versions - Ecole lacanienne de psychanalyse
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Cette fraternité semble consister en l’exposition à mourir les uns pour les<br />
autres dans une étrange dimension <strong>de</strong> suppléance 49 . L’impossibilité <strong>de</strong> la<br />
substitution n’exclut pas une interchangeabilité paradoxale… et légère.<br />
Dans La Communauté inavouable 50 , Blanchot nous dit que ce qui met plus<br />
radicalement en cause les limites du sujet n’est pas l’être-pour-la-mort, mais<br />
la proximité d’autrui mourant. Prendre sur soi la mort d’autrui (nouvelle<br />
pensée <strong>de</strong> la communauté ?) n’est pas ai<strong>de</strong>r autrui à mourir, mais c’est<br />
partager avec lui l’impartageable…<br />
Ce qui va conduire à dire : qu’analyser… c’est donner la mort…<br />
Car : qu’y a-t-il d’autre sur le ticket d’entrée <strong>de</strong> la cure analytique ?…<br />
L’expérience analytique est une expérience du neutre. L’analyste<br />
« garantit » ce temps <strong>de</strong> l’absence, il invente une topique paradoxale, la<br />
construction d’un espace sans lieu, d’un lieu sans espace,… il libère une<br />
parole, lui donne une sépulture. C’est un <strong>de</strong>hors qui va s’installer, une<br />
rupture <strong>de</strong> l’intersubjectivité.<br />
L’espace <strong>de</strong> l’analyse, dit Lacan, c’est là où gît l’objet partiel 51 , lequel,<br />
pour Jean Allouch apparaît comme « un gisant », « comme une braise pas<br />
tout à fait éteinte… » qui va se transformer en cendres, c’est celui « <strong>de</strong><br />
l’entre-<strong>de</strong>ux-morts » 52 .<br />
Le ressassement, à la fin <strong>de</strong> l’analyse reprendra la parole, celle qui fut<br />
arrêtée en <strong>de</strong>s formes fixes, inscrites dans le corps (symptômes), comme<br />
« un arrêt <strong>de</strong> l’arrêt », dit Blanchot, la parole est rendue à l’interminable, au<br />
mourir.<br />
Georges Perec rend compte, ainsi, <strong>de</strong> sa propre analyse :<br />
« J’étais enfermé avec cet autre dans un espace autre […].<br />
Là-bas comme ici il était presque réconfortant <strong>de</strong> se dire<br />
qu’un jour les mots viendraient. Un jour on se mettrait à<br />
parler, on se mettrait à écrire. Pendant longtemps, on croit<br />
que parler cela voudra dire trouver, découvrir, comprendre,<br />
comprendre enfin, être illuminé par la vérité. Mais non :<br />
quand cela a lieu, on sait seulement que ça a lieu […]. Il y<br />
avait quelque chose d’abstrait dans ce temps arbitraire,<br />
quelque chose qui était à la fois rassurant et effroyable, un<br />
temps immuable et intemporel, un temps immobile dans un<br />
49<br />
M. ANTONIOLI, L’écriture <strong>de</strong> Maurice Blanchot…, op. cit.<br />
50<br />
M.BLANCHOT, La Communauté inavouable, Paris, Minuit, 1983.<br />
51<br />
J. LACAN, séminaire, L’Angoisse, Séance du 9 janvier 1963, sténotypie école <strong>lacanienne</strong> <strong>de</strong><br />
<strong>psychanalyse</strong>, p.21.<br />
52<br />
J. ALLOUCH, Ombre <strong>de</strong> ton chien / Discours psychanalytique, discours lesbien, Paris,<br />
EPEL, 2004, pp. 25-26-27. C’est moi qui souligne.<br />
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