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EDITO<br />
PAR MARTINA CAPPUCCIO<br />
«Bâtir une Amérique sûre, forte et fière»,<br />
mais à quel prix?<br />
Plus attendu pour les sempiternelles frasques de son orateur que<br />
pour le bilan qu’il dresse, le discours de Donald Trump sur l’état de<br />
l’Union a été suivi par des millions de personnes à travers le monde.<br />
Auto-congratulant et encourageant, il était toutefois tourné vers un<br />
avenir pouvant sembler effrayant à bien des égards.<br />
Si le pays enregistre en 2017 une croissance de 2,3%, soit 0,8%<br />
de plus que l’année précédente, et que le taux de chômage décroît,<br />
l’année 2018 ne s’annonce pourtant pas aussi brillante que le<br />
discours présidentiel semble l’annoncer.<br />
Aussi farfelus qu’onéreux, les projets du président ne font pas<br />
l’unanimité. Le maintien de la prison de Guantanamo ainsi que la<br />
modernisation et la reconstruction de l’arsenal nucléaire américain<br />
en sont de bons exemples. Il n’est donc pas innocent que Donald<br />
Trump ait entamé son discours en appelant à l’union et à la<br />
solidarité de la part de ses opposants. Le dirigeant américain sait<br />
en effet que les élus du Congrès seront prochainement amenés à<br />
trouver un consensus sur les questions budgétaires.<br />
Dans sa croisade contre les «dreamers» franchissant chaque année<br />
les frontières américaines, Donald Trump est toutefois prêt à faire<br />
des concessions en donnant l’accès à la citoyenneté à 1,8 million de<br />
sans-papiers… pour la modique somme de 25 milliards de dollars<br />
que l’opposition devrait débloquer en vue de la construction<br />
d’un mur séparant le Mexique des Etats-Unis, mur qui, selon ses<br />
promesses de campagne, aurait dû être financé par le Mexique luimême.<br />
Si ce budget impressionne, celui nécessaire au développement et<br />
à la rénovation des infrastructures des Etats-Unis s’élève quant à<br />
lui à 1.500 milliards de dollars. Somme qui n’est pas sans rappeler<br />
celle que ne percevra pas l’Etat suite à la réforme fiscale mise en<br />
place par l’administration Trump. En effet, cette dernière retire<br />
trois points d’impôts aux particuliers et quinze aux entreprises,<br />
sans financement prévu par le gouvernement. De plus, notons que<br />
ces économies réalisées par les entreprises n’ont pas été investies<br />
dans la recherche et le développement, mais dans le rachat de leurs<br />
propres actions, faisant ainsi monter leur cours et rapportant de<br />
jolies sommes à leurs actionnaires.<br />
Si à court terme cette baisse d’impôt semble avoir des effets<br />
favorables, elle pourrait toutefois avoir des répercussions<br />
dangereuses sur l’économie du pays à long terme. En attendant,<br />
Wall Street s’enflamme et jouit d’une hausse spectaculaire des<br />
actions en ce début d’année 2018, et c’est là tout ce que semblera<br />
retenir le dirigeant américain. Une bulle spéculative semble s’être<br />
formée et prendre de plus en plus d’ampleur, se dégonflera-t-elle<br />
en douceur ou déclenchera-t-elle une nouvelle crise financière?<br />
Le spectre de la crise de 2008 semble à nouveau planer au-dessus<br />
d’une Amérique trumpée par de jolis discours. n