord, il a bénéficié du soutien massifdes je<strong>un</strong>es et des femmes, ainsi que l’ont relevé la plupart des observateurs. Mais sonscore impressionnant à Téhéran, tout comme la déroute de Ali-Akbar Nategh Nouri, ontégalement démontré que l’on ne pouvait plus réduire le bazar à la droite conservatrice.Déjà en 1996 les motalefeh avaient subi <strong>un</strong> cruel échec et plusieurs de leurs leadersavaient été battus, tels Ali-Naghi Khamoushi, le président de la Chambre de commerce,ou Habibollah Asgaroladi, haut responsable de l’Organisation de l’économie islamique.C’est que le bazar s’est largement transformé d’<strong>un</strong> point de vue sociologique, qu’il s’estdifférencié et qu’il échappe au moins en partie au contrôle des réseaux et des guildes traditionnels.Cette évolution va de pair avec la montée en puissance des entrepreneurs etdes sociétés (sherkat). Pareillement le clergé, dont on tenait pour acquis qu’il s’identifiaità la droite et à Ali-Akbar Nategh Nouri, a pris des positions beaucoup plus di<strong>vers</strong>ifiées :outre le fait que des ayatollahs comme Montazeri, Ardebili et Sanei ont pris fait et causepour Mohammad Khatami, la ville de Qom lui a donné 59,4 % de ses voix et, nous l’avonsvu, Mashhad 70 %.Enfin la reconnaissance par celui-ci des particularismes régionauxlui a valu l’adhésion enthousiaste du vote turc, arabe, kurde et lor, à <strong>un</strong> moment où semblese renégocier la relation entre les provinces et la capitale et où <strong>un</strong>e gestion plus girondinede la République semble se dessiner, après <strong>un</strong>e période très centralisatrice, en partieimposée par la guerre avec l’Irak.In<strong>vers</strong>ement, force est de souligner le faible score de Mohammad Rey Shahri (2,5 %),le porte-parole du populisme nostalgique de la Révolution (et de beaucoup d’autreschoses !), et de Seyyed Reza Zavarei (2,6 %), le candidat non clerc de la droite conservatricechargé de séduire <strong>un</strong>e partie de l’électorat de Mohammad Khatami. Ces chiffrestrès modestes relativisent l’importance du rôle joué par le groupe Ansar-e hezbollah depuis1996 et le poids réel des Bassidj et des Gardiens de la Révolution. Ou peut-être, plusexactement, ces deux dernières forces, quelle que soit leur influence sur la société iranienne,sont politiquement aussi différenciées que cette dernière, alors même que lecommandant en chef des Gardiens, Mohsen Rezai, et le ministre du Renseignement, AliFallahian, réservent leur sympathie à la droite conservatrice.Or cette recomposition politique, rendue manifeste par les législatives de 1996, les partiellesde janvier 1997 et la présidentielle du 23 mai, est incompréhensible si l’on ne tientpas compte de la gestation d’<strong>un</strong> <strong>espace</strong> <strong>public</strong> au cours de ces dernières décennies, <strong>espace</strong><strong>public</strong> à la formation duquel le champ religieux a puissamment contribué.Les Etudes du CERI - n ° 27 - juin 1997 4

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