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Fig. 2 F. Vieira <strong>de</strong> Matos, Le roi <strong>de</strong> Castille recevant un livre <strong>de</strong><br />
Saint Louis, Londres, British Museum.<br />
décoré <strong>de</strong> la Toison d’or, <strong>de</strong>rrière lequel un courtisan<br />
porte sur un coussin la couronne et le sceptre, symboles<br />
par excellence <strong>de</strong> la fonction royale. Le roi saint confie<br />
au monarque vivant un livre sur la couverture duquel est<br />
inscrit le verset Hoc fac et vives (Fais ceci et vis), extrait<br />
<strong>de</strong> l’Évangile <strong>de</strong> saint Luc, exhortation à observer une<br />
conduite morale droite et pieuse. L’aisance du ductus et<br />
la construction harmonieuse <strong>de</strong> l’espace laissent penser<br />
que la feuille peut être une première pensée pour une<br />
future traduction vers l’estampe.<br />
Une scène similaire se trouve en effet dans la gravure<br />
réalisée par Vieira représentant le roi <strong>de</strong> Castille recevant<br />
un livre <strong>de</strong> Saint Louis (fig. 2) 5 ; dans l’estampe la pose du<br />
roi espagnol est relativement similaire à celle du souverain<br />
<strong>de</strong> notre feuille, comme sont presque i<strong>de</strong>ntiques ses<br />
s<strong>and</strong>ales, la partie inférieure <strong>de</strong> sa veste et sa courte<br />
épée. Mais si, dans l’estampe, le roi espagnol est bien<br />
i<strong>de</strong>ntifiable par la présence sur son manteau <strong>de</strong>s tours et<br />
<strong>de</strong>s lions, éléments héraldiques <strong>de</strong>s rois <strong>de</strong> Castille Léone,<br />
ainsi que par l’ordre du Saint-Esprit et <strong>de</strong> la Toison d’or,<br />
dans le <strong>de</strong>ssin en revanche, l’unique marque d’honneur<br />
i<strong>de</strong>ntifiable est cette <strong>de</strong>rnière, commune à <strong>de</strong> nombreux<br />
souverains portugais, parmi lesquels Jean V, principal<br />
comm<strong>and</strong>itaire <strong>de</strong> Vieira. En outre, il paraît vraisemblable,<br />
à la lumière <strong>de</strong> ce qui a été abordé plus haut, que le<br />
souverain représenté soit le roi lusitain, promoteur d’une<br />
politique <strong>de</strong> rapprochement avec la curie romaine et à<br />
l’origine du financement <strong>de</strong> nombreux projets en faveur<br />
<strong>de</strong> la canonisation d’Alfonse I, premier roi du Portugal,<br />
parmi lesquels le livre <strong>de</strong> l’érudit et théologien Josè Pinto<br />
Pereira, Apparatus <strong>de</strong>cem continens argumenta sive non<br />
obscura sanctitatis indicia religiossimi Principis D. Alfonsi<br />
Henrici Primi Portugalliae Regis, justement imprimé à<br />
Rome en 1728. Pour conclure, la feuille étudiée constitue<br />
un parfait exemple <strong>de</strong> la compétence graphique <strong>de</strong><br />
Vieira « dont les <strong>de</strong>ssins sont très estimés ici parmi les<br />
professeurs 6 », comme l’affirme Francisco Preciado <strong>de</strong> la<br />
Vega, Principe <strong>de</strong> l’Académie <strong>de</strong> Saint-Luc et membre<br />
<strong>de</strong> l’Académie royale <strong>de</strong> Saint-Fern<strong>and</strong>, preuve que les<br />
feuilles du Portugais furent toujours recherchées par les<br />
collectionneurs européens.<br />
Dario Beccarini<br />
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