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PANORAMA DE PRESSE - 16.08.23

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POLITIQUE · ÉCONOMIE · LA VIGNE · LE VIN · HORS CHAMPAGNE<br />

VITISPHÈRE<br />

Alexandre Abellan<br />

16·08·23<br />

«PLUIE ET HUMIDITÉ NOUS FONT<br />

CRAINDRE UN POURRISSEMENT<br />

<strong>DE</strong>S RAISINS»: INQUIÉTU<strong>DE</strong> EN<br />

CHAMPAGNE À L’APPROCHE <strong>DE</strong>S<br />

VENDANGES<br />

Incontrôlable, la pression mildiou du millésime 2023 n’est pas liée qu’à la météo ou à des vignes en<br />

friche pour Olivier Metzinger. Le vigneron bordelais pointe la responsabilité de l’administration qui<br />

veut réduire les traitements dans l’absolu sans donner aux techniciens des moyens d’adaptation aux<br />

conditions exceptionnelles.<br />

Ayant marqué les vignes et les esprits vignerons, la virulence du mildiou ce printemps et cet été 2023 ne serait<br />

pas dû qu’à la météo tropicale et à l’explosion des vignes laissées en friche en Gironde pour Olivier Metzinger,<br />

du château Pascaud à Rions. Administrateur aux syndicats des AOC Bordeaux et Cadillac, le vigneron pointe<br />

la responsabilité des pouvoirs publics français et européens, ayant fait de la réduction des matières actives et<br />

des doses de phytos une finalité écologique au détriment de toute prise en compte économique. « Le problème,<br />

c’est que l’on a une administration qui gère les grandes masses et ne voit pas de souci avec cette vision globale.<br />

Les prévisions de récolte de 44,5 millions hl disent que quelque part tout va bien, qu’il n’y a pas de souci.<br />

C’est comme dire que réduire de 50 % les phytos ne réduit que de 28 % les rendements. Ça se gère depuis un<br />

bureau, mais sur le terrain il y a des drames humains. Ce n’est pas mathématique » soupire Olivier Metzinger,<br />

qui regrette que « quand tous les modèles sanitaires sont au rouge, l’on ne puisse pas adapter les traitements.<br />

L’objectif de l’administration est de réduire les doses, mais l’objectif d’un vigneron est d’abord de produire du<br />

raisin sain et mûr, ensuite de réduire les phytos si c’est possible. »<br />

Pour le vignoble, « la diminution des doses a des limites », alors qu’« il y a des Témoins Non Traités (TNT),<br />

il n’y a pas de témoins surtraités à +10, +20 ou +30 % des doses prescrites. De vrais scientifiques devraient<br />

aussi le faire, afin de constater les effets. En 1993, un hydroxyde de cuivre (500 g) était homologué à 6 kg/ha<br />

par passage en pleine végétation (3 kg de Cu métal), il est aujourd’hui homologué à 1,5 kg/ha (avec le fameux<br />

plafond de 28kg de Cu métal pour 7 ans) et réellement utilisé entre 0,5 et 1 kg... Divisez par 6 ou 12 le nombre<br />

de boulons qui tiennent les roues de votre voiture et je crois qu’il y aura des problèmes. Et essayez ensuite de<br />

faire payer les dommages à votre assureur. Franchement on marche sur la tête dans les ministères. »<br />

Détresse économique<br />

De l’adaptation des doses phytos lors des conditions exceptionnelles au déploiement de cépages résistants au<br />

mildiou et à l’oïdium*, Olivier Metzinger appelle à la création d’une boîte à outils permettant de maintenir des<br />

rendements viables pour l’économique viticole. « Aujourd’hui on avance à marche forcée par des décideurs n’en<br />

ressentant pas l’impact » regrette-t-il, faisant état de vignobles où il n’y a même plus le squelette des grappes.<br />

Ce qui augure de grandes difficultés financières pour des entreprises déjà très fragilisées par la succession de<br />

crises commerciales et climatiques. Après l’espoir d’un millésime à l’économie, pour ne pas trop dépenser au<br />

vignoble alors que la trésorerie est à sec, la réalité d’une campagne viticole coûteuse ayant demandé toujours<br />

plus de traitements et de travaux va tomber sur les bilans d’exploitations, alors que les rendements vont être<br />

réduits. « En plus, le résultat n’est pas là ! On espère tous passer l’année » rapporte Olivier Metzinger, notant<br />

que « normalement nos entreprises sont capables d’assumer les aléas de leur activité, mais leur cumul empêche<br />

de faire du chiffre pour dégager des réserves ou faire de la prospection ».<br />

Pessimiste sur l’avenir, le vigneron craint que « les 30 000 hectares de vigne à l’abandon soient là en décembre.<br />

Il y en aura 9 000 arrachés et le reste ? Aujourd’hui, il n’y a pas de prise de conscience d’ampleur. Il aurait<br />

fallu anticiper les baisses de consommation (chiffrées depuis des décennies) et être plus proactif. Ce sont des<br />

occasions manquées. Est-ce parce que l’on est habituée à ce que les paysans se plaignent ? Objectivement, des<br />

jours noirs s’annoncent. »<br />

* : Mais pas au black-rot note le vigneron, qui pointe des impasses croissantes pour lutter contre, y<br />

compris ce millésime 2023.<br />

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