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LE JOURNAL D'ASIE par HENRI FROMENT-MEURICE ... - Geopolitis

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servir d’intermédiaire pour essayer d’organiser une rencontre entre l’Ambassadeur deChine et moi ? » Schumann accepte.Je le dis à Matsui qui précise la manœuvre. Je devrai seulement faire <strong>par</strong>t du désir d’unerencontre, mais je sais que si elle a lieu, Matsui dira au Chinois que Tokyo voudraitarranger une rencontre entre Ambassadeurs, ici ou à Paris, entre Ambassadeursaccrédités ou spéciaux.Je convoque mon Chinois et lui fais mon message. Il prend note et se contente deremarquer que le Japon n’a pas une politique très amicale à l’égard de la Chine.Le 6, je le convoque pour lui <strong>par</strong>ler d’autre chose. Quand il a pris note, il me dit : « Noustenons à vous remercier, <strong>par</strong>ce que vous nous avez présenté diverses personnalités pourque nous prenions contact avec elles. Mais <strong>par</strong>mi ces personnalités, il en est, tell’Ambassadeur du Japon, avec lesquelles il n’est pas convenable pour nous de prendrecontact ici. »Qu’en termes galants… Aucune remarque désagréable. Matsui pense, et je l’y invite, queson Gouvernement nous chargera d’une nouvelle communication.L’autre jour, déjeuner offert <strong>par</strong> les Ambassadeurs afro-asiatiques à Schumann. Celui-ciavait à sa gauche le Chinois, tandis que le Malgache, qui présidait, avait mis à sa droite,donc en face de Huang Chen, Matsui à la droite duquel je me trouvais. C’était cocasse.Huang Chen et Matsui ne se sont pas adressé la <strong>par</strong>ole. Mais Matsui m’a dit hier qu’ils’était demandé s’il n’allait pas franchir le pas. Je lui ai dit qu’à mon avis il avait bien faitde s’abstenir. Dans cette affaire, entre ces deux masses, il faut s’armer de patience.16 févrierDepuis quinze jours j’avais en poche un rendez-vous de Schumann avec Le Duc Tho pourdemain. Mais j’attendais que les autres fassent le premier pas. Il a fallu les y aider unpeu. Du coup vendredi 13, Mai Van Bo chez qui je dînais m’a dit que Le Duc Tho voulaitvoir Pompidou avant son dé<strong>par</strong>t pour Washington. Il avait même proposé une date : le 18.On a trouvé cela un peu fort et j’ai été prié de dire le lendemain que M. Pompidou, tropoccupé, priait Schumann de le recevoir. Les autres ont feint d’examiner et suggéré uneautre heure rien que pour avoir l’air.J’ai fait une note pour Schumann lui disant que nous étions en train de perdre notre crédità Hanoi et qu’il fallait saisir l’occasion du voyage Pompidou pour le retrouver. Serai-jesuivi ? Partiellement je pense. Tout ce que je vois de Pompidou montre qu’il louvoie. Unpeu de Washington, un peu de Moscou. Sur le Vietnam il déclare à Suzberger que nosdivergences avec les Etats-Unis portent moins sur les objectifs que sur les procédures.C’est grave, en fait, car cela suppose que nous croyons sérieusement que les objectifsaméricains sont de quitter le Vietnam. Or, ce n’est moins que sûr. En fait, la seuledifférence entre Nixon et Johnson est que celui-ci voulait gagner la guerre, celui-là lapaix, mais l’un et l’autre veulent gagner. Or il n’est pas de paix possible si Washingtonveut gagner. Donc nous ne pourrons être d’accord avec les Etats-Unis que le jour oùWashington ne cherchera plus à gagner. Ce n’est pas encore le cas.Hier matin, au moment d’entrer avec Le Duc Tho et Mai Van Bo dans le bureau deSchumann, celui-ci me prend à <strong>par</strong>t et me dit : « Tout est changé depuis hier. Ils ne lesavaient sans doute pas. La paix est pour demain. » Je ne me sens pas broncher. Uninstant je me demande d’où il tire cela, ce qu’il a appris et que je ne sais pas. Nous nousasseyons. Le Duc Tho, qui a chaussé des lunettes et qui me <strong>par</strong>aît en bonne forme,commence à exposer « les vues de son Gouvernement sur le problème vietnamien ». Il n’ya là rien de bien original : deux problèmes, le retrait des troupes et le Gouvernement decoalition, deux obstacles, le maintien de Thieu, l’absence d’un véritable chef dedélégation américaine à la Conférence de Paris.Je vois Schumann qui griffonne et me tend un papier auquel est agrafé un télégramme.Sur le papier, je lis : « Ceci est plus que confidentiel. Vous êtes le quatrième et le dernierqui en a connaissance.» Sur le télégramme, je vois : « Washington. Pour le Ministre seul». Et en effet il n’est diffusé qu’au Cabinet du Ministre, c’est-à-dire ni à l’Elysée, ni àMatignon, ni à personne d’autre dans la maison. Je lis, vite, mal, tout en prenant en noteles <strong>par</strong>oles de Le Duc Tho. Et je comprends que Kissinger a dépêché à Lucet un militairepour lui annoncer qu’il viendra à Paris vendredi 20 <strong>par</strong> un transport militaire spécial. Ilrencontrera les Nord-Vietnamiens (je crois me souvenir qu’il n’est pas question des gensdu Front) en un lieu secret, voudrait ensuite voir Pompidou en dehors de Paris, puisre<strong>par</strong>tir, le samedi, pour Washington. C’est le même scénario que celui prévu enseptembre, quand il devait venir et n’était finalement pas venu.La conversation se poursuit. Puis Le Duc Tho <strong>par</strong>le à Schumann des relations francovietnamienneset dit, brièvement, mais nettement, comme je m’y attendais, que à Hanoi ons’inquiète d’un changement de la politique française.MS répond en attaquant là-dessus : pas l’ombre d’un changement, Phnom Penh demeurenotre Charte. Et je l’entends, un peu stupéfait, qui dévide toute ma note sur l’initiativefrançaise. Tout en disant : « Naturellement ce n’est pas une proposition, c’est une idée

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