29.06.2016 Views

L.ART en LOIRE 11

.

.

SHOW MORE
SHOW LESS
  • No tags were found...

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Simplifions : comme l’axe temporel linéaire ne s’interrompt jamais (ce sera uniquem<strong>en</strong>t<br />

le cas lors de la disparition de l’univers!) la chaîne des causes et des effets ne s’interrompt<br />

jamais non plus. Une cause A <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dre des effets B, C, D qui à leur tour <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dr<strong>en</strong>t<br />

des effets F, G, H, I, J, K, qui <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dr<strong>en</strong>t <strong>en</strong>suite des effets M, N, O, etc. Donc la cause A peut<br />

pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>g<strong>en</strong>drer un nombre illimité d’effets sur une durée suffisamm<strong>en</strong>t longue.<br />

En utilisant le principe de causalité jusqu’à son extrême limite, on <strong>en</strong> révèle l’absurdité intrinsèque.<br />

Notre conception de la causalité est fondam<strong>en</strong>talem<strong>en</strong>t erronée et ne s’applique que<br />

selon nos conv<strong>en</strong>tions, nos délimitations arbitraires de la temporalité. Appliqué rigoureusem<strong>en</strong>t,<br />

le principe de causalité s’autodétruit car sur l’axe temporel, toutes les causes sont<br />

toujours égalem<strong>en</strong>t des effets provoqués par une cause antérieure, liminaire, même si celleci<br />

demeure inaccessible à l’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dem<strong>en</strong>t humain. Objectivem<strong>en</strong>t, aucune cause n’est déjà<br />

plus une cause <strong>en</strong> soi. Elle s’avère toujours la conséqu<strong>en</strong>ce d’une cause plus anci<strong>en</strong>ne. Pour<br />

illustrer l’absurdité flagrante de ce principe, appliquons-le à nos propres vies : les explications<br />

de ce qui passe dans nos exist<strong>en</strong>ces individuelles provi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t d’un<br />

passé séculaire ! Peu importe ce que tu fais, tu es déjà <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t un effet d’une cause plus<br />

anci<strong>en</strong>ne, un rouage dans un <strong>en</strong>semble plus complexe qui t’<strong>en</strong>globe et te dépasse ; et les<br />

conséqu<strong>en</strong>ces définitives de tes actes n’apparaîtront peut-être que des déc<strong>en</strong>nies après ta<br />

disparition.<br />

Les raisons qui pouss<strong>en</strong>t l’humanité à r<strong>en</strong>ier l’absurdité de la causalité sembl<strong>en</strong>t<br />

évid<strong>en</strong>tes : de ce principe dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t toute une vision du monde, pratiquem<strong>en</strong>t la base<br />

commune d’une civilisation. L’anéantissem<strong>en</strong>t du principe de causalité nous amène nécessairem<strong>en</strong>t<br />

à nous interroger sur des notions fondam<strong>en</strong>tales, comme par exemple la responsabilité.<br />

Dans quelle mesure suis-je responsable de mes actes si mon exist<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tière n’est<br />

que la somme des effets <strong>en</strong>g<strong>en</strong>drés par des causes lointaines et inaccessibles ?<br />

La causalité annihilée met <strong>en</strong> relief la question du s<strong>en</strong>s de nos vies. L’être humain<br />

considère comme une évid<strong>en</strong>ce que son exist<strong>en</strong>ce évolue au-dessus du stade primitif de<br />

l’animalité. Notre exist<strong>en</strong>ce ne doit pas être qu’un phénomène biologique, elle doit égalem<strong>en</strong>t<br />

posséder du s<strong>en</strong>s, une valeur, contrairem<strong>en</strong>t à celle des animaux. Qui se demande<br />

sérieusem<strong>en</strong>t quel s<strong>en</strong>s peut-on attribuer à tel ou tel événem<strong>en</strong>t de la vie de telle ou telle<br />

gr<strong>en</strong>ouille ? Pourtant, appliqué à un individu particulier, à quelqu’un que nous connaissons<br />

voire à nous-mêmes, la même question semble légitime.<br />

Sans causes premières id<strong>en</strong>tifiables qui <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dr<strong>en</strong>t pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t des effets infinis,<br />

nos actes et nos vies apparaiss<strong>en</strong>t comme les parties d’un Tout, un nœud indémêlable de<br />

phénomènes qui éradiqu<strong>en</strong>t le s<strong>en</strong>s et la portée. Si tout est lié, alors le s<strong>en</strong>s individuel demeure<br />

fatalem<strong>en</strong>t inaccessible à l’esprit humain. Ainsi, l’application rigoureuse du principe<br />

de causalité se révèle si complexe qu’elle <strong>en</strong> devi<strong>en</strong>t absurde.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!