18005_Materiaux_locaux
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Valoriser le potentiel
socio-économique
des territoires
Le secteur de la construction de nombreux pays africains
dépend en grande partie de l’import de matériaux de
construction conventionnels (ou de l’énergie pour les produire)
et s’appuie sur un nombre limité d’acteurs d’envergure
parfois internationale. Ceci provoque un double coût :
économique et écologique, auquel s’ajoute la grande vulnérabilité
des filières d’approvisionnement globales aux variabilités
externes d’importation et aux risques climatiques et
sanitaires grandissants. En outre, l’épuisement des ressources,
en énergie notamment, est amené à impacter toujours
plus les coûts de construction, et cela en lien avec la
croissance exponentielle des besoins en construction.
En réponse à ces défis, les stratégies de relocalisation de la
production des matériaux de construction à proximité des
projets, associées à l’usage de matières premières locales,
renouvelables ou quasi inépuisables et peu énergivores,
sont appelées à se développer. En réduisant la dépendance
en énergie et en ressources exogènes, ils ont le potentiel
d’ancrer durablement le capital et l’investissement sur le
territoire, de réduire les vulnérabilités face aux chocs et de
s’affranchir des variabilités économiques globales, tout en
permettant une réduction des coûts de construction.
Au-delà de ces aspects macro-économiques, de tels processus
de relocalisation ont le potentiel de contribuer de
manière significative et durable à la revitalisation socioéconomique
des territoires, car ils permettent de valoriser
au mieux les ressources non seulement matérielles, mais
aussi humaines du territoire. Il est possible de s’appuyer sur
les savoirs et savoir-faire existants, et valoriser une expérience,
parfois millénaire, tout en appuyant le développement
de compétences nouvelles et complémentaires afin
de répondre pleinement aux exigences actuelles. En outre,
en s’appuyant sur des savoir-faire partagés et maîtrisés, on
favorise alors la participation familiale et communautaire
(entraide, échange, autoconstruction) et donc la cohésion
sociale tout en réduisant les coûts de construction et d’entretien.
Enfin, les filières courtes et locales favorisent l’appui et le
développement d’un tissu entrepreneurial local, diversifié
et flexible ancré sur le territoire. Cela favorise les échanges
locaux et la coopération entre acteurs économiques à
l’échelle territoriale et génère, in fine, de la valeur ajoutée
économique et sociale sur le territoire.
Le choix des matériaux locaux, et de modes de production
reposant sur un réseau entrepreneurial local, n’est pas
antinomique avec des objectifs quantitatifs ambitieux. Dès
lors que l’ensemble de la filière bâtiment est pris en compte,
son efficacité est redoutable. Certains exemples, comme
à Mayotte, ont déjà fait la preuve de l’applicabilité d’une
démarche matériaux locaux à travers le support à une multitude
d’acteurs locaux.
Des dynamiques liées à des filières locales sont omniprésentes
en Afrique, que ce soit en milieu urbain ou rural.
Elles sont généralement le fait d’une économie informelle
et s’appuient sur l’autoconstruction et sur l’appel à des travailleurs
indépendants ou des micro- et petites entreprises.
Ces « petites unités économiques » constituent en réalité la
majeure partie de l’emploi en Afrique 1 . Cependant ces dynamiques
sont encore peu documentées et valorisées et ne
bénéficient pas d’un appui intégré.
1 Concernant le secteur de l’industrie (dont la construction), en Afrique, plus de
60 % de l’emploi du secteur industriel relève du secteur informel et les petites unités
économiques (indépendants, micro et petites entreprises) représentent plus de 80 %
de l’emploi total. ILO, 2019.
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