Liste des déportés de France par mesure de

memorial_6 - 30.4.2004 - page 1569
III.16. Les de´ porte´ s arreˆte´ s sur le territoire du III e Reich (hors Alsace-Moselle) et internés au KL Sachsenhausen
usines de la ville sont a` l’origine de cette rafle de représailles. Des ope´ rations du
meˆme genre sont menées par les Allemands a` Duisbourg, Du¨ sseldorf, Krefeld
et Leverkusen. Ainsi, la Rhe´ nanie du Nord, essentiellement du fait de ces
arrestations de septembre 1944, concentre au total près delamoitie´ des
lieux d’arrestation releve´ s 1 .
Une seconde aire se distingue autour de Berlin : un peu plus de 25 %
des arrestations ont ainsi e´ te´ opére´ es dans la capitale du Reich et dans sa
banlieue. Les autres lieux d’arrestation sont assez dispersés et se localisent
surtout dans le nord de l’Allemagne (Brême, Brunswick et Schwerin en particulier),
en Saxe (Dresde, Leipzig) et en Pologne actuelle (Breslau, Glatz).
Dans les pays occupe´ s, trois ont lieu en Belgique et cinq en Norve` ge, ou`
pre` s de 4000 Français ont e´ te´ envoyés au travail a` partir de 1943 2 . A la différence
de ce qui a e´ te´ observe´ pour les autres KL ayant accueilli plusieurs
centaines de Français arrête´ s sur le territoire du Reich, plusieurs re´ gions ne
sont pratiquement pas concerne´ es par ces arrestations : la Bavière, l’Autriche,
la Tchécoslovaquie en particulier.
Les motifs a` l’origine des arrestations de ces 930 hommes consistent
essentiellement en des actes d’opposition au régime nazi 3 . Les motifs de
droit commun ne sont, en effet, à l’origine que d’environ 7 % des
arrestations : un groupe est ainsi interpellé en novembre 1944 dans le camp
de Berlin-Grünau pour s’eˆtre livre´ au pillage des magasins de la ville pendant
les bombardements allie´ s. Mais l’e´ coute des radios e´ trange` res et la diffusion
des nouvelles, le refus de travail, le ralentissement des cadences et le sabotage
dans les usines sont les motifs les plus re´ currents. Ils repre´ sentent, en effet,
plus des deux tiers d’entre eux. Ils sont, on l’a vu, a` l’origine des ope´ rations de
repre´ sailles de septembre en Rhénanie du Nord, par exemple.
Parmi les autres motifs, moins fre´ quents, l’aide a` l’e´ vasion de prisonniers
de guerre français ou e´ trangers vient ensuite. Elle est souvent
pratiquée par des travailleurs requis auprès delaDeutsche Reichsbahn. En
de´ cembre 1943, par exemple, 3 Français employés a` la gare de triage de
Halle sont interpelle´ s par la Gestapo pour avoir héberge´ des prisonniers de
guerre en fuite et pour avoir participé a` leur e´ vasion en les faisant monter
dans des wagons de marchandises plombe´ s a` destination de la France.
L’interception par la censure de lettres contenant des propos injurieux
envers les Allemands ou le Fu¨ hrer, promettant leur de´ faite prochaine, ou
de´ nonçant simplement la nourriture et l’hébergement, sont e´ galement a`
l’origine de quelques arrestations. De meˆme, le refus de la nationalite´ allemande
et de l’incorporation dans la Wehrmacht sont la cause de l’envoi de
plusieurs Alsaciens-Mosellans au KL Sachsenhausen.
Un groupe a e´ galement e´ te´ interne´ au KL Sachsenhausen en raison de son
activité de re´ sistance spirituelle 4 . L’Action catholique a ici essentiellement pour
the´ aˆtre la ville de Berlin et sa banlieue. Elle s’y de´ veloppe comme ailleurs a`
partir des dernie` res semaines de 1942 avec l’arrive´ e de travailleurs requis,
jocistes, scouts et prêtres clandestins. Les activite´ s du groupe se mettent
progressivement en place, a` commencer par l’organisation de se´ ances de
confessions et de messes clandestines. Fin juin 1944, l’organisation compte
pre` s de 700 militants regroupés en une trentaine de secteurs constituant quatre
districts. Au total, 18 membres de l’Action catholique a` Berlin sont arreˆtés entre
fe´ vrier et août 1944 : 1 est renvoyé en Stalag, 3 sont internés enArbeitslager,
2sontde´ porte´ s au KL Dachau et 12 au KL Sachsenhausen. Ces derniers
reçoivent comme surnom « la procession » et ils entrent au camp le
23 septembre 1944, recevant des matricules dans la se´ rie des « 104000 ».
Parmi ce groupe envoyé a` Sachsenhausen, 3 de´ ce` dent durant leur déportation,
alors que Rene´ Giraudet s’e´ teint au Kremlin-Biceˆtre, au lendemain de son
retour.
Les arrive´ es au KL Sachsenhausen s’e´ chelonnent de de´ cembre 1939 a`
fe´ vrier 1945, mais le rythme des entre´ es est, a` l’image de celui des arrestations,
tre` sirre´ gulier 5 .L’anne´ e 1944 en concentre en effet les trois quarts, et la
deuxième quinzaine de septembre 1944, a` elle seule, voit l’arrivée de42%
des de´ portés de l’ensemble de la pe´ riode.
Le taux de déce` s parmi ces de´ portés est relativement e´ leve´ (plus de 46 %)
par rapport a` ce qui a e´ te´ observé pour les autres KL. Il s’explique en partie par
le fait que la majorite´ d’entre eux quitte le camp central apre` s quelques
semaines de quarantaine pour des Kommandos exte´ rieurs ou d’autres KL.
Les de´ portésde´ tenus au KL Sachsenhausen jusqu’au terme de leur de´ portation
ne de´ passent pas 20 % de l’ensemble et ce groupe possède un taux de déce` s
le´ ge` rement infe´ rieur a` 25 %.
Le taux de de´ cès parmi les de´ portés transfére´ s apre` s leur arrive´ eauKL
Sachsenhausen est bien supérieur. Le mois d’octobre 1944, a` titre d’exemple,
enregistre plusieurs transferts qui répondent aux entre´ es massives de
septembre. Le 13, 60 de´ portés arreˆtés sur le territoire du III e Reich sont transfe´
re´ sa` Langenstein, Kommando de Buchenwald situe´ près de Halberstadt, et
plus des trois quarts meurent a` Langenstein ou lors de son e´ vacuation. Le 15,
un transport emme` ne 43 de´ porte´ s, au moins, vers le Kommando de Karlshagen,
de´ pendant du KL Ravensbru¨ ck, sur les bords de la Baltique. Pre` s des
deux tiers de ces de´ portésdéce` dent dans ce Kommando ou a` Ellrich et Bergen-
Belsen ou` ils sont e´ vacués en avril 1945. Le 16, 149 de´ portés, au moins, sont
dirigés sur le KL Neuengamme et plus de 60 % d’entre eux trouvent la mort
dans ce camp ou dans ses Kommandos extérieurs, ou bien encore lors des
transports d’e´ vacuation, a` Sandbostel ou en baie de Lu¨ beck-Neustadt.
Arnaud Boulligny
1 Les lieux d’arrestation sont connus pour 635 de´ porte´ s (68,3 %).
2 Chiffre donne´ par Jean-Pierre Vittori, Eux les STO, p. 144.
3 Les motifs d’arrestation sont connus pour 576 de´ porte´ s (61,9 % environ).
4 A ce sujet, voir l’ouvrage de Charles Molette, En haine de l’Evangile, Fayard, 1993.
5 Les dates d’entre´ e au KL Sachsenhausen sont connues pour 812 de´ porte´ s (87,3 %). Elles se re´ partissent de la fac¸ on suivante : 2 en 1939, 5 en 1941, 19 en 1942, 117 en
1943, 610 en 1944 et 59 en 1945.
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