N° 251 3e Trimestre 2010 (Texte intégral) - Cercle Ernest Renan
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aux œuvres d‟Ibn Hazm (à commencer par son Collier de la<br />
colombe) qui ont été brûlées sur une place de Cordoue ou à Averroès<br />
qui a failli être mis à mort, a dû faire amande honorable et finalement<br />
s‟exiler au Maroc. Mais afin de justifier ces si tolérants musulmans,<br />
Vernet se hâte de rappeler (dans la même page) que « Aristarque de<br />
Samos fut accusé d‟impiété pour avoir défendu le système<br />
héliocentrique ». En réalité c‟est Aristarque qui a posé l‟hypothèse<br />
du système héliocentrique. Quant à l‟accusation d‟impiété qui a été à<br />
plusieurs reprises portée contre certains penseurs à Athènes, il faut<br />
préciser que ces accusations avaient avant tout un caractère politique,<br />
qu‟elles étaient le fait d‟un simple individu (en cette occurrence un<br />
certain Cléanthe, à en croire Plutarque qui rapporte cette anecdote) et<br />
qu‟elle portait rarement à conséquence : ces défenseurs de la religion<br />
étaient similaires à nos modernes associations dont je tairai les<br />
sigles, qui s‟érigent en tribunaux pour juger des opinions ou des<br />
propos qui leurs déplaisent. Aucun rapport donc, avec les tribunaux<br />
inquisitoriaux du christianisme et les fatwas des musulmans. Et<br />
précisons que ce genre de procès ne semble avoir été pratiqué qu‟à<br />
Athènes, et ils étaient inconnus dans l‟Alexandrie des Ptolémée. Ce<br />
qui nous montre que même dans des démocraties comme celle<br />
d‟Athènes, il y a toujours des imbéciles, des fanatiques, des tartuffes,<br />
même si ce genre d‟individu se rencontre surtout dans les pays où<br />
sévissent les religions monothéistes. Cependant, notre auteur fait<br />
l‟impasse sur tous les massacres ou pogroms que connut l‟Espagne<br />
musulmane.<br />
Autre énormité qu‟on est en droit de s‟étonner de trouver sous la<br />
plume de quelqu‟un censé être un « médiéviste ». Page 306 il parle<br />
d‟artifices littéraires qui s‟affirmeraient dans la littérature<br />
occidentale à partir de la Renaissance par suite du « développement<br />
de l‟Humanisme et de la redécouverte des littératures latine et<br />
grecque. » Quoi ! le Moyen Âge occidental n‟aurait donc pas connu<br />
la « littérature latine » ! Alors qu‟on sait que, contrairement aux<br />
jeunes musulmans qui apprenaient à lire dans le Coran et ne<br />
pouvaient commencer d‟autres études qu‟à partir de dix ans ou plus<br />
encore, dès l‟institution des écoles carolingiennes, et même plus tôt,<br />
l‟enseignement était fondé essentiellement sur les anciens auteurs<br />
latins, en application du trivium et du quadrivium directement<br />
transmis de l‟Antiquité à travers Boèce et Martianus Capella.