Les Fungi de Yuggoth - Trouver Objet Caché
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sans nous pour appeler dans l’urgence une ambulance, il<br />
se serait sans doute vidé <strong>de</strong> son sang avant que<br />
quiconque s’inquiétât <strong>de</strong> son absence.<br />
Nous tenterons <strong>de</strong>main matin, moi me faisant<br />
passer pour Herbert Whitefield, imprésario & agent<br />
artistique – Dieu me gar<strong>de</strong> pourtant <strong>de</strong> lui ressembler<br />
jamais ! – <strong>de</strong> rendre visite à Paul, dont nous sommes<br />
convaincus désormais que son agent l’a fait enlever par<br />
une ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> gros bras <strong>de</strong> Wexler pour l’hospitaliser <strong>de</strong><br />
force. Sans doute Paul <strong>de</strong>venait-il irritable et<br />
incontrôlable, après que Whitefield eût trop tiré sur la<br />
cor<strong>de</strong>, et voulait-t-il le forcer à prendre un repos faute<br />
duquel il risquait <strong>de</strong> perdre complètement les pédales :<br />
et Herbert Whitefield était sans doute prêt à tout, sauf à<br />
perdre la poule aux œufs d’or.<br />
Samedi 2 juin 1928, General Hospital, New-York, NY.<br />
J’écris au chevet <strong>de</strong> mon cher ami le Pr. Costing,<br />
lequel est à l’heure actuelle entre la vie et la mort, après<br />
qu’on vienne <strong>de</strong> lui retirer une balle <strong>de</strong> la boite<br />
crânienne. Fort heureusement, il semble que ladite balle<br />
ait été presqu’entièrement stoppée par la calotte osseuse,<br />
et les chirurgiens du service <strong>de</strong> neurologie nous<br />
annoncent <strong>de</strong> bonnes chances <strong>de</strong> guérison. Il est encore<br />
trop tôt pour qu’ils se prononcent définitivement<br />
néanmoins, l’œdème cérébral ayant entraîné un coma<br />
qui <strong>de</strong>vrait durer plusieurs jours. Quoiqu’il advienne,<br />
une chose est sûre : Ben Costing aura une belle cicatrice<br />
sur le côté supérieur du visage, <strong>de</strong> la tempe jusqu’au<br />
sommet <strong>de</strong> l’occiput.<br />
Ne pouvant fermer l’œil, je vais essayer <strong>de</strong><br />
raconter par le détail les évènements <strong>de</strong> la journée.<br />
Nous nous présentâmes ce matin, le Pr. Costing<br />
et moi, comme convenu, au Wood’s Estate Resthome dès<br />
l’ouverture <strong>de</strong>s heures <strong>de</strong> visite. Je ne pus hélas pas<br />
étendre mon droit d’accès au professeur, qui dut<br />
attendre dans le hall. Un infirmier me guida jusqu’à la<br />
chambre <strong>de</strong> « Pauly Meldon » – seul un esprit aussi<br />
grossier que celui <strong>de</strong> Whitefield pouvait donner un<br />
pseudonyme aussi diaphane au médium–, mais quelle ne<br />
fut pas alors notre stupeur <strong>de</strong> découvrir que sa chambre<br />
était vi<strong>de</strong> ! Quelque peu paniqués, nous apprîmes par<br />
une femme <strong>de</strong> ménage qu’un infirmier venait à l’instant<br />
<strong>de</strong> nous précé<strong>de</strong>r, et avait emporté Paul sur un fauteuil<br />
roulant. Nous courûmes dans un seul mouvement dans<br />
la direction qu’elle nous indiqua, dévalant les escaliers,<br />
déboulant dans les couloirs sans retrouver leur trace.<br />
Alors que nous passions par le hall, le Pr. Costing<br />
s’agrégea à notre groupe <strong>de</strong> poursuivants. Dehors, le<br />
faux infirmier s’était mêlé à quantité <strong>de</strong> vrais patients,<br />
rendant son i<strong>de</strong>ntification difficile. L’infirmier nous<br />
apprenant qu’il existe <strong>de</strong>ux issues à la rési<strong>de</strong>nce, nous<br />
l’enjoignîmes <strong>de</strong> courir prévenir les vigiles <strong>de</strong> l’entrée<br />
principale, alors que nous contournions l’établissement<br />
pour nous ruer vers l’entrée secondaire. Dans le vaste<br />
parc, nous ne tardâmes pas à repérer la haute silhouette<br />
d’un infirmier courant aussi vite qu’il le pouvait en<br />
poussant un fauteuil roulant. Nous gagnâmes vite du<br />
terrain tout en lui criant <strong>de</strong> stopper. Alors que nous<br />
n’étions plus qu’à quelques dizaines <strong>de</strong> mètres, il s’arrêta<br />
– nous reconnûmes celui qui s’était présenté comme<br />
Devlin – et menaça Paul <strong>de</strong> son arme. Réagissant<br />
d’instinct, le Pr. Costing fit feu, croyant sans doute que<br />
l’individu bluffait. Sa balle le manqua, mais l’autre<br />
riposta, et toucha mon cher camara<strong>de</strong> en pleine face,<br />
m’éclaboussant <strong>de</strong> son sang. Je levai les mains, puis me<br />
jetai sur le professeur pour jauger la gravité <strong>de</strong>s dégâts et<br />
stopper dès que possible l’hémorragie, impressionnante.<br />
Fort heureusement, un infirmier nous porta secours<br />
après quelques instants, et le Pr. Costing put être opéré<br />
très vite dans les meilleures conditions. Quand je pensai<br />
à me préoccuper <strong>de</strong> Paul et <strong>de</strong> son ravisseur, celui-ci<br />
avait été vu <strong>de</strong>puis longtemps s’enfuyant en passant<br />
lestement par-<strong>de</strong>ssus le mur <strong>de</strong> la propriété. Paul était<br />
sain et sauf, assommé sans doute par les médicaments.<br />
Dimanche 3 juin 1928, New-York, NY.<br />
J’ai vu ce matin Paul, plus luci<strong>de</strong> qu’il ne l’était<br />
hier, l’esprit embrumé par les barbituriques. Il m’a<br />
remercié avec beaucoup <strong>de</strong> chaleur <strong>de</strong> l’avoir aidé à<br />
sortir <strong>de</strong> cette torpeur médicamenteuse, et s’est<br />
immédiatement inquiété <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> santé du Pr.<br />
Costing. Il semble que celui-ci aille mieux, et on peut<br />
être amené à espérer que la vilaine balafre sera la seule<br />
séquelle dont il aura à souffrir – telles sont les nouvelles<br />
réconfortantes que je pus lui donner. Quant à<br />
Whitefield – il était écrit que les différents protagonistes<br />
<strong>de</strong> cette aventure finiraient à l’hôpital – il est sorti du<br />
coma, mais va vraisemblablement être inculpé <strong>de</strong><br />
plusieurs chefs d’accusation par la police, et il a perdu<br />
irrémédiablement la confiance et le dévouement <strong>de</strong><br />
Paul.<br />
J’ai appelé Mrs. Le Mond pour la rassurer, lui<br />
promettant que j’accompagnerai Paul jusqu’à Buffalo<br />
dès que son état <strong>de</strong> santé lui permettra <strong>de</strong> retourner<br />
vivre là-bas sa convalescence.<br />
Dimanche 10 juin 1928, Buffalo, NY.<br />
J’ai été merveilleusement reçu par Irène Le<br />
Mond. Je suis logé dans la chambre d’amis, qui a été<br />
abondamment fleurie en mon honneur. Au cours <strong>de</strong> la<br />
journée, la vieille dame n’a pas manqué une occasion<br />
pour me parler <strong>de</strong> Paul, l’objet <strong>de</strong> son affection<br />
exclusive. Tout m’a été dit sur l’enfance <strong>de</strong> Paul, les<br />
rêves étranges qui marquèrent son adolescence, puis qui<br />
s’arrêtèrent à ses dix-sept ans, au moment où il fut saisi<br />
d’une première crise d’amnésie. Lors du séjour à<br />
l’hôpital qui suivit celle-ci, il rencontra un homme<br />
étrange, Clarence Rogers, dont Paul m’avoua qu’il était<br />
le même individu qui, s’étant présenté à nous comme<br />
Devlin, avait tenté <strong>de</strong> le kidnapper. Après cette<br />
rencontre, et l’emprise que cet homme exerça par la