Panorama de presse quotidien du 26 11 2021
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Un concept <strong>de</strong> 8 ans<br />
Le 9 novembre, ces <strong>de</strong>ux scientifiques ont tenu une conférence sur cette controverse à la Cité<br />
<strong>du</strong> Vin, lors <strong>de</strong>s Vendanges <strong>du</strong> Savoir. Selon Isabelle Masneuf-Pomarè<strong>de</strong>, le concept <strong>de</strong><br />
levures <strong>de</strong> terroir, est apparu fin 2013 suite à la publication d’un article scientifique <strong>de</strong><br />
l’équipe <strong>de</strong> David A. Mills, professeur à l'université <strong>de</strong> Davis en Californie. « C’est un<br />
chercheur réputé pour la microbiologie <strong>du</strong> vin. Il a étudié sur trois ans la population <strong>de</strong><br />
microorganismes dans 273 échantillons <strong>de</strong> moûts issus <strong>de</strong> trois régions différentes, Central<br />
Coast, Sonoma et Napa Valley. Il montre qu’en fonction <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction, les<br />
communautés microbiennes sont différentes. Il pose l’hypothèse que cela pourrait avoir <strong>de</strong>s<br />
conséquences sur les caractéristiques <strong>de</strong>s vins », explique l’œnologue.<br />
En 2014, une <strong>de</strong>uxième étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’université <strong>de</strong> Chicago appuie cette idée. « Ses auteurs<br />
imaginent que les microorganismes présents dans le sol et sur la plante jouent un rôle<br />
significatif sur les caractéristiques sensorielles <strong>du</strong> vin ». Par la suite, les scientifiques néozélandais<br />
et européens s’emparent <strong>du</strong> sujet, remettant en cause les résultats américains. La<br />
controverse commence.<br />
Toute la communauté scientifique européenne est d’accord<br />
Parmi les étu<strong>de</strong>s qui contredisent les travaux américains, Patrick Lucas cite celle <strong>de</strong> Jackson<br />
Peter <strong>de</strong> l’Université <strong>de</strong> Strasbourg parue en 2018. « Ce chercheur a étudié plus <strong>de</strong> 1 000<br />
souches <strong>de</strong> Saccharomyces cerevisiae provenant <strong>de</strong> plusieurs terroirs en Europe, en<br />
Amérique <strong>du</strong> Nord et en Asie. Son étu<strong>de</strong> montre qu’il n’y a pas <strong>de</strong> distinction entre ces<br />
souches en fonction <strong>de</strong> leur origine géographique », résume Patrick Lucas. Lui-même a<br />
constaté un résultat i<strong>de</strong>ntique concernant les bactéries lactiques Oenococcus oeni. « Les<br />
microorganismes fermentaires ne sont pas figés dans une région. Nous avons vu récemment à<br />
quel point un virus peut se transporter rapi<strong>de</strong>ment à travers la planète… Et bien, il en est <strong>de</strong><br />
même pour les levures et les bactéries. Toute la communauté scientifique européenne est<br />
d’accord avec nous », ajoute-t-il.<br />
Selon Patrick Lucas, les Américains considèrent que l’ensemble <strong>de</strong>s microorganismes <strong>du</strong><br />
vignoble ont un impact direct sur la qualité <strong>du</strong> vin, ce qui n'est pas démontré. « Pour nous,<br />
seuls les microorganismes fermentaires impactent la qualité <strong>du</strong> vin, pas les autres. Et il n'y a<br />
pas <strong>de</strong> lien entre un terroir viticole et les levures et bactéries qui s'y trouvent : on peut tout<br />
aussi bien les trouver ailleurs et elles n'y sont que temporairement », précise-t-il.<br />
Ancrage géographique<br />
Isabelle Masneuf-Pomarè<strong>de</strong> ajoute « les travaux américains sont basés essentiellement sur<br />
l’analyse <strong>de</strong> l’ADN <strong>de</strong>s microorganismes. Or, cela ne permet pas <strong>de</strong> déterminer leur état<br />
physiologique, donc pas leur activité. Et il faudrait intégrer une caractérisation sensorielle<br />
rigoureuse <strong>de</strong>s vins dans les futures étu<strong>de</strong>s à ce sujet. Ce n'était pas le cas dans les étu<strong>de</strong>s<br />
américaines », ajoute-t-elle. L’œnologue critique également le fait que ces étu<strong>de</strong>s aient porté<br />
sur <strong>de</strong>s aires géographiques très vaste. Les Américains n'auraient-ils rien compris au terroir ?<br />
Pas d'exclusivité avec les levures