NISAN-IYAR/5772 AVRIL-MAI/2012 - Hevrat Pinto
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Cette idée nous permet également de comprendre pourquoi<br />
David haMelekh eut le mérite insigne de former la quatrième<br />
roue du char divin – les trois autres étant formées par Avraham,<br />
Yits’hak et Yaakov –, et non Adam Harichon, Moché<br />
Rabénou, qui dispensa la Torah au peuple juif, ou d’autres<br />
prophètes et guides du peuple juif. D’après cette interprétation,<br />
on comprend pourquoi, plus que tous, David haMelekh<br />
pouvait prétendre à cette place, dans la mesure où il avait<br />
hérité ses soixante-dix ans de vie des Patriarches, ce qui liait<br />
étroitement son âme aux leurs.<br />
De manière similaire, on sait que la création d’Avraham<br />
et de Yits’hak n’avait de sens qu’en vue de celle de Yaakov<br />
Avinou, pilier de la Torah et père des douze tribus fondatrices<br />
du peuple juif. Or, de même que Yaakov ne quitta jamais la<br />
tente de la Torah, qui était au cœur de son existence, ainsi, le<br />
roi David, qui portait en lui une partie de cette âme exceptionnelle,<br />
fut-il toute sa vie plongé dans l’étude de la Torah. Elle<br />
était, comme il le certifie lui-même, son bien le plus précieux.<br />
Cette analyse pose cependant problème : si le Saint béni<br />
soit-Il se refusa à donner les soixante-dix années de vie<br />
d’Adam au roi d’Israël, pourquoi ne les rendit-Il pas au premier<br />
homme ? Pourquoi les détruisit-Il irrémédiablement ?<br />
La réponse nous enseigne une leçon d’une grande acuité :<br />
lorsqu’un homme ne met pas toute son existence au service<br />
de la Torah, lorsqu’il ne cultive pas d’amour et de sentiment<br />
de responsabilité vis-à-vis d’autrui, toutes ses années n’ont<br />
aucune valeur aux yeux du Créateur, elles sont, pour ainsi<br />
dire, insignifiantes. Lorsqu’il arrivera dans le monde de Vérité,<br />
on lui montrera qu’il a gaspillé son existence.<br />
Dans un même ordre d’idées, l’homme médisant se voit<br />
délesté de toutes ces mitsvot, de tous les mérites qu’il avait<br />
accumulés, comme s’il n’avait jamais accompli une seule<br />
mitsva – si ce n’est celle de la tsedaka, dont le mérite est éternel.<br />
Ainsi, une vie qui n’est pas consacrée à la Torah et aux<br />
mitsvot n’en est pas une ; elle est vaine et irrémédiablement<br />
perdue.<br />
Or, si Adam Harichon avait été plus scrupuleux quant à ce<br />
fondement de la Torah, si, le moment venu, il avait cédé ses<br />
soixante-dix années de vie avec joie, toutes les œuvres du roi<br />
David, toutes ses brillantes réalisations, auraient été créditées<br />
à son bienfaiteur. En outre, la vie de David haMelekh n’est<br />
pas considérée comme close. Il a certes été appelé à comparaître<br />
devant le tribunal céleste mais, d’une certaine manière,<br />
son âme continue de vivre et de vibrer, à travers ses Psaumes<br />
que des milliers d’enfants d’Israël entonnent et ont entonné<br />
au fil des générations, comme autant de louanges adressées au<br />
Créateur du monde. « Les justes sont appelés vivants même à<br />
titre posthume », affirment ainsi nos Sages.<br />
L’existence de David Hamelekh est en cela illimitée et<br />
infinie, et il est impossible, de ce fait, d’évaluer, à la mesure<br />
du mérite du doux chantre d’Israël, l’ampleur de la perte<br />
d’Adam Harichon.<br />
Ceci nous permet de souligner l’importance de l’amour<br />
d’autrui. Lorsque l’homme considère et aime son prochain<br />
comme une partie de lui-même, cet amour a un pouvoir extraordinaire<br />
: toutes les bonnes actions réalisées par son prochain<br />
grâce à cet amour, lui sont créditées ! A l’inverse, refuser d’ai-<br />
mer son prochain, nier tout sentiment de responsabilité visà-vis<br />
de son alter ego, c’est encourir une perte incalculable.<br />
Dans ce sens, Rabbi Akiva soulignait qu’aimer son prochain<br />
comme soi-même est l’un des principes de base de la<br />
Torah, un fondement essentiel sur lequel elle repose. Pour<br />
cette raison, la pratique de la Torah de celui qui s’abstient<br />
d’accomplir cette mitsva, souffre d’une lacune de taille, l’eûtil<br />
étudiée avec assiduité tout au long de sa vie. La voie royale<br />
est celle de l’étude de la Torah conjuguée à l’amour d’autrui.<br />
A cet égard, le fait que les enfants d’Israël ne purent recevoir<br />
la Torah que quand ils campèrent, face à la montagne,<br />
« comme un seul homme doté d’un seul cœur », est éloquent.<br />
La Torah ne leur fut donnée qu’après qu’ils eurent fait preuve<br />
d’une véritable union, d’un sentiment de responsabilité réciproque.<br />
De même, le fait qu’Adam Harichon fut prêt, sans coup<br />
férir, à donner soixante-dix ans de sa vie à David haMelekh,<br />
avant d’avoir goûté à l’existence, est très révélateur : combien<br />
de fois nous déclarons-nous prêts à rendre un nombre incalculable<br />
de services à notre prochain mais, après nous être rendu<br />
compte de l’importance et du caractère contraignant de notre<br />
engagement, nous perdons bien souvent toute motivation<br />
! Souvent, nous sommes prêts à venir en aide à autrui tant<br />
que nous ne ressentons pas les sacrifices personnels que cela<br />
implique. Mais, dès que nous en prenons conscience, nous<br />
regrettons nos engagements et nous rétractons bien vite. Or,<br />
de fait, la dimension suprême du don est celle où l’on agit<br />
avec joie et amour, quand bien même il nous en coûte, matériellement<br />
ou physiquement, prouvant ainsi que l’on aime son<br />
prochain comme soi-même, ce qui constitue la quintessence<br />
de la Torah.<br />
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